Nous flânâmes dans les rues un moment. Je formais un plan de Paris dans ma tête –un plan lamentable, il fallait dire- tentant de me souvenirs des mots de l’homme sur le bord des quais. Il ne semblait pas avoir parlé au hasard, mais pour parcourir très peu la cité, il fallait avouer que tout était un peu flou dans mon esprit. Je pris une pause de marche, le temps de poser un genou par terre et de tirer mon bambin pour lui replacer son écharpe quand, au milieu de mon geste, je m’arrêtai, levant les yeux vers ceux presqu’identique de Snowden. « Oh ! Elske, je crois que j’ai trouvé ! » Il haussa les épaules, et me laissant enchainer. « C’est vers l’hôtel de ville…! » Un jour, Marie-Gilbert remarqua mes lacunes horripilantes envers tout ce qui était français et m’avait fait un petit compte-rendu de quelques petites choses qui, maintenant, s’avérait fort utile. Moi qui croyait pouvoir survivre en me limitant aux vins et à la révolution française…

Prenant soin de garder mon –petit bébé- Snowden au chaud, lui replaçant une nouvelle fois ses moufles et m’assurant que ses bottines étaient bien nouées, nous repartîmes vers le lieu en question. L’enfant, semblant reconnaitre la silhouette lui étant rentrée dedans plus tôt, glissa derrière moi pour prendre mon autre main. « Maintenant, we’re still looking for le trésor ? » J’opinai, baissant la tête vers lui. « Honey aurait... pouvoir être usefull, he aime jouer hide and seek. » Je lui souris, lui répondant doucement « C’est Honey que nous aurions dû chercher, surtout. » Je regardai autour de nous et l’enfant en fit de même, nous tentâmes de trouver par où nous pourrions commencer.

L’après-midi s’éternisait. Lise commençait à se fatiguer et à sentir le froid s’infiltrer sous ses vêtements… Autour d’elle, l’agitation lui paraissait fébrile et vaine. Elle frissonna, bâilla, décida de rentrer. Par acquis de conscience, elle fit une nouvelle fois le tour de la place, les yeux baissés sur les soupiraux. Elle avait l’impression d’avoir déjà inspecté cent fois chaque grille. Pourtant, au bas d’une maison bourgeoise, son regard glissa sur un trou entre deux pierres qu’elle n’avait pas remarqué auparavant. Sans trop y croire, elle approcha la main et… Tiens, c’était curieux, on sentait quelque chose au fond. Un peu hésitante – sur quoi pouvait-on tomber d’absolument répugnant ? –, elle enfonça un peu plus les doigts et tira doucement sur la chose pour l’amener à la lumière du jour. Un cadavre de rat ? Un trognon de pomme ? Un torchon sale ? Un détritus quelconque ?

Spoiler:

Nous marchâmes lentement, profitant de la fraicheur de février tout en regardant les alentours. Sortir en après-midi en me promenant avec mon fils avait quelque chose de réellement apaisant et, la température étant agréable, c’en était presqu’amusant de chercher. C’était comme participer à l’un des milles jeux que mes enfants créaient et, parmi leurs préférés, il y avait, bien sûr, la chasse au trésor –ou au petit frère, dépendant de l’endroit. Ouvrant la marche, Snowden trottait devant moi, me pointant tel édifice, ou parfois me murmurant quelques mots à propos de telle passante, puis… Il trébucha. Son petit pied se coinça entre deux pierres du pavés et il chuta sur son côté.

Je le rejoins rapidement. Il semblait décidé à rester au sol jusqu’à ce que je m’approche pour le prendre sous les bras pour le relever. Je remarquai, au passage, un bout de papier entre les joints. « Oh, Snowden, peux-tu prendre ça… juste là. » Je lui pointai, alors que j’époussetais son manteau et replaçait son chapeau, et il alla chercher la gravure avec ses petits doigts. Il me la tendit et je l’observai quelques secondes. Sans doute s’agissait-il du prochain indice, mais je me sentis rapidement vaincue. « Meg heart, qu’est-ce que cela t’évoque ? » Il prit le papier et le regarda attentivement, je voyais, dans son regard profond, qu’il faisait marcher sa mémoire enfantine. Puis il me regarda, un peu en sautillant. « Jeg vite ! Jeg vite ! » Je souris, et laissai le bambin me confier ses conclusions, et nous prirent une marche jusqu’à ce lieu mystère.

Spoiler:

Comme d'habitude, Céleste était en galère. Elle avait perdu sa dernière place pour avoir dit à la baronne de *** qu'avec ses dentelles à n'en plus finir, elle ressemblait à une grosse dinde enrubannée pour la Noël, et on lui avait donné ses quatre jours. Quand la placeuse l'avait vue rappliquer, elle avait froncé les sourcils, mais Céleste n'y pouvait rien ... Est-ce que c'était d'sa faute si tous les bourgeois étaient ridicules et stupides ... ? C'était juste une injustice sociale de plus : elle, elle prenait parce qu'elle savait pas rester hypocrite longtemps. Cependant, Céleste avait du mal à trouver un nouvel emploi, et l'argent venait à manquer. Aussi accueillit-elle la nouvelle d'une chasse au trésor avec grand enthousiasme ! Surtout qu'elle connaissait un cocher b'en gentil, Roger-Robert, qui lui avait promis de l'aider à décrypter les codes. Pas intéressé pour deux sous, ce gars-là, il voulait même pas partager la somme, suffisait que Céleste veuille bien l'aimer un peu ... Une crème, c't'homme-là ! Et son nom était d'un chic ! C'est après une nuit passée à décrypter le code que Céleste se retrouva sur la place de l'Hôtel de ville, sans bien comprendre - Roger-Robert lui avait offert un peu trop de vin la nuit dernière - si elle était au bon endroit ou non. Elle cherchait un peu partout, les yeux collés aux pavés, mais ne trouvait rien. Elle s'exclama avec humeur, à l'attention d'un pauvre hère qui semblait dans la même situation qu'elle :

Citation :

Baptisé d’eau de morue (Virmaître, 1894): Ne pas avoir de chance. Homme ou femme à qui rien ne peut réussir. Ce qui équivaut à deveine salée, par allusion à l’eau dans laquelle la morue a été dessalée (Argot du peuple). N.