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 Revue de presse n°3

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Pierrot Lunaire
La bouche clownesque ensorcèle comme un singulier géranium
Pierrot Lunaire

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MessageSujet: Revue de presse n°3   Revue de presse n°3 EmptyMar 10 Jan - 12:21

Revue de presse - Fin du mois de février 1896



UN DISCOURS ÉDIFIANT
    Hier le président Félix Faure s'est rendu à l'Eden-Théâtre pour l'inaugurer en grande pompe. Personne n'ignore la portée symbolique d'un tel geste. Après un temps de recueillement nécessaire, laissé aux invités, M. Félix Faure a prononcé un discours des plus édifiants, destiné à resserrer les liens par trop ténus entre les français. Ebranlée par ce drame, la République se relèvera plus forte, comme confirmée dans sa puissance. Les applaudissements furent nombreux et témoignèrent bien de l'émotion de la foule ... A l'intérieur du théâtre, eut lieu une cérémonie pour les initiés, dont la recension reviendra aux gazettes mondaines.

Le Grand Journal, 22 février 1896

~ * ~

NOUVELLE A LA MAIN

Dialogue fin de siècle :

Le poète décadent : Vous êtes exquise ... On vous aimerait ... Oh ! combien !
La jeune personne : Cinq louis !


~ * ~

FAITS DIVERS
Une lettre enflammée


Revue de presse n°3 Fait_d10



    Le nom de Jules Jaluzot ne vous est pas inconnu, surtout si vous avez une femme ou une maîtresse. Toutes sont des clientes fidèles et assidues de son grand magasin, le Printemps. Cet homme d'affaires a su gagner les cœurs et prospérer malgré les multiples embûches rencontrées.

    Il faut espérer que sa bonne étoile le guide encore. Ce matin Monsieur Jaluzot consultait le fruit de son travail et son courrier, comme tout homme certain de sa fortune. Une enveloppe parfumée, cachetée avec grâce, lui fit entrevoir une missive distrayante et galante. Sûrement une de ses clientes qui osait toucher deux mots au maître des lieux, voulant connaître l'homme derrière le masque.

    Mais la lettre était des plus enflammées. Ne voilà-t-il pas qu'en l'ouvrant, celle-ci explose à la figure de Jaluzot ! La panique est totale dans le bureau, les associés se précipitent, mandent un médecin. A ce jour les jours de Monsieur Jaluzot ne sont pas en danger. L'homme n'a écopé que de quelques éraflures au visage et aux mains, ainsi que de brûlures.

    Quant au contenu de la lettre, nous ne pouvons nous réfuter qu'à des rumeurs (la police ayant saisi l'objet du délit afin d'analyser le produit explosif utilisé et retrouver le coupable). La plus rocambolesque reste celle d'une amante de Jaluzot, furieuse de s'être laissée éconduite. Après tout nous avons eu déjà des preuves de vengeance féminine, tout aussi astucieuses.

    Espérons que Monsieur Jaluzot reprendra au plus vite ses fonctions. Et conseillons à nos lecteurs de faire ouvrir le courrier de leurs amantes par un serviteur – afin d'éviter les mêmes dommages que notre homme.


Une famille empoisonnée

    Après les moules, les langoustes, les écrevisses, voici maintenant la charcuterie empoisonnée.
    La famille H..., qui habite dans le quartier Rochechouart, avait acheté samdi pour le repas du soir une assiette de charcuterie "assortie". Celle-ci, hélas ! était aussi avariée que variée. Sur huit personnes dont se compose la famille, cinq mangèrent le saucisson, je jambon, le veau froid et la tranche de galantine qui formaient "l'entrée assortie".
    Dans la nuit, ceux qui avaient touché à la charcuterie se réveillèrent en proie à d'atroces douleurs. Les trois valides leur prodiguèrent des soins mais les souffrances, loin se calmer, s'exaspérant, on dut appeler un médecin. Celui-ci reconnut bientôt les signes de l'empoisonnement et administra des réactifs énergiques. Ainsi les effets du poison furent atténués. Les malades sont maintenant hors de danger.
    Mais le chef de famille a déposé contre le marchand de comestibles qui avait livré la charcuterie avariée une plainte entre les mains de M. Benezech, commissaire de police du quartier. Le magistrait a fait saisir ce qui restait de "l'assiette assortie" et l'a envoyé au Laboratoire municipal. Procès-verbal ne sera dressé qu'après le résultat de l'analyse.


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Dernière édition par Pierrot Lunaire le Mar 10 Jan - 12:28, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Revue de presse n°3   Revue de presse n°3 EmptyMar 10 Jan - 12:24

COUP DE CLOCHE
Courrier des lecteurs
    Il nous est apparu qu'en ces temps où le lecteur a changé de visage, il était nécessaire d'ouvrir nos colonnes à la parole publique. Nous nous engagons à publier vos avis, vos idées intéressantes ou vos réclamations. Vous deviendrez ainsi nos nouveaux collaborateurs.
    Adressez vos missives à l'Administrateur du journal, ** rue *********, PARIS.


~ * ~

SUR LES PLANCHES
Chronique des spectacles, cabarets, concerts


Plaidoyer pour la pantomime anglaise

    La pantomime est un art plus délicat qu'on ne le pense, et bien rare sont les femmes qui savent imprimer à leur geste la tendre intelligence des choses ineffables. Il nous semble qu'en ses débuts naïfs, miss Jane McCillian est de celles-là. Ses origines nous faisaient attendre une de ces acrobates nasillardes, dont on rêve outre-Manche ; une de ces - admirables, certes - artistes de cirque, trapézistes et jongleuses, presque masculines dans leurs manières, et trop rudes à la tâche pour inviter au rêve. Miss McCillian, au contraire, a une silhouette diaphane et diaprée, ses gestes sont spirituels, légers et doux - sans accrocs ni ruptures. On s'étonne qu'elle n'ait pas encore attiré les vers des poètes symbolistes, à l'instar de la Loïe Fuller.

    On la retrouve, pour l'heure, dans Colombine trahie, pièce de Jules Hibois, et elle y est renversante. Face aux farcesques attitudes du Pierrot, à la goujaterie populaire de l'Arlequin, sous les crincrins des violons de son petit théâtre, elle a des regards doux qui confinent au tragique. Sont-ce ses yeux qui ont gardé pour trace les brumes de la vieille Angleterre ? Toujours est-il que nous espérons bien la retrouver sur de plus grandes scènes, pour y mettre à l'épreuve ce bout de talent qu'elle semble avoir en elle.
Octave Mirot, La Revue mauve, 25 février 1896.


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