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 Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir.

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Esprit Saint-Thelme
Où le noir et le blanc, l'ombre et la lumière, le mal et le bien s'entremêlent et se conjuguent
Esprit Saint-Thelme

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MessageSujet: Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir.   Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir. EmptyJeu 2 Mai - 2:36


Carton d'invitation


Registre des habitants de la ville de Paris


Nom & Prénoms : Esprit Saint-Thelme.
Âge & Date de naissance : (jour inconnu) 1864, donc 33 ans.
Origine sociale : honnête et simple ; sa mère était une petite bonne de province, son père un vétéran estropié.
Métier, occupation : Serviteur.
Ambitions : Continuer à mener sa vie, sans être égorgé au coin d’un bois, pendu en place publique, ou soupçonné en quelque façon.
Milieu fréquenté : Celui où il suit son maître du moment.
Mondanité : toute relative, son visage se grave dans les mémoires même s’il n’a pas prononcé un mot de la soirée.
Infamie : un potentiel nettement plus fourni, c’est un habitué des routes et de leurs tracas, qui sait se faire respecter du menu fretin et intriguer les plus gros poissons.



Tout esprit profond s'avance masqué

Description physique et psychologique


Esprit est au premier abord le stéréotype du majordome exotique, énigmatique voire muet, lévrier languissant aux pieds de son maître, dogue grondant aux portes en cas de visite importune. Il semble fait pour agiter une palme à longueur de journée au-dessus d’un hamac, ou pour tenir un sabre courbe au seuil d’une salle du trône. Cette prestance est cependant altérée par un petit détail, c’est le cas de le dire. De taille moyenne voir un peu moins haut, il prétend avoir du sang de pygmée. Son assiduité à la pratique guerrière supplée à cette apparente faiblesse, ainsi que sa souplesse de saltimbanque. Si l’on avait l’œil un peu plus mesquin, l’on y verrait la féline mobilité des danseuses et des courtisanes. Ses pieds, mains et oreilles, sont petits et délicats, comme voulus par un sculpteur qui l’aurait voué aux appétits masculins les plus dévoyés ; sortie d’une gorge imberbe, sa voix aux timbres variés chante à merveille les berceuses et les romances ; ce que l’on attend en d’immenses proportions selon les préjugés du temps n’a pas chez lui ces glorieuses dimensions. Mais peu importe, jamais on ne le juge trop peu viril : l’extravagance des couleurs, des bijoux et des tenues, et la frivolité d’une démarche dansante, est permise aux enfants et aux Noirs ; leur absence en serait même décevante. Sournois et méprisant à l’égard de ses contemporains de la métropole, il s’amuse volontiers à jouer de ces cordes sensibles, éveillant l’indulgence par un rire benêt qui découvre une blanche dentition, roulant de gros yeux et battant des mains, cajolant les bêtes et les nouveau-nés de roucoulantes niaiseries.

Cependant, dès qu’il décèle la présence d’une autre attitude à son égard, d’une lucidité que ses singeries ne suffiront pas à attendrir, il cesse ce jeu et restitue son estime à son interlocuteur, en le traitant désormais en adulte. Il cessera également de feindre un langage peu élaboré, teinté d’un fort accent tropical ; il parle en effet deux langues d’Europe avec une certaine aisance, et ses erreurs sont celles de son père, celles des voyageurs ayant fait leur apprentissage en mer, sans être au fait des tournures à la mode sur tel ou tel illustre rivage, et sans réellement s’en soucier. La relative beauté dorée de son visage sculptural en ferait un modèle patient et agréable pour les peintres adeptes de traits inhabituels. Mais il ne se dévêt pour personne, prétextant un fort interdit religieux. Quoique ! La vérité reste qu’il est fort sensible aux défis, et ne peut se retenir de relever le gant lorsqu’on lui propose un pari, d’autant plus qu’il est risqué et que son interlocuteur semble douter de son courage. Cette fierté mal placée, qu’il dirait venir également de son père s’il abordait le sujet avec vous pour une raison qui m’échappe, est probablement sa principale faiblesse, et donne accès à tous les recoins les plus secrets de son âme, laquelle n’en manque pas. Elle est chez lui la source de tous les autres péchés, et il y a fort à parier, justement, qu’une pensée habile à calculer celle des autres ferait de lui son véritable serviteur, son très-inféodé vassal ; non plus par humilité, mais bien par désespoir de prouver sa valeur.

A ce titre, Esprit n’a rien à envier à ces chevaliers Maures qui affrontaient Roland dans les monts pyrénéens, sinon peut-être leurs terres et leurs titres. Il tient d’eux la fougue face à l’aventure, le sang-froid dans l’adversité, ainsi qu’un plaisir secret à monter à cheval et à tenir une arme, plaisir né d’un fanatisme d’enfance pour Alexandre Dumas dont il rougirait si son teint le lui permettait. L’habitude du grand-monde lui a enseigné comment se bien conduire en société, mais tout à fait conscient qu’on ne le prendrait guère au sérieux, il dédaigne superbement d’en faire usage, voire force le trait, joue les bons sauvages, sachant qu’on lui pardonnera. Les belles femmes de son temps lui tournent la tête en un clin d’œil, car il a le cœur tendre et le caractère sanguin ; mais il se les interdit avec tout autant d’intransigeance ; la seule qu’il courtisa jadis lui fit vivre un enfer, n’ayant elle-même pas toute sa tête, sans doute le résultat d’une longue consanguinité. Tel le matou échaudé, il garantit désormais son cuir de ces piques assassines, en évitant à tout prix de dévoiler les failles dans son armure. Ni truand, ni mignon, les aspérités habituelles de la nature humaine sont chez lui polies par les années, au point qu’on les distingue à peine. Véritable moine du service domestique, il appartient à son maître comme il appartiendrait à une maîtresse, jeu de mot aisé mais combien révélateur ! Dépourvu de famille, d’attaches et de grandes causes, il n’a que son maître au monde – ce qui pourrait sembler touchant, si tous les maîtres n’étaient pas entièrement interchangeables à ses yeux.

Et malgré tout, à son maître lui-même il ne confie pas l’ensemble de ses pensées. Jamais il ne prendrait la liberté de lui réclamer un ouvrage à lire, tiré de sa bibliothèque. Il trouve bien plus courtois de voler ledit ouvrage puis de le remettre en place comme si de rien n’était. Ainsi est-il entré dans ce monde, et ainsi en sortira-t-il, si le Ciel le veut : comme si de rien n’était. Le Ciel, car il n’invoque pas le nom de Dieu. Il ne le crie pas sur les toits mais il est sans religion. Son unique croyance de type mystique porte sur les esprits qui hantent, ou servent, selon les cas, les familles, dans la version bâtarde du vaudou africain que pratiquait son père. Il en tient son prénom, puisque le prêtre itinérant avait décelé en lui la présence d’un esprit très puissant, incarné dans cette fluette enveloppe, et responsable de ses bizarreries. Aucune distinction n’était faite entre la personnalité la plus intime de l’enfant et cet esprit millénaire, immortel, supposé l’habiter. Lorsqu’il a pour la première fois cherché du travail auprès d’une grande dame parisienne, évanescente ogresse qui l’engagea davantage pour son joli minois de seize ans que pour ses qualifications, il laissa cette partie de son histoire de côté, et ne rencontra plus guère d’occasions de s’y replonger dans son nouvel univers, celui des bonnes familles et parfois même des salons huppés, pour les vingt-sept années qui ont suivi. A la rigueur eut-il l’occasion une fois ou deux de sourire face aux velléités de spiritisme pratiquées chez certains de ses employeurs.

Aujourd’hui, lorsqu’on le questionne sur cet aspect de son éducation, le domestique se contente de déclarer : mon père était vicaire. Néanmoins, l’essentiel lui en reste : cet Esprit le possède pour une bonne raison. Lorsqu’il s’engage, c’est qu’il croit l’avoir trouvée. Lorsqu’il s’emporte, c’est qu’il en croit la dignité offensée. Et lorsqu’il fait preuve de courage, c’est qu’il s’identifie à cet Esprit immortel, qui ne connaît pas la peur.



Seules les pensées que l'on a en marchant valent quelque chose

Texte d'introduction au personnage ou test RP


C’est à Paris qu’il avait trouvé de l’embauche, c’est à Paris qu’il fallait retourner, à présent qu’Esprit avait été congédié par Madame. Jonas était grand à présent, il allait au pensionnat, et hors de question qu’on lui envoie là-bas son serviteur africain et son cheval andalou, ni même qu’on nourrisse ces deux bouches inutiles en son absence. Le cheval était vendu, et si l’on avait pu en faire de même pour Esprit, nul doute que ç’aurait été le cas. Depuis cinq ans qu’il veillait sur ce jeune garçon, l’homme s’y était vaguement attaché, mais pas au point de pleurer leur séparation. Après tout, l’on n’est pas désolé pour les gens qu’on aime lorsqu’ils partent à la rencontre de leur destin. C’est donc la tête haute, quoique non coiffée et mouillée de pluie, qu’il rejoignait à pied la gare la plus proche, où il investirait ses gages dans un billet sans retour pour la capitale. Bientôt, les collines rouges et le hurlement des cigales en rut disparaîtraient dans le lointain, et il n’y songerait même plus. Leçon numéro un : retomber sur ses pattes. Sa mère lui avait affirmé que c’était cette astuce qui valait aux chats leurs neuf vies.

« Comment tu t’appelles ? »

Seigneur. Il fallait que cela arrive… S’il avait pu porter le masque du bourreau, peut-être l’aurait-on laissé en paix ? Non, cela même aurait attiré les attentions de ses voisins de wagon. Il aurait fallu qu’il joue les Maures de Venise par un perpétuel Carnaval pour avoir la paix. Quelques secondes de réflexion plus tard, Esprit lança une réponse. Il avait porté plusieurs noms au cours des décennies précédentes. Alexandrin, Tête de Maure, Spiritus, Le Grégeois, Saint-Elme… c’était selon l’imagination de ses employeurs, et il ne leur disputait pas ce droit fondamental. Le petit bonhomme aux joues vivement colorées qui le dévorait des yeux fut vite rappelé à l’ordre par celle qui l’accompagnait, mère ou gouvernante, engoncée dans un col des plus puritains. Ce qui suivrait n’était pas un mystère ; le contrôleur avec lequel elle avait échangé quelques murmures concis s’avança vers le domestique démobilisé, et ses traits exprimaient un mélange de courtoisie maladroite et de familiarité bien vécue.

« Je vais vous demander de passer à l’arrière avec les bagages, monsieur. »

Sans le savoir, il annulait par ce simple « monsieur » l’indignité du traitement qu’il imposait si nonchalamment. Esprit lui sourit en se levant, ramassa son baluchon sous les yeux écarquillés du petit bonhomme joufflu, et gagna la voiture correspondant à ses mérites. Débarrassée de sa présence indécente, ou du moins des indécentes pensées qu’elle risquait de lui inspirer, la gouvernante puritaine n’en éprouva pas moins une légère, diffuse sensation de remords, ce remords soulagé que l’on connaît lorsqu’il est trop tard pour rattraper un acte égoïste, mais satisfaisant. Son carton à chapeau se trouvait probablement parmi le capharnaüm du wagon sans fenêtres, cliquetant et encombré, où notre voyageur tâchait à présent de s’asseoir à son aise. Il aurait pu pisser dedans l’âme tranquille, s’il avait su duquel il s’agissait ; mais ce n’était pas le genre de Saint-Thelme. Leçon numéro deux : les sentiments qui font souffrir ne sont bons qu’à ça. Jalousie, rancune, ambition… Inutile de s’empoisonner soi-même.

Un pauvre diable déjà vautré dans un coin, la bave au menton, dormait peut-être depuis la station de départ, ce qui était tout à son honneur étant donné les conditions de transport. Contrairement à son nouveau compagnon d’infortune, cet illustre inconnu n’avait pas eu de quoi se payer une place, et s’était donc glissé comme un voleur parmi tous les beaux objets, les animaux de compagnie délicats qui donnaient à l’endroit un aspect de caverne d’Ali Baba. Rien de tout cela ne semblait l’avoir intéressé. Il sauterait certainement en marche, les mains vides, peu avant d’atteindre sa destination. Déjà, au-dehors, les collines rouges laissaient la place aux vertes plaines, et les cigales aux oiseaux chanteurs. Il n’entendait plus rien, ne voyait plus rien, dans cette boîte aveugle, remplie d’autres boîtes qui en contenaient peut-être d’autres, à l’infini, cercueil mis en abîme au point d’en devenir vertigineux. Pour lutter contre le mal de cœur qui menaçait, il se cala dans le sens de la marche et tâcha de s’assoupir à son tour. Leçon numéro trois : quand tout semble sans issue, dors. A ton réveil, tes idées seront plus claires, et une porte s’ouvrira.

Le soleil entra dans le compartiment comme un coup de sifflet ; le vagabond comme Esprit sursautèrent et se recroquevillèrent face à cette armée de photons en marche. Esprit, d’autant plus qu’il avait cauchemardé. Les cérémonies auxquelles s’amusait son père, prétendant dans les villages qu’il faisait du vaudou, terrifiant les enfants et fascinant la curiosité malsaine des adultes, ressurgissaient parfois au creux du sommeil, parées des flamboiements infernaux de l’imagination. Mais sitôt réveillé, il se rappelait quel homme adorable avait toujours été, à son égard tout du moins, l’ancien héros des troupes coloniales, devenu bateleur itinérant une fois sa jambe amputée. Il n’avait pas à avoir peur. La force et l’éternel sourire de son père était une aide permanente, une main amie sur son épaule, même au cœur des plus terribles circonstances, même au fond de la plus glaciale solitude. A ce propos, il se sentait fort engourdi. Le temps de l’escale, le mouvement du personnel pour sortir du wagon les bagages réclamés, lui donnerait l’occasion de se dégourdir un peu, et de satisfaire un besoin pressant. Pour ce faire, il s’isola au plus loin du regard des voyageurs, gêné de leur regard omniprésent, continuellement ancré sur sa nuque. Vivement le retour à la vie de famille, au statut de meuble familier, et à cette bienheureuse inexistence qui accompagnait une telle condition. Enfoui dans un buisson, derrière le fossé qui abritait la voie, il parvint à trouver un espace entièrement dissimulé, puis revint en courant alors que les sifflets retentissaient déjà. Le vagabond s’était réveillé.

« Tu parles français ? »
« Je suis français, monsieur. »


A travers sa barbe inculte, le jeune gredin se fendit d’un grand rire sincère. Il n’eut dès lors de cesse d’attirer l’attention de son compagnon de voyage. Impossible de dormir sans paraître grossier. Pour finir, il fallut complimenter le garçon sur le magazine d’images grivoises qu’il tenait absolument à lui faire admirer. Il prétendait être fils de bonne famille, parti vivre la vie de bohème avec les artistes de Montmartre. L’espace d’un instant, Esprit fut tenté de le croire, et de craindre que son petit Jonas termine ainsi. L’alcool semblait avoir été la seule nourriture de ce pauvre hère depuis quelques temps ; d’ailleurs, il essaya également de le partager, mais cette fois Esprit refusa. Jamais d’alcool. C’était trop dangereux. Leçon numéro quatre : tout ce qui te rend plus faible rend tes ennemis plus forts.

« Celle-là, elle est danseuse au cabaret. Pas mal, hein ? J’essaierai de la rencontrer, je lui dirai : je dors sur votre portrait depuis des mois ! »
« Cela devrait la flatter. »
« Et celle-là ? »
« C’est un homme. »
« Non ! Benêt ! C’est un autre genre de cabaret. A Londres, les bonnes femmes se déguisent en hommes et font des spectacles comiques. Mâle… impersonator. Regarde, c’est écrit là. Tu sais lire ? »
« Oui monsieur, je sais lire. Lorsqu’on m’engage, je signe un contrat. »
« Pas besoin de savoir lire pour savoir signer ! Demande à ces connauds de militaires ! »
« Mon père était militaire, monsieur. »


Pas un regard pour la photo. Pas une pensée dans cette direction. Pas de rêve, pas d’envie, pas même la plus légère marque d’intérêt ; tourner la page, le plus vite et le plus paisiblement possible. D’ailleurs, confus de sa bévue, car c’était un brave gamin dans le fond, Balthazar, puisque tel était le nom qu’il avait donné, se hâta lui aussi de pointer la peinture suivante : elle était si criarde qu’elle leur servirait à tous deux de diversion idéale.
« Et celle-là, elle pose devant un bordel. Tu imagines le nombre de bordels qu’il doit y avoir à Paris ? »
« Ma mère faisait le ménage... dans un… dans une maison de tolérance, monsieur. »
« Mais elle était pas employée, au sens où je l'entends. »
« Non, certes. »

Non, certes : la formule fit rire le vagabond. Ils passèrent à autre chose. Mais dans un coin de sa tête, Saint-Thelme se rappelait : sa mère n’était pas employée, mais pour assurer la survie de son enfant, dont le père courait les routes et passait faire un petit bonjour quand il y pensait, elle avait dû se débrouiller. Leçon numéro cinq : mentir, c’est jeter son cœur aux corbeaux. Ne le jette que pour sauver quelqu’un que tu aimes. Ainsi, pendant quatre ans, jusqu’à l’âge auquel son père pourrait l’enlever et se charger de lui, le petit Saint-Thelme s’était appelé Thelma. « Oui, madame, une petite fille, et je vois déjà qu’elle deviendra sublime en grandissant, une petite métisse des îles, ça ferait bien dans votre collection. Les messieurs viendraient de Lyon pour y goûter. Ils vous paieraient double prix. Vous me la pouponnez jusqu’à ce qu’elle soit en âge, et après je vous la donne. Vous y faites une affaire. C’est ça ou les marches de l’Eglise, à vous de choisir ! » La tenancière avait succombé, l’enfant placé entre ses bras. C’était une femme, malgré la vie qu’elle menait. Dès lors, une armée de filles de joie s’étaient attachées à élever, à gâter, à divertir le bébé de la maison, qui s’était trouvé comme un coq en pâte – à condition de déclarer qu’il était une fille, et de répondre au prénom de Thelma.

« Tu sais quoi ? Quand je serai vieux, je partirai finir mes jours dans les îles. Je peindrai des indigènes à moitié nues, des fleurs, je tiendrai un petit bar où descendront les aventuriers. Tu devrais venir avec moi. Tu servirais les clients, ça ferait bien couleur locale. Ça serait autre chose que cette grosse ville puante pleine d’escrocs et de bourgeois, non ? »
« Pour sûr. »


Mais aucune couleur ne ferait jamais battre le cœur de Saint-Thelme comme la grisaille parisienne, et en posant le pied sur le quai, leur supplice commun enfin terminé, il éprouva de nouveau le même serrement dans la poitrine, la même impulsion qui lui montait au cerveau, prenante comme les fumées de l’absinthe. Malgré lui, il commença à chercher un visage connu dans la foule grouillante et affairée. Sa main s’était crispée sur son baluchon, et ce n’était pas par crainte des voleurs à la sauvette. Cette ville, et plus précisément le quartier de la gare, était le seul endroit au monde où son âme ait jamais pris son envol. Il avait été libre, ici. Il avait été intensément heureux, intensément malheureux, et ses sentiments s’étaient exprimés en phrases. Un temps révolu, certes, mais le seul temps qu’il se rappellerait sur son lit de mort. Et pourtant, cette femme avait fait mentir jusqu’aux principes de sa mère. « Leçon numéro six : tu la veux, tu l’épouses. Ne fais pas comme ton père. Et personne ne pourra plus te reprocher tes apparences, quand tu seras aux yeux de tous un bon père de famille. » Eh bien, il l’avait voulue, il l’avait épousée – certes, l’extrait de naissance était faux, c’était peut-être ce qui lui avait porté malheur – et il s’était comporté en tous points en bon père de famille pour la veuve et son engeance orpheline. Et pourtant…

Esprit se retourna. Balthazar avait disparu. Adieu les grands projets de départs sous les tropiques ! Et bonjour les bordels, sans doute. C’était une bonne nouvelle, car il avait peu de temps devant lui, ses économies ne lui permettant pas de soutenir une existence oisive en un lieu si prestigieux pendant bien longtemps. Le vieux bureau de placement qui l’avait déjà accepté par le passé n’était pas bien loin, par chance, et en poussant un peu plus vers l’Est, il retrouverait sans doute le petit hôtel miteux qui l’abriterait le temps d’examiner sa candidature.
« Hé, noiraud, c’est à toi ces cochonneries ? »
Le contrôleur lui tendait le magazine licencieux abandonné par son éphémère compagnon de route. Sans répondre, Saint-Thelme s’en empara, et disparut dans les tourbillons de la populace, serrant la précieuse liasse de papier contre son cœur, défaisant fébrilement son gilet pour la glisser à l’intérieur, à l’abri, dissimulée aux yeux du monde. Seul dans sa chambre d’hôtel, comme on se livre aux plaisirs honteux, il pourrait fixer du regard, détailler, déchiffrer ; il pourrait rêver. Leçon numéro sept : tu es un homme. N’en doute jamais. Et ne laisse personne en douter. L’Esprit est là, en toi, et quoi que l’on inflige au corps, tu es l’Esprit.



Theatrum mundi...

Pour terminer...


Pseudonyme : Voodoo V.
Âge : La petite trentaine.
D'où nous venez-vous ? D’une longue et aride période sans écriture.
Quelque chose à nous dire ? Je suis ravi de vous rencontrer.


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Pierrot Lunaire
La bouche clownesque ensorcèle comme un singulier géranium
Pierrot Lunaire

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MessageSujet: Re: Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir.   Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir. EmptyJeu 2 Mai - 21:19

Bien le bonjour Esprit, et (re)bienvenue parmi nous !
Voici un personnage très original, et qui impliquera pas mal de situations en RP inédites ! Vu ce que tu as décrit dans le test RP, je suppose que tu as bien conscience que cela impliquera un rapport assez particulier avec la plupart des autres personnages, je ne m'attarderai donc pas sur le sujet. En outre, j'ai peu de choses à redire sur cette fiche aussi bien écrite que bien construite.

Comme je suis un peu pinailleur, cependant, je me permets de relever deux-trois points qui m'ont interpelé. Cela n'implique pas forcément des corrections, d'ailleurs, c'est plutôt pour être sûr que tout est bon pour ne pas avoir à t'embêter en jeu.

C'est surtout la maîtrise de deux langues européennes et celle de la lecture qui m'interpellent en fait : comment Esprit a-t-il pu bénéficier d'une si bonne éducation (presque meilleure que celle des gens issus des classes populaires, mine de rien) ?
Je me demandais également d'où venaient les parents du gamin et notamment le père. Puisqu'Esprit dit être français, son père vient donc des colonies, j'imagine ? S'il est soldat, il devrait faire partie du corps des tirailleurs sénégalais (qui ne sont pas forcément sénégalais), j'imagine ?

Ce ne sont pas des questions pièges, d'autant plus que ce ne sont pas des sujets dont je suis spécialiste : je souhaite juste m'assurer qu'il n'y a pas de failles dans la fiche qui éclateraient en jeu (c'est dangereux, les failles). Dans tous les cas, ces points de détail éclaircis, je me ferai un plaisir de te valider. Very Happy

Mais en attendant, tu peux dès lors chercher un employeur en jeu afin de gagner du temps (à moins que tu ne préfères PNJiser le maître d'Esprit, les deux sont possibles).

A très bientôt j'espère, et encore bravo pour cette fiche magnifique !
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MessageSujet: Re: Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir.   Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir. EmptyJeu 2 Mai - 21:48

C'est un rôle trop important pour que je ne le confie pas au hasard. ^^ Je chercherai donc un maître parmi les occupants actuels de votre univers.

J'ai bien trouvé étrange de ne pas avoir à relater par le menu la chronologie de mon histoire, mais je me suis plié à la coutume ; cela dit, il est évident que certains points ne sont pas abordés, puisque même au cours d'un long voyage en train peuplé de rêveries, tous les souvenirs d'une personne ne sauraient remonter en surface Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir. 3129058188

Le jeune homme et son père voyageaient surtout à travers les Alpes pour présenter leur petit spectacle, aussi ont-ils appris l'italien, que le plus ancien des deux baragouinait déjà après son passage à l'armée ; mais je précise que c'est une connaissance phonétique, le petit n'a pas eu l'occasion d'être employé là-bas ; il le parle donc, sans grande diversité de vocabulaire cela dit, et pourrait peut-être lire l'Arioste, mais avec effort et sans grand plaisir. (L'autre langue étant le français, qu'il parle parce qu'il est français.)

La lecture : élevé par l'employeuse de sa mère, il en a reçu les premières bases, dans l'intention d'en faire une courtisane policée, une "escort" cultivée, comme on dirait de nos jours. Naturellement, il a par la suite rejoint le vagabondage de son père et dès lors, c'est lui qui servait de secrétaire, déchiffrant les directions, les cartes ou les avis de recherche en cas de pépin, rédigeant des affiches pour annoncer leur présence lorsqu'ils pouvaient se le permettre, signant les procès-verbaux lors d'accords avec les municipalités...

Mais l'essor de cette habitude s'est réellement produit lorsqu'il est entré chez sa première famille bourgeoise, et a été invité à piocher dans la bibliothèque. Les gravures étaient d'abord ce qui l'intriguait le plus, et la beauté de l'objet, mais ces portes d'entrée ont été suffisantes pour que tout son esprit s'y engouffre. Dès lors, il est devenu un dévoreur de feuilletons. Doté d'une bonne mémoire photographique, les orthographes et les tournures qu'il a mémorisées se retrouvent dans sa façon de parler, et dans sa façon d'écrire ; sa syntaxe est meilleure que sa calligraphie, quant à elle peu pratiquée. (En italien, ce serait sans doute un désastre.)

Pour ce qui est des origines ethniques de son père, c'était un griot Yoruba ; mais cela n'a pas joué un grand rôle dans leurs rapports ou dans la conception actuelle que s'en fait Saint-Thelme. N'hésitez pas si vous avez d'autres questions. ^^
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Pierrot Lunaire
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MessageSujet: Re: Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir.   Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir. EmptyJeu 2 Mai - 22:20

C'est vrai que nous avons décidé de faire l'impasse sur l'histoire, et je dois même dire que certains personnages sont apparus sans avoir d'histoire définie (celle-ci s'est construite au fur et à mesure en jeu). D'autres, au contraire, avaient un fond très développé. Le test RP rend les deux approches possibles. En fait, le but non avoué de l'entreprise est d'éviter les très longues histoires de personnages qui ont tout vécu et sont en quelque sorte "figés" par tout ce qu'ils ont déjà traversé, sans réelle évolution possible en jeu. J'ai rencontré dans mon parcours beaucoup de joueurs qui réalisaient une mini-nouvelle très bien pour présenter leur personnage, retracer toutes les étapes de sa vie, mais qui le jouaient finalement peu en jeu car ils avaient déjà "tout écrit". Ce n'est qu'un cas parmi plein d'approches, cela dit, mais c'est pour éviter ça qu'aux débuts du forum, j'avais choisi l'option du texte libre (et parce que je suis nul en histoires, accessoirement).

Dans tous les cas, je ne te fais pas patienter plus longtemps, et te valide. 50 points de Mondanité (pour la curiosité... c'est autant qu'une employée de maison très bien vue) et autant d'Infamie (je te contacterai possiblement en privé à ce sujet d'ici quelques temps Wink) te conviendraient ? En tout cas, tu peux dès lors créer ton fichier d'évolution du personnage, te chercher un RP. Il me semble qu'il reste un numéro à prendre à la tombola dans la section Jeux et concours si les jeux de hasard t"intéressent. J'espère que tu te plairas parmi nous ! Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir. 2483377738

(et je me permets, si tu n'y vois pas d'inconvénients, de te tutoyer, comme tu peux me tutoyer aussi. x))
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MessageSujet: Re: Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir.   Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir. EmptyJeu 2 Mai - 23:09

Merci pour cet accueil ^^ Il y a peu de chances qu'un Pierrot, Lunaire de surcroît, m'emploie à son service ; nous pouvons donc effectivement nous tutoyer. Cool Je vais poster ma fiche d'évolution dès à présent.
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MessageSujet: Re: Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir.   Saint-Thelme, à renommer selon votre bon plaisir. Empty

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