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 Au Paradis, on parle de c'qu'on veut tant qu'on paye son verre !

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Pierrot Lunaire
La bouche clownesque ensorcèle comme un singulier géranium
Pierrot Lunaire

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Au Paradis, on parle de c'qu'on veut tant qu'on paye son verre !  Empty
MessageSujet: Au Paradis, on parle de c'qu'on veut tant qu'on paye son verre !    Au Paradis, on parle de c'qu'on veut tant qu'on paye son verre !  EmptyLun 5 Déc - 12:55

Au Paradis, on parle de c'qu'on veut tant qu'on paye son verre !  Boheme10
Zoran court la Ville selon la fantaisie des contrats et le bon-vouloir des oreilles parisiennes. Habitué des brasseries d'étudiants, des bals et des cabarets, il a parfois des contrats plus inhabituels ... Et aussi plus étranges. Ce soir-là, un petit bar obscur, Le Paradis du Douzième l'a mandé et, seul violoneux en gilet rouge, il y joue du crin avec le reste de conviction qu'il conservait encore. C'est que son art serait employé à mauvais escient ici, c'était à craindre !

Dans le café, presque désert, un petit groupe d'hommes, d'âge et d'origine diverses, parle de choses importantes. Leurs discours, étouffées par le crin-crin du violon tzigane, parviennent à peine à ses oreilles, et l'argot des faubourgs qu'ils utilisent n'aide en rien à la compréhension. Cependant, pour avoir traîné dans les cafés parisiens depuis dix ans déjà, il maîtrise assez le français pour en comprendre les grandes lignes.
Alors, mû par la curiosité, il s'approche de la table d'un pas de gigue, sous les accents plaintifs des airs venus de l'Est. Là, l’œil rivé sur les convives, comme un bon violoneux de fête, le sourire vague des idiots du village qu'on paie à faire les pitres, il observe et il écoute ... Ils sont cinq : deux jeunes gens aux cols assez blanc, une petite silhouette fine au sourire d'escarpe, un homme baraqué à l'air un peu sombre et un vieillard un peu déplumé qui semble s'éloigner, peu à peu, de la conversation. Zoran le considère, ce vieillard, et fait durer un peu plus le regard : il le connaît, ce colporteur, autant que gens de rue et saltimbanques peuvent se connaître, croisant les mêmes personnages, traînant sur les mêmes trottoirs ... Il recule d'un pas, joue avec plus de conviction - écoute avec plus d'attention. Il est question de renversement d'ordre établi, d' "action directe" ; il est question de reprise individuelle, de justice à rétablir ... Il ne comprend pas tout, Zoran, mais au fil de la conversation, il considère ces gens avec un début de méfiance ... Ne serait-ce pas de ces trublions qui ont voulu faire trembler tout Paris et qui, par là, avaient attiré de nouveau l'intention sur les étrangers, les juifs, les gens de son peuple ... ? La belle affaire ! Alors qu'il vague ainsi à ses pensées, il remarque cependant que le patron s'avance et, le regardant d'un mauvais œil, il va chuchoter quelque chose à l'oreille d'un des convives de ce curieux banquet. Trop concentré sur autre chose, une fausse note sort du violon séculaire ...

Alors on le considère, on lève un sourcil, on fait la moue ... Soudain, l'un des hommes prétexte l'heure tardive, l'autre le boulot du lendemain. Les grandes idées résonnent encore un peu dans les souvenirs et puis ... Tombent à plat : la curiosité déplacée du violoneux, chargé malgré lui de rendre inaudible les discours, a empêché de passer aux choses sérieuses. Le petit groupe paie les consommations, se disperse un peu et Zoran continue, inlassablement sa litanie. Là est la meilleure des prudences : si le silence est d'argent, la musique est d'or.

Au bout d'un moment, après cette réunion manquée, il ne reste plus que le vieux déplumé, qui s'apprête à partir, et l'homme à la mine sombre qui n'a pas bougé.
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http://locution-des-pierrots.blogspot.com
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MessageSujet: Re: Au Paradis, on parle de c'qu'on veut tant qu'on paye son verre !    Au Paradis, on parle de c'qu'on veut tant qu'on paye son verre !  EmptyMar 6 Déc - 20:42

Je pus enfin me lever. Tout ce temps à rester immobile et seulement parler alors que pendant ce temps le peuple lui souffrait sous la botte de la bourgeoisie. Quelle honte ! Sans parler du lieu de la réunion. Un de ces endroits où l'on endort le prolétaire par le biais de l'alcool. Hélas le choix manquait à cause de l'oppression poliçière à notre égard.

Seulement moi je voulais réelement participer à la lutte comme les auteurs de l'attentat contre le théâtre, pas me contenter d'abattre quelques parasites au sang bleu.

Seulement ce n'était pas avec mon simple révolver que je pouvais aller plus loin. C'est pourquoi il me fallait des alliés et que je m'étais rendu à cette réunion de soit-disants anarchistes. Un vrai révolutionnaire ne parle pas, il agit.

Mon regard se porta sur le seul autre encore présent. Lui il me semblait différent. Et je ne me gênais pas pour lui dire. Après tout nous étions tous les deux frères de misère. Les mondanités c'était bon pour les riches si désireux de cacher leurs sentiments.

"Tu n'es pas comme ces révolutionnaires de salon. Tu sais à quel point le changement est nécessaire, n'est-ce pas ?" Commençais-je à lui dire avant de me raviser.

Non pas que je ne croyais pas à la sincérité de cet homme, simplement il fallait voir à quel point il avait ouvert les yeux et où était-il prêt à aller.

Sur un plan plus technique, ce vieux colporteur pouvait m'être utile. Sa profession faisait de lui les yeux et les oreilles de Paris. Et qui sait il était peut-être capable de me procurer certains articles illicites nécessaires pour ma lutte.
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