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| Catharina de FréneuseL'enfant reconnaît sa mère à son sourire.
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| Sujet: Froide et cruelle Lun 15 Avr - 11:28 | |
| Catharina ne pouvait nier que le retour du beau temps sur Paris l’attristait plus que de raisons. Pour ne pas oublier les douceurs de l’hiver, la jeune mère décida d’aller toucher un peu de glace. Malheureusement, elle ne pouvait s’y rendre seule, la casanière reprendrait rapidement le dessus et son mari refusait obstinément de patiner que sur un pied. La norvégienne arracha donc ses ainés à leurs études, jugeant qu’ils avaient assez étudié.
Ayant fui la maison sans gouvernante, elle avait chaussé elle-même les petits patins. Ils n’en étaient pas à leur première glisse et si Snowden préférait rester accroché à sa mère, Gardenia faisait de larges cercles autour d’eux. Elle était difficile à suivre et Catharina ne cessait de la rappeler. Cependant, l’enfant avait le caractère déchainé de son père et n’en faisait qu’à sa tête. Au moins, elle n’embêtait personne… « Mor ! Denia parle à un monsieur ! » La pauvre mère soupire, cachant son désespoir derrière sa main gantée. Elle vint pour héler l’insolente mais celle-ci revint d’elle-même, narquoise, pour raconter à quel point que le monsieur, là-bas, il ne savait pas patiner. Je la retins par le manteau et la réprimandai. La mauvaise attitude de Gardenia me décourageait : Elle était si brillante ! Ne pouvait-elle pas contrôler son comportement un peu ? Je fus fortement mal à l’aise lorsque l’homme vint me faire part de cet horrible affront, glissant une remarque qui était loin de me faire plaisir.
Quelques jours, une semaine ou deux plus tard, je revins à la patinoire. J’avais proposé à mon cher et tendre de le pousser sur une chaise sur la patinoire, mais il déclina l’offre à nouveau. J’y retournai donc avec mes enfants. Gardenia aurait du demeurer à la maison, mais elle avait été sage depuis, plutôt calme, alors je l’amenai pour s’amuser avec son frère. Un peu plus confiant, Snowden lâcha finalement ma main et alla faire des tours avec sa sœur –en prenant soin de rester tout près, bien sûr !
La fillette s’approcha de son ainé, maligne, pour discuter du monsieur de la dernière fois qui s’apprêtait à entrer sur la patinoire.
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| | | Dominique LebrunÊtre homme ? tu le peux. Va-t'en, guêtré de cuir
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Mer 17 Avr - 10:10 | |
| Il prenait bien soin de se vêtir de son grand manteau d'officier à chaque fois – pour ne pas trop exhiber l'uniforme – et surtout de venir à l'heure la plus matinale possible – pour croiser le moins de monde. C'est que le colonel avait parfaitement conscience du ridicule de sa situation lorsqu'il se trouvait patin au pied : aussi gauche qu'un conscrit sorti de sa charrue quand on le mettait en présence d'un cheval. Mais quoi ! la nouveauté d'abord, le désir de briller en société ensuite l'avait poussé à apprivoiser ce milieu peu naturel qu'était la glace. Et depuis peu – depuis que les progrès s'étaient faits sentir en fait – le plaisir avait pris une part non négligeable dans cette activité. Mais si le colonel Lebrun avait acquis les bases de la glisse, il était encore loin d'avoir l'aisance des virevoltantes patineuses.
Ce jour-là, il ne dérogeait pas à la règle, enveloppé dans son large manteau – officiellement pour se protéger du froid. De bonne humeur, guilleret même, il s'approchait de la piste en chantonnant, englobant d'un regard les rares patineurs présents quand tout d'un coup... Était-il seulement possible que cette chipie soit là ? A cette heure où les enfants sont à l'étude, elle était là, faisant des messes basses à son frère. C'était elle, la gamine de l'autre fois qui s'était si vertement moqué de lui. Elle. Ici. Encore. Dominique sentit un très bref instant son enthousiasme vaciller : son ego supporterait-il une nouvelle fois les assauts de la moqueuse ? *Tout ceci est ridicule* pensa-t-il. Ce n'était qu'une enfant ; impertinente certes, mais une enfant. Il n'allait pas battre en retraite devant une enfant ! Mobilisant toute son énergie, il avança un pied sur la glace, bravant l'ennemi, et d'un coup de patin qu'il aurait voulu plus assuré, il entama la charge.
Décidément les leçons portaient leurs fruits. Il arriva près de la mère sans encombre, ralentit son allure déjà peu rapide, voulut freiner, manqua tomber, se ressaisit, rassembla une partie de sa dignité qui menaçait de se débander, prit garde à ne pas prêter attention aux deux petits témoins légèrement éloignés, et finalement se raidit pour saluer la dame.
« Madame. Madame, si vous me le permettez, j'aimerai m'excuser pour notre dernière rencontre. La vivacité de ma réaction était sans propos avec l’événement. »
Dominique avait en effet eu des paroles peu aimables pour la dame : le fond était pensé mais la forme avait manqué.
« Je crois même que je ne m'étais pas présenté, je suis impardonnable : colonel Dominique Lebrun. » Instinctivement, il voulut claquer des talons. La rambarde le sauva du ridicule d'une chute en lui procurant un appui. Ainsi stabilisé, il put alors saluer correctement et choisit de passer vite à autre chose, histoire de faire oublier cet épisode peu glorieux.
« Ne sous sommes-nous pas déjà rencontré auparavant ? Je veux dire, ailleurs que dans cet endroit...glissant ?»
Une telle pâleur, il était certain de l'avoir déjà vue. Au théâtre peut-être, ou chez la Forestière. Mais dans un autre contexte, c'était certain. |
| | | Catharina de FréneuseL'enfant reconnaît sa mère à son sourire.
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Jeu 18 Avr - 13:17 | |
| Snowden et Gardenia marmonnait ensemble, chuchotant des choses dans l’oreille de l’autre, en anglais. Dans ce monde français, c’était comme leur langage secret et s’ils se chamaillaient relativement souvent, ils n’en étaient pas moins très proches. Catharina les couvait, glissait derrière eux en les surveillant. Elle manqua de tomber à son tour lorsqu’on vint perdre son équilibre près d’elle. La jeune mère porta ses mains gantées à son visage, surprise et donna quelques coups de patins pour s’éloigner. La compagnie d’hommes ne lui allait toujours pas.
Elle entendit rire les enfants derrière elle. Catharina jaugea l’homme, celui qui avait émis de désagréables –mais véridiques- commentaires sur sa fille. Commentaires qui avaient été répétés à l’enfant en question mais qui ne semblaient pas avoir portés ses fruits. En guise de réponse, la norvégienne se contenta d’hocher poliment la tête. Elle trouva charmant qu’il vienne l’aborder pour proférer des excuses mais son orgueil de mère était toujours marquée et Catharina supportait mal que l’on parle en mal de ses enfants.
La jeune mère le regarda presque trébucher à nouveau et patina un peu pour s’éloigner. Une telle maladresse aurait pu l’amuser mais, Ciel ! il s’agissait d’un homme qui, pour la pauvre épouse, ne paraissait pas des plus gentils. Sa gaucherie éclipsa, pour le moment, la présentation que Catharina s’apprêta à faire en retour.
« Ce n’est pas impossible, Monsieur. » Répondit-elle, douce. Surtout que, depuis son mariage, elle paraissait beaucoup plus souvent dans le monde. Oh, elle était loin d’y sortir raisonnablement, mais le pas entre avant et maintenant était immense pour la casanière. La bourgeoisie parisienne nécessitait-elle vraiment une Princesse de Fréneuse ? Catharina se posait la question à chaque sortie ennuyeuse et déplaisante. Pour ne pas s’immobiliser sur ses patins, elle zigzaguait lentement, traçant sur la glace entre l’homme et ses enfants. Ceux-ci, à trop se disputer, finirent pas trébucher. Ils roulèrent un peu, gémirent de surprise. Leurs plaintes furent couvertes par des rires mais cela n’empêcha pas Catharina de les rejoindre et de les aider à se redresser, essuyant leur habit couvert de neige.
« Tu vois, mon cœur, même toi tu tombes. » Murmura la mère à l’intention de sa fille. Sa fierté venait d’être touchée. Dire qu’elle c’était moquée du monsieur l’autre jour ! Mécontente, elle tourna le dos à sa mère. Catharina ne releva pas et fis demi-tour pour s’adresser à l’homme « Ce n’était pas en compagnie de mes enfants que nous avons du nous croiser… » Petit sourire, alors qu’elle replaçait distraitement le col de Snowden.
- Spoiler:
Pardon, le post est long mais il sert tellement à rien D:
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| | | Dominique LebrunÊtre homme ? tu le peux. Va-t'en, guêtré de cuir
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Dim 21 Avr - 5:26 | |
| Dominique observait la jeune femme traçait des lignes tortueuses, mais élégantes. Sans doute était-elle peu à l'aise de lui parler. Elle semblait se tourner à chaque instant vers ses enfants, comme pour y chercher une raison d'être. Il était déjà étrange que des enfants bien nés se trouvent dans un tel endroit à une heure où tous leurs congénères devaient se pencher sur leur latin ou leur français ; mais que leur mère s'occupe d'eux personnellement, sans gouvernante pour cette sortie, ajoutait à la surprise du colonel. Mais ne lui avait-on pas déjà parlé des déboires d'une dame étrangère et au demeurant fort maman poule ? Qui donc lui en avait touché un mot ? La réflexion fut interrompue par la chute simultanée des deux bambins. Même si manifestement, ils n'avaient rien, la mère dévouée vola à leurs secours. Dominique n'entendit pas ce qu'elle chuchota à sa fille, mais cette dernière le prit visiblement mal, et partit bouder un peu plus loin.
« Ce n’était pas en compagnie de mes enfants que nous avons du nous croiser… » « Non, en effet je ne pense pas. Si j'avais eu l'honneur de croiser mademoiselle votre fille auparavant, le souvenir en aurait été impérissable. » Oui, il y avait une légère ironie dans la voix. Mais le colonel voulait sincèrement enterrer la hache de guerre. Pour l'instant, le personnage de cette jeune femme et le couple qu'elle formait avec ses enfants chéris étaient bien plus intriguant que les gamineries, certes vexantes et déplacées, de la petite. Abandonnant tout sarcasme, Dominique déballa un sourire sincère à son étrange interlocutrice. « En tous cas, je vous félicite Madame, vous avez de beaux enfants. Une fille... disons pleine de vie, et un fils qui promet une belle carrure ! Comment vous appelez-vous jeune homme ? »
Le garçonnet promettait réellement d'être bien tourné et le colonel ne pouvait s’empêcher de s'enquérir de l'identité des jeunes hommes bien faits. Réflexe pris dans la cavalerie, perpétuellement en quête de solides gaillards. Même si celui-ci était encore bien tendre. - Spoiler:
Il était fondamental puisqu'il sert à faire tomber ta peste fille. 1 partout, on fait la paix
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| | | Catharina de FréneuseL'enfant reconnaît sa mère à son sourire.
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Dim 21 Avr - 13:24 | |
| Gardenia Ainsworth restait majoritairement gravée dans les mémoires, malheureusement, pas pour les bonnes raisons. Catharina remarqua l’ironie mais décida de ne pas la relever et inclina la tête pour acquiescer. Comment oublier une fillette aussi maligne que la prunelle du Vicomte Ainsworth ? Mademoiselle la fille, toujours d’humeur boudeuse, s’éloigna pour aller faire des cercles sur la glace, espérant que son frère la suivrait… Ce qui ne fut pas le cas. Caressant les cheveux blonds de son fils, Catharina regarda la petite s’en aller.
Dominique se montra tout l’inverse de l’autre jour et fit un compliment sur les enfants. Catharina lui rendit son sourire, douce « Je vous remercie. » et poussa l’ainé qui s’enfonçait derrière sa mère. Ses grands yeux allèrent d’un adulte à l’autre, il s’inquiétait, se demandait intérieurement s’il avait le droit de parler. Un bref geste de la norvégienne lui fit comprendre qu’il devrait se présenter lui-même. « Snowden… Ainsworth, Monsieur. » Il ponctua ses mots d’un mouvement de tête poli et recula sur ses patins, intimidé. Ah ! La timidité chez les garçons était un bien vilain défaut, mais pouvait-on les pousser au-delà de leurs peurs sans en être affecté ? « Allez, elske, tu peux aller t’amuser avec ta sœur. » Il inclina une dernière fois la tête à l’homme et partit rejoindre sa jeune sœur.
Sa mère –trop protectrice, on ne le dira jamais assez- le regarda partir jusqu’à ce qu’il ne devienne plus qu’une tache embrouillée et releva les yeux vers Dominique. Ils descendirent, lentement, sur son manteau d’officier et s’arrêtèrent sur ses patins. Elle entrouvrit la bouche mais mis quelques secondes avant de parler. La timidité de Snowden ne venait pas de nulle part, après tout. « …Vous devriez… plier un peu plus les genoux… » Elle fronça les sourcils. « …Cela vous aiderait à patiner, je crois. »
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| | | Dominique LebrunÊtre homme ? tu le peux. Va-t'en, guêtré de cuir
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Mar 23 Avr - 4:43 | |
| Le garçon était loin, très loin, d'être aussi dégourdie que sa sœur. En même temps, si sa mère le lâchait un peu, peut-être serait-il moins timide ? Être aussi couvé pour un garçon, cela devait être terrible pour la confiance en soi, non ?
Les enfants partis glisser au loin, ils n'étaient plus que tous les deux. Et malheureusement pour Dominique, toute l'attention de la jeune femme se concentra sur ses patins. Là il avait atteint le comble du ridicule : se faire donner des cours par une jeune femme désœuvrée en manque de personne sur qui déverser sa bienveillance maternelle, les habituels objets de ses attentions ayant réussi à s'échapper pour quelques minutes. Bien conscient de la situation, le colonel n'éluda pas pour autant le conseil. Certes, on pouvait se moquer de cette femme très, trop ?, maternelle et la chose devait parfois être exaspérante ; mais elle était aussi douce, aimable et peut-être un peu perdue d'être dans un pays étranger. Et après quelques courbes de dessinées, elle se révélait être également de bon conseil.
« Effectivement, légèrement penché et les genoux un peu pliés, les choses sont mieux. Je vous remercie du conseil. Vous même patinez souvent madame Ainswo... »
La phrase resta en suspens sur les lèvres du colonel tandis que sa mémoire lui renvoyait d'anciennes conversations.
« Mais si mon cher, la vicomtesse Ainsworth ! Cette femme toute pâle venue d'un pays nordique dont j'ai oublié le nom, elle a épousé un Anglais et ils sont venus à Paris il y a quelques années ? Elle est toujours avec ses enfants, telle une poule et ses poussins, à se demander si ce sont les enfants qui ont besoin de leur mère ou l'inverse. Oui ? Ah, et bien figurez-vous... ils se sont séparés. Séparés ! Et je dis séparé pour ne pas l'accabler, vous comprenez, je ne suis pas ce genre de personne... Mais en fait, elle a demander le divorce ! Le divorce ! Quelle époque ! Je crois que moi, à sa place, je mourrais de honte... »
« Entre nous, je ne comprend pas cet homme. Le flegme anglais oui, mais tout de même ! On voit la moralité de la dame aujourd'hui. Moi je dis que ces rumeurs n'étaient peut-être pas toutes fausses. Vous ne saviez pas qu'il paraît que, comment dire... elle aurait eu quelque inclination hors mariage. Le charme français oui... mais tout de même ! »
« Ah mais vous ne connaissez pas toute l'histoire, cher Dominique. Je connais trèèès bien la dame en question, et je peux vous assurer que vous n'y êtes pas. Colonel, vous, un homme intelligent et si charmant, vous ne pouvez prêter fois à de telles calembredaines. On vous a présenté les choses de façon tout à fait erronées. Cette pauvre femme a droit à toute notre compassion, je suis certaine que vous me rejoindrez là-dessus.Vous voyez, madame Ainsworth avait des ennuis de santé, mais ça, c'est anecdotique en comparaison du reste. La pauvre a été honteusement calomniée. Monsieur n'a pas hérité du flegme légendaire de ses compatriotes et se vengeait en levant la main sur sa femme. Violemment même. Que pouvait-elle faire ? Elle a courageusement pris ses enfants et elle est partie. Et oui, elle a divorcé mais avouez que son mari avait déjà rompu moralement tous les liens du mariage en agissant ainsi non ? »
Dominique avait approuvé, compatit, et oublié. Un des fléaux de ce siècle, ces hommes-là. Un comportement qui déshonorait les coupables et faisait honte à tout honnête homme. Il n'y avait pas une raison – pas une raison – qui justifiait que l'on frappe une femme. Mais enfin, que pouvait-il y faire ? Madame avait certainement eu une réponse inconvenante à une situation qui l'était encore plus. Il n'allait pas lui jeter la pierre. Non, il allait plutôt reprendre une coupe de cet excellent champagne...
Mais aujourd'hui, madame Ainsworth était là, devant lui, et il se sentait étrangement mal.
Dernière édition par Dominique Lebrun le Sam 27 Avr - 5:08, édité 2 fois |
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Mar 23 Avr - 13:55 | |
| Évidemment que le conseil n’était pas de trop ! Une femme du nord comme Catharina avait eu la chance de patiner bien plus souvent que tous ces petits parisiens. Sur glace, elle avait tout fait : Tourner, tomber, courser. Tant dis que l’officier traçait quelques cercles sur ses patins, Catharina faisait de même, tâchant de se rapprocher de ses petits enfants qui s’éloignaient parfois un peu trop. Gardenia était bien capable d’aller embêter d’autres patineurs ! Voyant qu’ils se poursuivaient gentiment dans leur coin, ne risquant pas d’heurter personne, Catharina leva les yeux vers Dominique, esquissa un petit sourire au remerciement.
Ah ! Si seulement il c’était arrêté là. Elle l’avait bien entendu, il l’avait appelée Madame Ainsworth ! Cela faisait des mois qu’on ne l’avait plus nommée ainsi. Parfois, elle entendait encore quelques Madame von Reutersvärd, mais ils n’étaient que le résultat de ses absences dans le monde. Elle porta une main à son cœur, contrariée. N’était-ce pas elle qui désirait le plus s’appeler Madame Ainsworth ? Catharina força un sourire, et mit rapidement de côté ce petit incident.
« Oh, Monsieur… ! C’est Madame de Fréneuse, maintenant… »
Tout d’un coup, surprise, Catharina donna plusieurs coups de patins vers une direction opposée pour s’éloigner d’autres gens qui s’approchaient. La mère était craintive, elle n’aimait pas le public. Si elle avait pu réserver cette patinoire pour elle toute seule… !
« …Hai, je patinais souvent. Dans le nord, vous savez, vaut mieux faire ami avec la glace… »
Elle eut un sourire plutôt gentil, moins contrit. Subitement, Catharina se tourna et continua à se déplacer sur la glace à reculons. Bien sûr, pas pour le narguer, au contraire ! Ses enfants avaient seulement changé de coin. Elle allait lentement, de peur de foncer dans quelqu’un. Au fond d’elle, une curiosité subsistait : Savait-il correctement s’arrêter ? |
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Sam 27 Avr - 5:11 | |
| Le colonel n'acheva pas sa sottise mais se mordit les lèvres. Madame Ainsworth ! Bêtement, il avait répété le nom que le petit avait prononcé. Malgré l'émotion qui passa sur son visage, la princesse de Fréneuse (madame Ainsworth!) classa l'incident avec beaucoup de délicatesse, et avec le sourire. Devait-il insister sur sa bourde en présentant des excuses ? Devait-il adopter le même comportement que son interlocutrice et passer à autre chose ? Un couple de patineurs passant trop près avait mis pour un instant la dame en fuite. Dominique en profita pour clore sa bêtise par un «madame de Fréneuse, évidemment». Il eut été indélicat de se confondre en excuses puisqu'elle-même ne semblait pas s'attacher au sujet. Le malaise n'aurait fait qu'augmenter.
D'ailleurs, on était revenu à des propos plus futiles. La princesse sourit plus librement et Dominique respira plus légèrement. Elle lui parlait du nord, de la glace... Mais le colonel n'écoutait que d'une oreille. Pour bien faire, il répondit : « Et votre pays natal ne vous manque pas trop ? Rien que le climat, déjà, cela doit vous changer ? » Mais son attention se portait ailleurs.
Derrière le sourire aimable des discussions mondaines, l'officier regardait la princesse. Cette évanescente walkyrie était donc la femme de Fréneuse ! Diantre, le ménage devait valoir la peine d'être vu ! Cette femme si maternelle, craintive avait épousé... Et lui alors, comment vivait-il sa vie d'homme marié, comment gérait-il les marmots ? Ah ça ! Une énigme cette madame de Fréneuse !
Et que faisait-elle maintenant ? Elle cherchait à se rapprocher de ses chers enfants bien sûr, mais... à reculons ! Sur la glace, à reculons ! Dominique avançait prudemment tandis que la jeune femme reculer avec tout autant de prudence. Le pauvre, sans se départir de ses manières du monde, tentait de garder également fière allure. Mais il lui faudrait encore quelques leçons pour cela. Tout d'un coup, la jeune femme s'arrêta, juste à temps pour ne pas croiser la trajectoire rapide d'un autre visiteur. La jeune femme s'arrêta. Mais le colonel ? Il essaya. |
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Mer 1 Mai - 13:49 | |
| Évidemment ! Catharina fut soulagée que l’incident soit mis de côté, ne désirant pas que le colonel se fonde en excuse. Elle était plus conciliante, moins susceptible et il était hors de question de se servir de cette bévue pour le disputer comme il l’avait fait en parlant du comportement de sa fille. Oh ! Catharina n’était point rancunière, encore moins vengeresse… semblait-il. Malheureusement, il avait eu raison de signaler les agissements de la jeune fille. Elle n’irait pas loin si elle grandissait en embêtant tout le monde comme elle le faisait.
« Et vous, si vous deviez partir loin, pour votre devoir de colonel, la France vous manquerait-elle ? »
Les norvégiens étaient des nationalistes. L’attachement qu’ils portaient à leur pays, malgré sa pauvreté, était fort. Catharina, même en ayant passé dix ans loin des contrées nordiques, ressentait toujours la même chose. Combien de fois l’idée de quitter la France pour rejoindre la Norvège, après son divorce, lui avait-elle traversé l’esprit ? Un peu trop souvent, sans doute.
Patiner de reculons n’était magique, pas pour elle. Catharina joignit même ses mains dans son dos, glissant tantôt lentement, tantôt plus rapidement. Certains patineurs moins expérimentés avaient encore leur bras écartés et optaient pour des postures bizarres pour garder leur équilibre. Si dans les mondains salons il fallait patiner, Catharina aurait tôt fait de devenir la plus respectée de son cercle ! Hélas, elle se contentait de jouer les tapisseries en se mêlant peu aux conversations.
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| | | Dominique LebrunÊtre homme ? tu le peux. Va-t'en, guêtré de cuir
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Dim 5 Mai - 5:58 | |
| Elle s'éloignait, à reculons sur la glace ; et tandis qu'elle s'éloignait, des souvenirs affleuraient l'esprit de Dominique. Des souvenirs totalement différents de l'endroit où il se trouvait. Des souvenirs où il faisait chaud... un soleil de plomb sur l'eau bleu d'un petit lac, des moustiques... le cliquetis métallique des soldats qui présentent les armes... les officiers, vareuse déboutonnée... et la fille qui lui sourit n'a rien, mais alors rien à voir avec madame de Fréneuse. Tant au physique qu'au moral. Plus l'une recule sur ses patins, plus l'autre s'avance en roulant des hanches.
La chute d'un patineur près de lui rompit le charme. Par contraste, Dominique eut l'impression qu'il faisait plus froid qu'avant et frissonna. Chassant d'un soupir un début de nostalgie et l'image de la sensuelle métisse, il sourit à la blonde patineuse devant lui. Toute impression de chaleur s'était dissipé.
« Assurément. La France n'est pas un pays dont on peut se passer, Madame. A fortiori quand il s'agit du sien. Mais, si il s'agit de défendre l'honneur de la patrie et d'asseoir sa grandeur, je serai toujours heureux d'être là où le devoir me conduit. Et puis, nous apportons la civilisation à ses gens, et là je parle bien sûr de nos colonies. Et quelle civilisation ! »
Oui, Dieu savait à quel point certaines populations avaient besoin des lumières civilisatrices de la France. Mais, par un très étrange phénomène - alors même que la suprématie de la culture et de la vie européenne était indéniable- ces coins reculés, ces peuplades à moitié barbares gardaient un charme certain une fois rentré. L'exotisme sans doute. Un lourd parfum de femme lui remplit de nouveau la tête.
« Sans compter qu'il y a un plaisir certain à découvrir... autre chose. Ne trouvez-vous pas ? » |
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Sam 11 Mai - 15:18 | |
| Elle reculait, de plus en plus lentement, avant de redonner un coup de patin pour reprendre son élan. Madame de Fréneuse fit quelques cercles sur la glace, tâchant de ne pas perdre de vue ses enfants trop longtemps. Ils s’amusaient bien, eux. Au loin, dans le flou, ils se chamaillaient s’ils ne faisaient pas la course main dans la main. Avec Snowden, Gardenia n’embêtait pas les autres patineurs, riait un peu plus. Catharina leva sa main gantée et fit un geste qui ne voulu rien dire au Colonel.
« Je m’y connais très peu en colonies, mais je vous crois sur parole. Il serait triste de laisser ces gens sans rien. »
Les bambins ayant changé de coin de patinoire, la norvégienne glissa sur ses patins pour repartir de face. Comme elle regardait davantage sa progéniture que ce qu’elle faisait, elle perdit l’équilibre. Rien de bien grave, juste assez pour lui faire écarter les bras et se pencher. Les lames cognèrent sur la glace avant de se stabiliser. Catharina resta immobile, cligna des yeux et repartit comme si ne rien était.
Elle regarda Dominique et fronça les sourcils. Où était le plaisir à partir loin de chez soi en terre désolée –peu civilisée ? Découvrir autre chose, oui ! Mais à quel prix ? Ses grands yeux clairs se plissèrent, incertaine. Catharina avait, au cours de son premier mariage, voyagée par-ci et par-là. Monsieur Ainsworth aimait trainer sa femme avec lui, et rarement avec ses enfants. Ils étaient si encombrants ! Et si la jeune mère aimait découvrir de nouveaux lieux, elle préférait largement demeurer dans sa maison, au creux de son cocon familial.
« Nej, il fait beaucoup trop chaud là-bas. »
Catharina supportait mal la chaleur parisienne, imaginez-la en Afrique ! Elle en mourrait, sans doute, la peau rougie par le soleil et le corps complètement déshydraté. Un petit cri, pas très fort, mais qui ne pus échapper à la mère attira l’attention de celle-ci. Elle tenta de voir, plus loin, ce qui arrivait à ses enfants. Elle ne voyait pas grand-chose, à vrai dire, mais Gardenia semblait lui faire de grands signes de bras.
« Pardonnez-moi, Monsieur Lebrun. »
Vif hochement de tête et Catharina était déjà loin. Snowden était accroupi, le visage caché dans ses mains. Elle n’eut même pas à le voir, elle savait qu’il pleurait. Ses petites épaules sursautaient. « Mor ! Il saigne ! » Héla la petite fille qui vint tirer sur le bras de sa mère. Madame de Fréneuse frissonna, mais garda sa panique à l’intérieur. Elle s’accroupit et, à l’aide de ses doigts, redressa le visage de son fils. Il c’était durement cogné le nez sur la glace en tombant. Snowden William Ainsworth n’avait encore rien d’un homme. Il était peureux et craintif et, ciel ! Qu’est-ce qu’il avait peur du sang ! « Mooother… ! » Gémit-il, désespéré. Catharina s’agenouilla –sur la glace, bien sûr- et, tirant son mouchoir, elle tâta le visage de l’enfant en lui murmurant de douces paroles rassurantes.
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Mer 22 Mai - 7:28 | |
| « Il fait trop chaud là-bas. » Évidemment, le climat auquel était habitué madame de Fréneuse ne présentait que peu de comparaison avec celui des colonies. Encore que certaines jeunes femmes, arrivées là après avoir suivi un mari ou un père, semblaient s'en accommoder, avec le temps. Mais aucune ne venait d'un pays de neige. A bien y réfléchir, le choc du changement devait être effectivement violent pour l'âme si douce d'une femme. Surtout d'une femme comme elle.
Dominique leva le regard de ses patins dont décidément, les lames avaient quelques difficultés à comprendre et exécuter correctement les ordres qui leur étaient donnés. Mais il ne put croiser celui de la jeune femme. Perdu au loin, il tenait de percevoir quelque chose. Et sans doute l'avait-il perçu car elle salua et s'éloigna rapidement pour rallier... ses enfants.
Avec nettement moins de vitesse et d'élégance que la jeune mère, Dominique arriva lui aussi sur le lieu de ce qu'il convenait d'appeler « l'accident ». Le petit garçon avait visiblement fait une rencontre musclée avec la surface de la glace. Et la physique était implacable et toujours la même : il s'était fait mal. Et bien entendu, il pleurait. Mais ce n'était encore qu'un enfant. Et un enfant couvé par une mère protectrice de surcroît. Et comme ça ne serait pas la dernière fois qu'il tomberait ou se ferait mal, le petit n'avait pas fini de pleurer. Il fallait espérer qu'un jour, las de se répandre en pleurs, il se durcirait un peu pour devenir un homme.
Mais ce n'était encore qu'un enfant. Tout en observant la scène, le colonel tentait de racler la glace tout en gardant l'équilibre. L'expérience n'étant que peu concluante, la faute à l'équilibre, il se résolut à rejoindre la barrière la plus proche. Là, il reprit son activité avec vigueur, sous le regard curieux et un brin désapprobateur des passants. Assez rapidement, ce manège cessa : la quantité de glace extraite avait été jugée suffisante. Le colonel s'agenouilla et rassembla consciencieusement la poudre glacée dans un mouchoir. Se remettre debout se révéla être une opération plus délicate que prévue. Délicate mais faisable.
Ah ! Mais voilà qu'arrivé près du groupe, il fallait se ré-agenouiller ! Enfin... des paroles, fussent-elles réconfortantes et de sa mère, ne seraient guère efficace sur un nez amoché.
«Petit, tu devrais mettre ceci sur ton nez. Là, sur l'arête. En appuyant un peu... ah oui, ça fait un peu mal, mais ça va passer. Et plus vite avec le froid. »
Tenant toujours la poche de glace improvisé sur le nez du garçon, il se tourna et sourit légèrement à la mère. « Finalement madame, vous avez raison sur les vertus du froid.»
Des toussotements le ramenèrent au blessé... « Hou la non ! Penche la tête en avant ! Voilà. La tête en avant et continue d'appuyer sur ton nez. »
… puis il revint à la jeune mère. « C'est que, en arrière on avale le sang, et ce n'est guère agréable. Enfin. C'est douloureux pour l'instant, mais il faut qu'il maintienne une pression pendant bien dix minutes. La glace va arrêter le saignement, et diminuer le gonflement. N'hésitez d'ailleurs pas à en remettre. »
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Sam 1 Juin - 17:22 | |
| Snowden William Ainsworth était le mieux élevé des quatre enfants de Catharina. Il était polie et respectueux, se tenait toujours droit et ne parlait pas lorsqu’il y avait d’autres adultes présents. Cependant, le garçonnet était aussi timide que sa mère, et douillet comme une fillette. Catharina savait pertinemment que son fils devait se faire plus fort, plus robuste. Elle devait lui faire comprendre que la vue du sang n’allait pas le tuer, mais comment expliquer cela à un enfant lorsque l’on craignait le moindre bruit ?
Surprenant. L’officier revint avec un mouchoir plein de glace, paraissant presque soucieux du sort de l’enfant. Catharina le regarda, le jaugea avec ses grands yeux bleus avant de le laisser agir. Il fallait dire que la Princesse de Fréneuse n’aimait pas que ses enfants soient approchés par des hommes. Elle les trouvait brusques, agressifs, méchants. Snowden accueillit la glace avec une grimace, mais restait docile. Il regarda, le regard en larme, celui qui lui écrasait son petit nez abimé. De peur de tacher ses habits, il renversa la tête vers l’arrière mais, rapidement, Monsieur Lebrun le fit pencher la tête vers l’avant.
« …Merci… »
Catharina était suspicieuse, mais reconnaissante. Elle prit la relève pour tenir la glace contre la blessure du garçon et prit celui-ci dans ses bras. Snowden avait les joues mouillées et les yeux rougis. Sa mère sortit de la patinoire et s’installa à une table libre pour l’y poser. Gardenia –parce qu’il ne fallait pas l’oublier- trainer un peu derrière. Elle vivait mal que son frère aille toute l’attention, qu’il soit si faible. Diable ! Mettez un peu de courage dans ce jeune homme ! Elle se planta à côté de Dominique et leva son petit minois vers lui.
« Snowden il est peureux et il a peur du noir et du sang ! »
Si parfois elle pouvait être très complice avec son frère, ce n’était pas le cas aujourd’hui. Étant la préférée de son père, elle avait développé un certain orgueil, un complexe de supériorité qui l’élevait au-dessus de ses frères. Lorsque l’on vivait entourée de garçon, l’on apprenait à se défendre et se démarquer !
« Moi j’ai peur de rien ! »
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| | | Dominique LebrunÊtre homme ? tu le peux. Va-t'en, guêtré de cuir
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Jeu 6 Juin - 5:12 | |
| Tout le monde sortit de la piste. Le temps de la conversation semblait s'être achevé avec l'accident du fils Ainsworth. Dominique allait prendre congé mais voilà que la petite le regarda et déclara sans ciller : « Snowden il est peureux et il a peur du noir et du sang ! » Voilà. Ca, c'était dit. Toujours sympathique la famille. Et elle rajouta même que elle, elle n'avait peur de rien. Un tel soutien de sa sœur face à un total inconnu, cela devait être très réconfortant pour le petit garçon.
« Bah, il est peureux, mais il a certainement plein d'autres qualités non ? »
Certes, ce défaut-là, si il ne passait pas, il le traînerait comme un boulet toute sa vie. Mais ça, c'était également exact pour la petite, dont la langue si bien pendue pourrait un jour lui jouer un tour.
« Comme toi. Tu es courageuse, c'est très bien, mais tu as certainement un petit défaut ? »
L'officier hésita, puis se pencha pour arriver à sa hauteur. C'est qu'il avait surtout l'habitude de prendre, plus ou moins vaguement, des nouvelles des enfants de ses amis que de discuter avec un spécimen en chair et en os. Et quel spécimen !
« Mais tu pourrais peut-être l'aider, Snowden ? Si il est peureux et que toi, tu es si brave, faut lui montrer qu'il n'y a pas de raisons d'avoir peur ! Et puis lui, il te montrera quelque chose qu'il connaît et pas toi. Comme ça, t'auras un frère courageux pour te défendre un jour. Ca serait bien non ? »
Parce que en l'état actuel des choses, ça serait plutôt mademoiselle Ainsworth qui volerait au secours de son frère si besoin. |
| | | Catharina de FréneuseL'enfant reconnaît sa mère à son sourire.
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Dim 9 Juin - 15:28 | |
| Rares étaient ceux qui répondaient aux railleries de la fillette Ainsworth. On l’ignorait, on la grondait, mais on ne répliquait pas. Catharina serrait les dents, s’en voulant de ne pas pouvoir se dédoubler. Ainsi, l’une d’elle s’occuperait de Snowden qui marmonnait ses adieux à la vie et l’autre pourrait donner à Gardenia l’attention qu’elle quémandait tout le temps. Car oui, cette méchanceté, n’était-elle pas sa façon de montrer que, elle aussi, existait ? N’imitait-elle pas tout simplement ses parents qui eux, pendant tant d’années, s’opposaient pour mieux s’imposer l’autre ? La jeune mère regardait d’un œil inquiet l’officier qui conversait avec sa fille.
« Je peux me défendre toute seule ! »
Lança l’enfant au militaire sur un ton fier. Catharina cligna des yeux et réprima un petit sourire. Elle savait que la fillette ne se laissait pas faire, qu’elle possédait la même autorité que son père et l’obstination de sa mère. Gardenia se dandina sur ses patins, presqu’heureuse de discuter avec autre chose que sa famille. Néanmoins, elle se détourna du militaire et s’en alla vers son frère. Snowden, curieux, regarda sa sœur en levant ses grands yeux vers elle, tout en essayant de garder la tête basse. Ses paupières étaient rougies par les larmes, mais il semblait calmé.
« You won’t die, Snow’ ! You know Hansel fell on stairs yesterday and is still alive ! »
La jeune fille tentait de se faire rassurante et… cela fonctionna. Le garçonnet esquissa un sourire, se remémorant la scène où son petit frère déboulait les escaliers. Catharina, quant à elle, avait ouvert ronds les yeux et jaugeait ses enfants. À chaque jour, les gamins Ainsworth trouvaient de nouvelles façons de se casser le cou. Que pouvait-on y faire ? Il s’agissait, après tout, de jeunes hommes. Douce, Catharina passa une main maternelle dans les cheveux de sa fille. La norvégienne se tourna finalement vers l’officier.
« Alors, Monsieur, vous sentez-vous plus à l’aise sur vos patins, dorénavant ? »
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| | | Dominique LebrunÊtre homme ? tu le peux. Va-t'en, guêtré de cuir
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| Sujet: Re: Froide et cruelle Ven 28 Juin - 5:14 | |
| Le regard en coin de madame de Fréneuse en disait long sur les inquiétudes de la jeune femme. La petite Gardenia ne devait pas avoir pour habitude de raconter platement les extravagances vestimentaires de ses poupées, comme le reste des petites filles de son âge. D'où les craintes de la mère de la voir bavarder. Et au souvenir de sa première entrevue avec la fillette Ainsworth, Dominique se devait d'avouer que ces craintes n'étaient pas superflues. Mais, en l’occurrence, la petite ne faisait que clamer son indépendance sécuritaire. Elle pouvait se défendre tout seule ; nul doute qu'en gardant ce caractère en grandissant - à condition d'apprendre à parfois se taire et à mesurer les risques – elle deviendrait une femme effectivement indépendante. Et piquante. Pas forcément désagréable, mais pas forcément au goût de sa mère.
La fillette se détourna de l'uniforme pour aller apporter un peu de réconfort au grand blessé, laissant à sa mère tout le loisir de reprendre la conversation.
« Plus à l'aise ? Assurément. Grâce à vos précieux conseils d'ailleurs. Un peu de pratique et la maîtrise du freinage sont encore nécessaires certes, mais je ne désespère pas de pouvoir un jour glisser avec la même facilité que vous madame. J'aurais voulu dire avec la même grâce, mais cet objectif me semble définitivement trop ambitieux pour moi. »
Une certitude même.
« Peut-être aurai-je à l'avenir de nouveau la chance de profiter de vos leçons... Pour aujourd'hui, je crois en avoir fini avec la glace. Monsieur Ainsworth aussi devrait pouvoir s'en passer je pense. »
Le garçon s'était pris un méchant coup, mais le saignement devait s'être arrêté. D'ailleurs, il semblait avoir retrouvé des couleurs. Puisque la séance de patinage était finie, et que finalement le fils Ainsworth n'était pas mort ou proche de l'être, Dominique commença à envisager le retour. La pauvre mère devait avoir envie de se remettre de ces émotions ; la fillette devait attendre avec impatience de raconter à ses frères, ses domestiques, ses poupées et tout autre oreille humaine ou non comment son grand frère s'était d'abord mangé la patinoire puis écroulé en pleurs en pensant que sa fin approchait et comment, elle, elle l'avait tout ragaillardi ; et le grand blessé ne devait pas spécialement apprécier d'être le centre d'attention des passants. Bref, tout le monde devait avoir envie de rentrer.
« Bien madame, je ne voudrais pas vous éloigner plus longtemps de vos devoirs de mère. Mais ce fut un vrai plaisir de faire votre rencontre. Ainsi que celle de vos enfants. »
Étrangement.
« Je me proposerai bien de vous raccompagner, mais j'imagine que vous avez votre propre voiture. »
Et puis, franchement, cahoter la princesse de Fréneuse et ses deux enfants en fiacre de louage dans Paris, ce n'était pas vraiment le sommet de la mondanité.
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| Sujet: Re: Froide et cruelle | |
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