Pierrot LunaireLa bouche clownesque ensorcèle comme un singulier géranium
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| Sujet: Revue de presse n°2 Mer 19 Oct - 9:23 | |
| Revue de presse - Fin du mois de février 1896
LA RÉOUVERTURE DE L’ÉDEN-THÉÂTRE DEVIENT UNE CÉRÉMONIE OFFICIELLE Ainsi que l'attestaient les rumeurs, M. le président Félix Faure se rendra bien en personne à la réception de réouverture de l'Eden-Théâtre. Ainsi, après de menus aménagements, la salle accueillera de nouveau la vie artistique et mondaine. L'ouverture n'est pas pour autant placée sous le signe de la légèreté ou de l'allégresse : la cérémonie a été organisée dans le seul but d'honorer et de commémorer les victimes de l'attentat du 8 février. Cela commencera par un discours de M. Félix Faure, devant le théâtre - à quelque pas du Palais Garnier, qui sera dans toutes les mémoires. Il est certain que tous les citoyens de Paris désireux d'entendre le président sur cette affaire se trouveront une place, aux fenêtres, sur les parterres, sur la route - la voie sera par ailleurs bloquée aux premières heures du jour, afin d'éviter les encombrements de voiture. Après ce discours, un buffet offert gracieusement par la famille de Lambresac attendra les familles des victimes : quelques tables seront disposées au dehors, pour les citoyens venus assister au discours sans être conviés à la réception.
A l'intérieur, c'est tout un programme également : le buffet terminé, le public s'acheminera doucement vers une salle de spectacle flambant neuve, en apparence, où se déroulera le plus étrange des récitals. Le spectacle interrompu par l'explosion reprendra son cours, mais les costumes seront remplacés par de grandes toges noires, en une mise en scène que certains qualifieront de macabre et que d'autres applaudiront des deux mains. Une occasion entre toutes d'entendre le morceau de bravoure de Mlle Bellis, qui avait eu la chance d'être hors de scène lorsque le drame arriva.
La soirée devrait se terminer tôt pour le commun des mortels : textes déclamés, morceau d'opéra interrompu ne constituent point un spectacle dans les formes. Parallèlement, les citoyens ayant souhaité assister au discours sont priés de ne pas s'attarder dans les rues attenantes au théâtre, une fois que la soirée aura fini son cours - simple question de précaution.
Les fonds réunis grâce aux dons des spectateurs seront mis à profit dans l'enquête criminelle visant à retrouver le ou les coupables de l'attentat du Palais Garnier. Le Grand Journal, 21 février 1896 ~ * ~
M. FÉLIX FAURE FAIT FI DU DEUIL NATIONAL En ce samedi 22 février, deux semaines à peine après la catastrophe, l'Eden-Théâtre rouvrira ses portes. C'est M. Félix Faure qui en a voulu ainsi, dans le but, dit-il, de "faire oublier au bon citoyen de Paris des horreurs qu'il n'eût point dû connaître". L'on condamnera non seulement l'imprudence de ces paroles, qui peuvent sonner comme une provocation voire une invitation à renouveler le désastre du 8 février, mais également la légèreté de cette décision. Le deuil national, très vite institué, ne durerait-il que deux semaines ? La vie élégante et mondaine est-elle si importante pour que l'on oublie si vite les victimes de l'attentat ? Bien entendu, une cérémonie en grande pompe visera à leur "rendre hommage", mais dans quel autre but que celui de noyer les protestations et de reprendre au plus vite les frivolités interrompues par l'explosion ? Nous inviterons notre président à un peu plus de prudence à l'avenir, et ce n'est pas parce que l'on place un spectacle sous le signe du deuil que l'on peut s'y rendre en gardant la décence et la réserve nécessaires à cet état. Nous déplorerons encore longtemps, semble-t-il, la vitesse oublieuse de notre époque moderne ! L'Intransigeant, 22 février 1896. ~ * ~ FAITS DIVERS La Boisson de la défaite ! La preuve du manque de sérieux des jockeys s'est une nouvelle fois faite lors d'un incident survenu hier soir près de l'hippodrome d'Auteuil. Jean Bourzig, l'un des participants de la course qui avait lieu peu avant l'incident, a mal digéré sa défaite écrasante et les railleries du public à son égard. En effet, ce dernier est tombé sur le sol boueux quelques mètres après la ligne de départ, sous les rires et les hués de la foule. A sa sortie du terrain, il s'est précipité pour boire plus que de raison dans un bar attenant à l'endroit. Lorsqu'il en est sorti, il a tout de suite vu la voiture d'un homme venu là pour assister au spectacle. Il est alors monté sur le dos du cheval pour, d'après les témoins, "prouver au monde qui [il est]". L'équidé ne l'a pas entendu de cette manière et s'est emballé dans les rues de Paris. Une chance pour l'idiot, il est tombé rapidement dans une fontaine, avant que le fiacre fou ne prenne des escaliers, poursuivit par la maréchaussée. L'engin sera arrêté quelques minutes plus tard, la voiture en miette, sans n'avoir fait -un miracle- aucune victime. Le perturbateur a été rapidement maîtrisé et se trouve actuellement en examen pour perturbation de l'ordre public, destruction de bien privé et mise en danger d'autrui.
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HORS-JEU : Le fait divers a été rédigé par Cyrille Carpentier !
Dernière édition par Pierrot Lunaire le Mer 19 Oct - 9:31, édité 1 fois |
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Pierrot LunaireLa bouche clownesque ensorcèle comme un singulier géranium
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| Sujet: Re: Revue de presse n°2 Mer 19 Oct - 9:31 | |
| COUP DE CLOCHE Courrier des lecteurs Il nous est apparu qu'en ces temps où le lecteur a changé de visage, il était nécessaire d'ouvrir nos colonnes à la parole publique. Nous nous engagons à publier vos avis, vos idées intéressantes ou vos réclamations. Vous deviendrez ainsi nos nouveaux collaborateurs. Adressez vos missives à l'Administrateur du journal, ** rue *********, PARIS.
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SUR LES PLANCHES Chronique des spectacles, cabarets, concerts Le soir du 17 février, l'on remarqua sur la scène des Funambules, une actrice encore méconnue du public, mais qui pourrait faire son chemin. Melle Sibylle Taillefer a la taille bien plus souple que ne le laisse présager son patronyme. Elle interpréta son rôle avec conviction et si l'on décèle encore bien des maladresses dans son jeu, fruits de son inexpérience, son visage se prête bien aux expressions de l'art. Avec ses pommettes fines, son oeil vif et sa toison rousse, elle figurerait sans démériter aux côtés des héroïnes de Wagner ou de Maeterlinck. Espérons à présent que la demoiselle a une voix, sous ce joli visage, et qu'elle apprendra la suave grâce des symbolistes expressions. La Revue mauve, 18 février 1896. ~ * ~ PUBLICITÉS
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Les "Coups de cloche" sont inspirés de la démarche de La Presse initiée au mois d'août 1896. Les publicités sont tirées de La Presse, 28 août 1896
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