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| Lise ChampmézièresElle court, elle court, la cousette !
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| Sujet: Mystère de la création Sam 14 Jan - 9:31 | |
| Février 1896 Lise ne tenait pas en place, évidemment. Elle avait renvoyé ses ouvrières à l’étage et se trouvait seule dans ses salons qu’elle arpentait nerveusement. Samedi matin, samedi matin… C’était bien vague, comme indication ! Elle n’allait pas passer toute la matinée à se morfondre, tout de même ! Pour tromper son impatience, elle s’assit et ressortit de son corsage la lettre qu’elle avait reçue quelques jours auparavant. Tellement étrange que Lise avait d’abord cru à une farce. Elle avait souvent tendance à considérer les événements étranges comme des plaisanteries, au moins dans un premier temps. Mais elle avait fini par prendre la missive au sérieux. La flatterie qui transpirait du papier l’avait atteinte, même si elle ne l’eût jamais avoué… Quant à l’insistance avec laquelle on demandait le secret, elle semblait bien montrer que l’envoyeur s’aventurait sur des sentiers qu’il n’empruntait pas souvent et qu'il craignait un peu. Elle avait hésité à répondre, bien sûr. Oh pas bien longtemps, quelques minutes à peine. Minutes pendant lesquelles les mots tracés sur le papier s’étaient mués en images dans sa tête : oui, elle pensait déjà à la robe sardanapalesque qui ferait sa gloire dans toute la capitale ! Ah, qu’elle avait hâte ! Bien sûr, ce n’était pas sans risque. On connaissait des artistes morts de ces commandes anonymes. Mozart, par exemple. Du moins, c’est ce que prétendaient certains journalistes qui débattaient encore du fameux Requiem. Oh, mais si Lise voulait la gloire, elle la voulait de son vivant ! Oh oui, et elle ne se laisserait certainement pas manipuler par ce mystérieux « A.A » ! Et si elle ne venait pas ? Impossible, songea Lise. N’avait-elle pas répondu dès mercredi ? - Citation :
- Je l’attendrai.
Clair et concis. Elle n’allait sûrement pas gratifier un inconnu, fût-il illustre, de longues formules.
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| | | Pierrot LunaireLa bouche clownesque ensorcèle comme un singulier géranium
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| Sujet: Re: Mystère de la création Mar 17 Jan - 11:46 | |
| | Et puis la sonnette tressauta, à onze heures. Depuis combien de temps Madame Champmezières arpentait-elle ses délicats salons ? Celle qui entra, embellie, magnifiée peut-être par l'attente et l'imagination, était une jeune femme blonde au visage ovale. Sa taille était fine ou trop étroitement corsetée - sait-on jamais, de nos jours ... ? Elle arriva, jaugeant la pièce du regard, avec un petit air observateur et presque condescendant. Jolie - peut-être même belle - il émanait d'elle un peu trop d'orgueil pour qu'elle soit d'abord agréable. Elle posa un manteau de fourrure, très coûteux, sur un des fauteuils du salon, considéra les oiseaux de l'air grave d'un perroquet jaloux et enfin, considéra seulement son hôte.Voilà le personnage.
- Je vous donne le bonjour, Madame Champmézières, furent les premiers mots, bien banals, qui franchirent ses lèvres. |
Elle continua à arpenter le salon, en conquérante - les hanches roulant sous la taille fine, la soie de sa robe gémissant sous ses pas. La toilette qu'elle arborait était extravagante à outrance pour une matinée - mais à vos yeux avertis, chère couturière, sans doute semble-t-elle sans finesse. La prétention affichée de la jeune femme, l'anonymat du payeur, ses manières étranges vous feront peut-être deviner à quel genre de femme vous avez affaire. La donzelle, cependant, peut-être pas si à l'aise que ça avec la situation, reprit en hésitant un peu : - Je suis Yvonne Galant, ravie de vous rencontrer. Nous voulons vous demander une création ... Selon ce que moi-même et mon corps, nous vous inspirerons ... Votre prix ... - Un temps, comme pour ménager le suspense, préparer une mise en scène - sera le nôtre ... ! Et elle eut un geste mi-emphatique, mi-ridicule. A présent, c'est à vous de nous dire, chère Madame, la réponse que vous inspirera cette énergumène ... |
| | | Lise ChampmézièresElle court, elle court, la cousette !
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| Sujet: Re: Mystère de la création Dim 22 Jan - 0:17 | |
| Après avoir relu quatre fois la lettre anonyme, Lise l’avait replacée près de son cœur et avait levé les yeux vers la pendule en bronze doré offerte par la sœur d’Edmond. Désespérément impatiente, elle avait passé les minutes – les heures ? – suivantes à draper les quelques mannequins de la pièce, l’esprit ailleurs.
Le tintement aigu et enroué de la sonnette arracha un « Bon sang ! » bien peu raffiné à Lise. Elle ajusta l’étole de soie qu’elle venait d’enrouler autour du cou sans tête du modèle, vérifia fébrilement son reflet dans la glace, et se retourna pour accueillir sa visiteuse, le cœur battant.
Un « bonjour » enthousiaste s’évanouit sur ses lèvres, qui restèrent arrondies sur les syllabes muettes. Seigneur, quelle beauté, quel mépris dans cette femme ! Tout le charme du personnage semblait s’être concentré dans les formes, dans les traits ; le regard en revanche était froid, dédaigneux. C’était la toute première impression de Lise.
En attendant que la dame daigne lui adresser un mot, Lise l’observa évoluer dans la pièce, l’œil mi-agacé mi-goguenard. Actrice ? Demi-mondaine, maîtresse d’un riche bourgeois ou d’un jeune noble ? Tout cela, peut-être. Elle avait, eh bien, quelque chose… Du chien, sans doute, pour reprendre l’expression à la mode. La silhouette était parfaite et ce devait être un ravissement de l’habiller. Rien à reprocher au visage. Le manteau était de premier choix. La robe, en revanche, d’un luxe de carnaval ; la démarche, empruntée. L’ensemble dégageait une curieuse impression de gâchis. Car, mon Dieu, comme cette femme aurait pu être belle !
« Enchantée de vous rencontrer, madame Galant. »
Un petit rire. On avait envie, en fait, de chahuter gentiment cette dame très jolie et très affectée.
« Une création, mais certainement ! C’est généralement ce que me demandent mes clientes. »
Et elle avança, pas du tout gênée par la simplicité de sa robe qui contrastait avec celle d’Yvonne. Gracieuse, pourtant, et inconsciemment fière de le savoir.
« La lettre de votre… mmh… la lettre qui annonçait votre venue m’a intriguée, je l’avoue. Au plus haut point. Vous allez pouvoir m’éclairer sur ce que vous voulez, sur les raisons du mystère qui entoure la commande, enfin sur tout cela ! » conclut-elle joyeusement, un geste évasif de la main.
Puis, désignant les sièges qui parsemaient la pièce :
« Désirez-vous vous asseoir, boire quelque chose ? Nous serions plus à l’aise pour discuter, n’est-ce pas ? » |
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| Sujet: Re: Mystère de la création Mar 24 Jan - 12:44 | |
| | Yvonne Galant joignit les mains en un petit geste mignard et répondit, la bouche en coeur :
- Volontiers, Madame. Discutons, discutons ...
Elle attendit, avec un air de princesse byzantine, que l'on servît les boissons. Et d'un air songeur, elle reprit :
- Je vous trouve bien curieuse sur les tenants de cette affaire. Si nous avons choisi le mystère, c'est bien pour qu'il demeure entier, n'est-ce pas ? Cependant - et en cela, je vous comprendrais tout à fait, croyez-le bien - si vous souhaitez des garanties disons ... financières ...
Elle sortit d'une manche une enveloppe qu'elle posa sur la table. Celle-ci était fermée. Et pendant quelques instants, elle parcourut la pièce du regard, d'un : |
petit air contrarié ... Et soudain, reprenant sa légèreté : - Mais ces détails m'ennuient, parlons de la robe ! - Elle sembla se délecter à la prononciation de ce mot. Ce sera un triomphe, bien entendu. Je sollicite vos services pour la soirée qui suivra la Première. Il s'agira de marquer les esprits ! Un triomphe sur scène n'est rien, sans un triomphe à la réception qui suit le spectacle ...Vous avez votre réponse, Madame Champmézières, vous êtes là face à une artiste, ou ce que l'on considère comme tel. Car ce triomphe, Madame, elle a l'air de croire que c'est votre robe qui le lui confèrera, point autre chose.
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| Sujet: Re: Mystère de la création Dim 5 Fév - 7:41 | |
| Clac. La porte venait d’être refermée sur les mystères de la commande. Il faudrait donc entrer plus tard par la fenêtre.
Lise s’était récriée, un peu, pour la forme, sur la nécessité de présenter si tôt des garanties financières. Mais la visiteuse minaudait toujours et Lise en était agacée. Ce petit air méprisant ! Ah, cela finirait bien par la fâcher ! Mais Lise était décidée à passer outre son sentiment pour s’attacher la confiance de sa cliente. Car cliente elle était, cette petite Yvonne ! Et pouvait-on reprocher à une cliente d’être mauvaise actrice ? Elle jouait aussi mal, sans doute, sur les planches que dans les salons, mais peut-être était-elle encensée par les critiques. Après tout, les pièces étaient prétextes à montrer les jolies femmes et tout le monde savait que, si les hommes aimaient aller au théâtre, ce n’était pas pour la qualité artistique du spectacle (sauf Edmond, évidemment). Yvonne avait le physique qu’il fallait, et certainement l’ambition sociale. Son incompétence dramatique ne devait donc gêner ni le public ni le directeur du théâtre. L’actrice, médiocre, s’effaçait devant la femme, magnifique.
« La robe, mais oui ! Voilà ce qui m’intéresse également. » s’enthousiasma Lise.
Elle se pencha, resservit Yvonne. Un court silence ponctué par le bruit des carafes. Puis, passant un doigt songeur sur ses lèvres, elle assura :
« Vous serez la reine du soir, évidemment. On dira "Mademoiselle Galant sur scène, c’est déjà un délice, mais en-dehors elle est sans rivale", on écrira que vous êtes d’une élégance "éblouissante et résolument moderne". Un triomphe, comme vous le disiez, un triomphe… » approuva-t-elle.
Puis elle se leva, rejoignit en deux pas légers le mannequin le plus proche et le déshabilla brutalement. Les tissus tombèrent au sol dans un bruissement.
« J’ai des idées pour vous, beaucoup d’idées ! A vrai dire, je… oh ! »
Interrompue en plein tourbillon par une pensée, elle se tourna vers Yvonne et lui offrit un sourire d’excuse :
« Mais pardon, vous devez avoir des exigences. »
Ses bras retombèrent le long de son corps et elle retourna s’asseoir calmement.
« Voudriez-vous me faire part de vos… eh bien, de vos attentes ? Voulez-vous, par exemple, je ne sais pas, voulez-vous briller pour quelqu’un en particulier ? »
Elle avait dit cela sans malice. Ses clientes confiaient souvent, au détour d'un ourlet et dans un petit rire gêné, le nom de celui à qui elles voulaient plaire. Ou, plus rarement, le nom de celle qu'il fallait éclipser par davantage de charme et de beauté. Alors Lise repensait chaque détail, chaque nœud, pour mieux atteindre la cible. |
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| Sujet: Re: Mystère de la création Lun 6 Fév - 6:30 | |
| | Mademoiselle Galant hocha la tête avec enthousiasme lorsque la couturière évoqua son triomphe. Cette dame avait en effet tout compris, M. *** avait raison ! Ses yeux brillaient comme ceux d'une petite fille devant la plus belle des poupées de porcelaine - la donzelle garderait-elle quelque naïveté d'enfant derrière ses prétentions éclatantes ... ? Elle regarda la dame s'affairer, acquiesçant toujours en silence ... Et sembla presque décontenancée quand cette dame-tourbillon revint s'installer dans le petit fauteuil. Yvonne reprit une gorgée de ce qu'on lui servit (mais que lui avez-vous offert, Madame Champmézières ?), et bredouilla :
- Eh bien comment dire ... J'ai quelques idées, il est vrai ... Je veux que ce soit moderne et éclatant. J'aime les couleurs vives, je dois l'avouer, je ne veux pas de ces couleurs fades qu'on fait toujours porter aux femmes. Mais difficile d'être vêtu de jaune éclatant ou de rouge écarlate | sans que cela soit néfaste pour le teint, ou que cela soit vulgaire ... Pour tout vous dire ...Elle se pencha un peu vers son interlocutrice, et de l'air de la confidence, ajouta : - J'aimerais que l'on oublie un temps ces dames qui font mine de s'y connaître en art et qui croient pouvoir dire ce qui est bon ou mauvais, en exigeant ou en espérant que l'on suive leur avis ... Moi, Madame, je trouve qu'une femme n'a pas à donner son avis sur les grandes oeuvres d'art : qu'elle se cantonne à ce qui est à sa portée. En ce sens, vous faites honneur à votre sexe, en nous conseillant en l'art de la parure ... Elle semblait tout à fait persuadée de la logique de son raisonnement et, reprenant une gorgée, ajouta, après avoir divagué un peu : - Ah ça oui, j'aimerais qu'on oublie Madame la Présidente, qui sera sûrement de la soirée, et ... qui est d'une beauté un peu piquante, il faut le concéder. Mesdames Forestier et de Lambresac, à défaut d'être jolies, ont du chic ... Pensez-vous qu'il soit possible d'être moderne et audacieux tout en restant très chic ?Faites attention, Madame Champmézières : un peu plus, et elle vous demandera une robe couleur de temps ! |
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| Sujet: Re: Mystère de la création Mar 7 Fév - 10:15 | |
| Yvonne semblait plus en confiance, comme conquise par l’intimité du lieu, et Lise s’en félicitait. Peut-être pourraient-elles s’entendre, après tout ? Lise reprit son verre et le sirota lentement en écoutant la visiteuse. Elle avait fait servir de la limonade – au gingembre, à l’ananas, elle raffolait des deux, à vrai dire. Et puis c’était l’occasion d’utiliser son joli service en cristal bleuté.
Moderne et éclatant… Couleurs vives… Bien. Elle eut un petit sursaut d’orgueil offensé lorsqu’Yvonne assura que les femmes n’avaient pas à porter de jugement sur l’art. Lise désapprouvait, évidemment. Elle estimait son jugement particulièrement sûr en matière d’art. Les hommes en revanche avaient de ces lourdeurs d’esprit dès qu’il s’agissait de style ! En cela, Edmond faisait exception. C’était là leur grand point commun, le lieu de convergence de leurs deux caractères : le bon goût. Mais, tout esthète qu’il fût, Edmond était incapable de créer la beauté : il l’admirait simplement. Lise, elle, aimait par-dessus tout voir émerger les chefs-d’œuvre. Alors, vraiment, confier exclusivement aux hommes le soin de juger l’art était une aberration à peine digne d’Yvonne Galant. Quant à la politique, la finance, la science… voilà ce qu’elle laissait bien volontiers aux hommes.
« Moderne et audacieux tout en restant très chic ? Mais certainement, nous y parviendrons ! Voilà donc notre mot d’ordre. »
Un instant silencieuse, elle songea que le défi était de taille, tout de même. Eclipser le charme d’Apolline en même temps que l’élégance de Madame de Lambresac relevait de la gageure. De l’écartèlement stylistique. Du dilemme textile.
Heureusement, Lise adorait les défis. Elle trouverait bien la robe idéale. Quant au reste – le charme, l’élégance… eh bien, il faudrait compter beaucoup sur l’habileté d’Yvonne à user judicieusement de sa beauté.
Tout excitée par ces perspectives, Lise se leva de nouveau et vola presque vers l’armoire la plus proche qu’elle ouvrit largement.
« Les couleurs, d’abord. Rien de tel pour se mettre en appétit. Pas de pastel, donc ! Mais pas de jaune éclatant ni de rouge écarlate, oubliez cela tout de suite ! » dit-elle gaiement. « Voyons… Ce sang-de-bœuf est merveilleux, mais vous auriez l’air d’étouffer là-dedans… Un framboise serait mieux. Voire amarante, pourquoi pas ! »
Elle sortait tous les tissus dont elle parlait et les envoyait voler sur les sièges alentour. Elle se retourna un instant, fronça les sourcils – « vous avez les yeux… mmh… bruns, n’est-ce pas ? » puis replongea dans ses étoffes.
« Oh, mais c’est un jade qu’il vous faut, bien sûr ! Sur un vert plus profond, comme cela ! La modernité sur l’élégance classique ! Oh mais… »
Elle reporta les yeux sur Yvonne, une petite moue contrariée sur le visage :
« … les artistes n’aiment guère le vert, n’est-ce pas ? Quelle drôle de superstition ! Cela vous fait peur à vous aussi, le vert ? »
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| Sujet: Re: Mystère de la création Jeu 9 Fév - 1:19 | |
| | La vie était tout de même compliquée. Yvonne aurait bien choisi du vert, bien entendu, mais puisque les artistes se l'interdisaient et qu'elle était maintenant une artiste ... Elle fit une petite moue désolée, et répondit :
- Si les artistes craignent le vert, c'est qu'il doit y avoir une bonne raison, n'est-ce pas ... ? Vous savez pourquoi, vous ? Oh non ... Non, non non, je ne voudrais pas attirer la malchance sur moi - surtout vu la couleur que peut prendre la malchance aujourd'hui. Vous imagineriez, vous, une explosion sur scène comme il y a eu à l'Opéra ? Le lustre de la salle qui tombe sur les invités ? Oh non, vraiment ... Vraiment, je suis confuse, mais pas de vert, je dois faire comme les autres gens du métier ...
Elle se leva, se dandina un peu, pensive ... Elle cherchait dans les tréfonds de sa mémoire le pourquoi du comment de cette |
crainte, les exceptions accordées à la règle ... Rien ne lui revenait. On ne l'avait pas instruite de ces raffinements-là. - Non, vraiment, il n'y a rien à faire. C'est dommage, j'aimais ce que vous proposiez ... Peut-être avez-vous quelque chose plus dans les bleu-verts, dans le turquoise ? Ce serait du bleu, par définition, ce ne serait pas la même chose ... Oh, c'est vraiment regretta ...Et puis son regard s'illumine, et elle s'exclame, comme sous le coup d'une révélation : - Oh et puis, ça ne sert à rien de regretter puisqu'Alfred déteste le vert !Et elle s'arrête, interdite, les yeux ronds, la bouche ouverte. L'air d'une enfant qu'on a pris la main dans le pot de confiture. Oups ... ! |
| | | Lise ChampmézièresElle court, elle court, la cousette !
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| Sujet: Re: Mystère de la création Dim 12 Fév - 9:40 | |
| Lise n’avait pas l’air aussi contrarié que sa cliente. Même si la contrainte lui pesait, elle savait disposer de suffisamment de ressources pour passer outre. Pas de vert ? Eh bien, pas de vert, tant pis ! Tant mieux même, car on trouverait un arrangement plus harmonieux encore. Et puis, de toute façon, si Alfred détestait le… Alfred ?
Un court moment de silence accueillit la dernière phrase d’Yvonne. Les deux femmes se faisaient face, l’une affreusement gênée, l’autre vaguement intriguée… C’était l’expression du visage, l’air un peu sot de celui qui a gaffé, qui avait alerté Lise. Car Alfred, après tout, pouvait être un fiancé, un ami, un mari. Mais pourquoi Yvonne s’en serait-elle alors voulu de prononcer son nom ? Non, pas de doute, cet Alfred faisait partie des mystères de la commande ! Décidément, quelle piètre actrice, et quelle mauvaise confidente…
Mais Lise savait faire preuve de tact. Elle brisa bien vite le silence et reprit d’un ton désinvolte :
« Eh bien, si en plus Alfred déteste le vert, je m’avoue vaincue ! Pas de vert, donc ! Du turquoise, disiez-vous ? Mmh, voyons… »
Elle tourna encore le dos à Yvonne, lui laissant le temps de se remettre, et considéra ses tissus d’un œil distrait. Elle pensait toujours à ce mystérieux Alfred… et soudain la lettre lui revint en mémoire, avec sa signature à moitié anonyme : A.A. Alfred, bien sûr ! Mais quid du second A ? Elle pensa théâtre, cabotins, écrivailleurs… Athys, évidemment ! Comment n’y avait-elle pas pensé plus tôt ? Toutes ces sottises autour d’un anonymat mal gardé, et puis cette jeune actrice incompétente mais jolie… Seigneur, qu’est-ce qu’Athys mijotait encore pour retrouver la gloire ? Comptait-il vraiment sur Yvonne ? Ne pouvait-il comprendre qu’il était dépassé, tout simplement ?
Lise s’appuya sur la lourde porte de l’armoire et soupira. Athys avait si peu de goût ! Elle ne le connaissait pas personnellement, mais croyait savoir qu’Edmond lui avait parlé quelquefois. « Un pigeon, gris et gras, incapable de s’envoler ! » avait-il rapporté, moqueur. Comme pour lui donner raison, une perruche poussa un cri aigu qui ramena Lise au présent. Elle se redressa, tripota quelques étoffes et tira un large pan turquoise. Après tout, Athys était vieux, ringard, dépourvu de talent et de goût (tout cela en un seul homme, Seigneur !), mais il était connu. Et si son Yvonne, en dépit de tout, était bien habillée, cela se verrait.
« Eh bien du turquoise, oui, pourquoi pas ! Avec du bleu plus foncé… ou, tenez, du gris. Mais oui, vous auriez un collier dans les mêmes tons, qui évoquerait les ocelles d’un paon ! Cela vous irait à merveille ! »
Enchantée de sa proposition, elle adressait à Yvonne un grand sourire.
« Nous mettrions quelques nuances de vert dans le collier – j’espère que vous avez un joaillier compétent – mais pas de quoi faire tomber un lustre, naturellement ! Cela a dû être si terrible à l’Opéra… » |
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| Sujet: Re: Mystère de la création Mar 14 Fév - 8:01 | |
| | Yvonne ne connaissait pas encore le talent des bons commerçants. Rougissante, désolée d'avoir dit ce qui s'apparentait à une bêtise, elle demeura muette et stupide, cherchant dans sa tête ce qu'on lui avait répété - version officielle, corroborée, validée par les autorités. Mais Mme Champmézières savait rester légère. Peu à peu, Yvonne se détendit, et se laissa même aller à sourire. Cela ne semblait pas si grave, après tout !
- Terrible ... Oh là là, oui, j'imagine. Vous savez, j'ai croisé une danseuse dans les coulisses, l'autre soir. Un vilain bout de fille, une vraie tête de souris ! Mais elle vient de l'Opéra et elle était sur scène quand c'est arrivé ... - pauvre enfant, ce ne doit pas être simple ! Elle n'a pas compris, pas bien vu, c'est normal ... Et tout le monde la harcèle ! Vous l'auriez embêtée pour savoir, vous ? | Moi, je n'ai pas voulu, c'est trop horrible ces choses-là, et s'y intéresser peut porter malheur ... Elle s'apitoya encore un peu, selon le refrain bien connu des opprimés et des victimes- petit air navré ... Cela fut dit d'un petit air de tristesse futile - on y croirait presque. Mais, papillonnant toujours, Yvonne reprit soudain son air naturel, avec ses étonnements naïfs, sa superficialité charmante et son petit mépris malvenu. La transition s'était faite un peu trop vite pour ne pas attirer le soupçon, et vous vous surprenez peut-être à penser, Madame Champmézières, que si elle est mauvaise actrice pour l'heure, elle n'est peut-être pas tant dépourvue de potentiel ... Pendant ce temps, Yvonne reprenait d'une voix plus vive : - Mais le joailler ! Je n'ai pas encore choisi de fournisseur ... En tant que spécialiste des belles choses, Madame, me recommanderiez-vous quelqu'un ? Comme ça, il est certain que cela ira avec la robe ! Puis s'avançant, elle caressa, rêveusement, l'étoffe que lui présentait la couturière. Et avec le plus grand sérieux, elle ajouta : - C'est une bonne idée, le paon. Cela fait artiste ... Les poètes aiment les oiseaux, leurs couleurs, leur chant, n'est-ce pas ... ? C'est tellement gracieux, les oiseaux. Et ma voix sera comparée au plus beau ramage des paons ... !Si elle avait dit cela avec l'attitude la plus mondaine possible, il était difficile de ne pas proférer songerie plus ridicule. Il semblerait que Mademoiselle Galant n'ait jamais entendu de paon de sa vie ... |
| | | Lise ChampmézièresElle court, elle court, la cousette !
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| Sujet: Re: Mystère de la création Dim 19 Fév - 8:57 | |
| Lise rit de bon cœur. Il lui semblait, tout à coup, qu’elle discutait avec une petite fille, une enfant qui voulait jouer à la femme.
« Vous en aurez en tout cas le plumage ! Du moins, on veillera à l’évoquer. Mais sans ostentation surtout, c’est la dernière chose qu’il vous faut. Vous porterez merveilleusement bien la simplicité. »
Elle regardait Yvonne avec affection, maintenant. Comme une mère trop peu sévère aurait considéré sa fille lui ayant emprunté sa plus belle robe pour se pavaner devant le miroir, trop de noir sur les yeux. Et un collier de perles en sautoir qui traînait par terre.
« René Lelièvre. Le joaillier, je veux dire. Le seul en qui j’ai une confiance absolue ! »
Celui qui lui avait appris la beauté, la patience et la minutie. Ce cher René !
« Nous pourrons y aller ensemble, si vous le désirez. Peut-être que votre monsieur Alfred devrait venir également… Enfin, sinon nous ferons sans lui. Vous verrez, René comprendra tout de suite ce qu’il nous faut. Il voit tout, il comprend tout, il crée tout ! »
En prononçant ces derniers mots, Lise attrapa la soie turquoise et la jeta sur le mannequin qu’elle avait déshabillé. Songeuse, elle regarda alternativement Yvonne et la silhouette immobile qui attendait d’être modelée.
« Je vois quelque chose d’un seul tenant… Pas de ceinture ou de ces multiples bandes surtissées qui hachent la silhouette en petits morceaux indépendants. Pas pour vous. Ce serait un crime de dissimuler de telles formes… En revanche, des plis. Oh oui, la robe pourrait être entièrement sculptée avec de fins et longs plis ! Ils prendraient naissance, mettons, juste sous la taille, et d’un seul côté. Voilà qui serait moderne ! Et audacieux, pour sûr ! »
Elle pinçait le tissu, essayait différentes formes… Parfois, on entrevoyait pendant une seconde ce qu'elle voulait dire.
« Pour le haut, des plis plus larges. Mmh, il faudrait… Mes épingles, où diable sont mes épingles ? »
Elle relâcha tout et s’écarta, fouilla dans ses armoires en grommelant injustement contre le désordre de ses ouvrières, puis finit par trouver une boîte d’épingles sur une petite table proche de la porte. En revenant vers Yvonne, elle disait :
« Pour le tissu, eh bien… Oh Seigneur, comment ai-je pu ne pas vous le demander !? Pour quand est prévue cette soirée ? Je veux dire, une robe d’hiver, de printemps ou d’été, cela n’a rien à voir ! » |
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| Sujet: Re: Mystère de la création Mar 21 Fév - 12:36 | |
| | Alors que Madame Champmézières s'égarait de nouveau dans ses évocations, pour ensuite retomber sur terre, une fois de plus, Yvonne haussa un sourcil. Pour sûr, les créateurs et les artistes étaient souvent un peu fous, même ceux qui semblaient vraiment bien sous tout rapport ... Il faudrait qu'elle fasse vraiment attention, quand elle aura commencé ...
- Dites ... Je vous pose peut-être une question indiscrète, mais ... Il n'est pas trop fatiguant, votre métier ?
Elle se baissa et alla prendre, au pied du fauteuil, une petit sac à pompons où elle chercha un petit calepin. Elle en tourna les pages, fébrilement ...
- Ce sera en avril. Au début du mois. Aurez-vous assez de temps ? | Et, distraitement, elle posa le petit calepin sur la table basse. Recouvert de maroquin rouge, rempli apparemment au crayon à papier, c'était un petit objet simple - presque une minauderie d'écolière. - Monsieur ... Alfred, comme vous dites, préfère rester en dehors de cette affaire. Il ne veut pas être vu avec moi. Ou même ... Il ne veut surtout pas qu'on me voie. Je reste dans l'ombre, je ne répète pas avec tout le monde - on prend une doublure. J'apparaîtrai le soir même, dans la robe. Puis sur scène. Et ce sera la surprise. Il paraît que les parisiens aiment bien, les suprises ... C'est vrai ? Elle hocha la tête, et une mèche blonde se détacha de son chignon savant - un peu trop foisonnant. - Nous pourrons compter sur vous, n'est-ce pas ?A cet instant, la pendule sonna treize heures. |
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| Sujet: Re: Mystère de la création Dim 26 Fév - 5:48 | |
| « Fatigant ? Mais… pas vraiment, enfin, pas plus qu’un autre métier j’imagine… Disons que, en tout cas, je n’ai aucun mal à m’endormir… »
La question l’avait déconcertée. Ce n’est qu’après avoir bafouillé ces rudiments de réponse que Lise réalisa soudain ce que voulait dire Yvonne : en l’occurrence, c’était elle qui était fatigante. Elle papillonnait, c’est vrai, passait d’une chose à l’autre, s’envolait, retombait brusquement comme un petit oiseau encore incertain de ses ailes… Petite, déjà, elle fatiguait ses parents avec ses questions et ses bêtises qu’elle appelait avec un orgueil enfantin « expériences de vie ». (Sa mère assurait que la fessée était aussi une excellente expérience de vie, et elle lui en faisait la démonstration sans attendre). Elle fatiguait Edmond, autrefois, et dans ces cas-là il lui adressait un regard ironique qui la faisait se taire et s’asseoir près de lui avec une moue vexée. Elle fatiguait sans doute ses ouvrières qui n’osaient rien dire mais ressortaient exténuées de la maison de couture.
Rien de pire pourtant qu’une cliente fatiguée. Elle ne regarde plus, accepte ou refuse tout, n’a plus plaisir à se trouver là. Aussi, lorsque Lise eût compris qu’elle venait de faire franchir à Yvonne le seuil de la fatigue qu’elle engendrait, prit-elle le parti de contrôler son enthousiasme et de se comporter en dame si ce n’est apaisante, du moins non-fatigante. Cela exigeait de la maîtrise. Surtout quand… Avril ? Cela ne lui laissait qu’un mois et demi pour commencer et achever cet ouvrage en secret ! Le premier mouvement de Lise fut de pincer les lèvres pour ne pas s’exclamer de surprise. Maîtrise, maîtrise.
« Eh bien, il faudra faire vite. Avec l’arrivée du printemps les commandes se multiplient mais… je ferai mon possible. Dès la semaine prochaine je pourrai vous proposer une vraie ébauche. Et nous irons ensuite sans tarder chez René, car votre délai va l’affoler ! »
Un coup d’œil à la pendule puis son regard revint sur Yvonne dont le léger désordre des cheveux donnait à sa beauté un caractère familier, intime. Elle lui sourit.
« Les Parisiens aimeront cette surprise-là en tout cas. »
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| Sujet: Re: Mystère de la création Mar 28 Fév - 5:16 | |
| | A cette réponse, la jeune femme sembla rassurée. Elle eut un grand sourire qui illumina la pièce. Sans doute se voyait-elle déjà au centre des regards, élégante et jalousée, enviée et admirée ... Tant de femmes nourrissent de ces rêves-là ... Cependant, le réel reprit bien vite ses droits et, d'un air sérieux, elle lança :
- Mais pourrez-vous me recevoir dans le secret à chaque fois, sans que je croise d'autres clientes ? Je suppose qu'il devra y avoir des essayages, des mesures ... Et pendant que j'y pense ! Peut-on faire confiance à vos employées ? On m'a toujours dit que les couturières étaient bavardes ...
Cela faisait beaucoup de questions et de complications, c'était embêtant. Yvonne sembla chercher une solution, au fond de son petit esprit d'oiseau, et d'un air concentré, reprit : | - A vrai dire, vous pourriez peut-être venir chez moi, mais c'est loin d'ici, j'en ai peur ... Comment ferons-nous ? Par ailleurs ...Elle lança encore un coup d’œil à la pendule, et reprit son babil : - Je vais bientôt devoir partir. Je dois apprendre le texte, avant de répéter avec Monsieur ... Disons avec Monsieur le répétiteur. Vous savez le rôle que je joue ? Celui d'une jeune fille noble qu'on veut marier contre son gré, et qui veut s'enfuir avec son amant. Elle est pure, et tout finit bien à la fin. C'est très intéressant ! En vérité, cela semblait surtout vu, revu et encore vu. On faisait tellement plus original, tellement plus surprenant, tellement plus ... Audacieux. Pauvre robe, à aller orner un talent si conventionnel et si médiocre ... Peut-être est-ce qu'elle pressent, très vaguement, Yvonne, car elle semble soudain contrariée et presque angoissée ... S'avançant vers Madame Champmézières, elle demande d'une petite voix : - Vous souhaitez toujours répondre à cette commande, n'est-ce pas ... ? Nous augmenterons le cachet s'il le faut, vous savez ... |
| | | Lise ChampmézièresElle court, elle court, la cousette !
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| Sujet: Re: Mystère de la création Jeu 1 Mar - 10:59 | |
| C’était Yvonne qui bavardait, maintenant. Angoissée sans doute par tous les aspects pratiques qu’elle devait gérer en l’absence d’Athys.
« Vous viendrez le matin, assez tôt, et sans jour fixe. Nous nous arrangerons d’une fois sur l’autre, ainsi nous n’éveillerons pas la curiosité des petites que je renverrai à l’étage. C’est qu’elles sont plus bavardes que moi, évidemment… »
Voilà qui pouvait effrayer, quand on ne connaissait de Lise que son babillage et qu’on ignorait encore qu’avec elle les secrets étaient bien gardés.
« Aussi limiterons-nous les ouvrières sur cet ouvrage. Marguerite, naturellement. Louise… a des doigts de fée mais une langue bien pendue… Tant pis, nous ferons sans elle, et nous prendrons Justine. La chère petite travaille bien, et a suffisamment peu d’esprit pour ignorer tout de cette affaire. Disons jeudi, neuf heures ? »
Lise n’avait pas de calepin, elle. Elle donnait ses rendez-vous à la volée, persuadée de les retenir, et les oubliait aussi vite. Heureusement que Marguerite veillait. Chaque jour, elle lui rappelait discrètement ses obligations, ce qui faisait pousser de grands cris à son employeuse : « Seigneur, j’avais complètement oublié ! Est-ce possible ! »
Aux derniers mots d’Yvonne, elle fit mine de s’indigner et repoussa ses inquiétudes d’un geste vif de la main :
« Mais bien sûr que je vais répondre à cette commande ! Comment voulez-vous que je refuse d’habiller un modèle pareil ? »
Elle fit un pas vers Yvonne, chaleureuse :
« J’ai ma petite idée, maintenant. Je vous montrerai cela jeudi, vous aimerez beaucoup. Je m’occupe de votre succès en soirée, occupez-vous de votre triomphe sur scène ! Il faut qu’il soit, lui aussi, moderne et audacieux, n’est-ce pas ? »
Elle n’y croyait pas une seconde, bien sûr. Les critiques seraient sans doute impitoyables. Un spectacle ringard servi par une mauvaise actrice, cela n’avait guère de chance d’enthousiasmer les esthètes. Tout au plus quelques journaleux libidineux loueraient-ils la présence scénique de mademoiselle Galant. Comprendre, les formes désirables et le regard de biche.
« J’aimerais beaucoup vous voir jouer, vous savez… Peut-être même que cela m’aiderait à concevoir votre robe… Enfin, j’imagine que cela ne me sera pas donné de sitôt, si votre répétiteur est seul autorisé à vous approcher… »
En parlant, elle s’était penchée vers la petite table et, soulevant l’enveloppe qu’avait déposée Yvonne en arrivant, elle l’entrouvrit pour estimer son contenu.
« Voilà qui devrait nous permettre d’avancer un peu. Je crois, mademoiselle Galant, que je ne vais pas vous retenir plus longtemps. Dites bien à monsieur Alfred que votre toilette est entre de bonnes mains. Pour le reste, eh bien… c’est à lui de jouer, n’est-ce pas ? Et à vous, bien entendu ! » conclut-elle dans un sourire. |
| | | Pierrot LunaireLa bouche clownesque ensorcèle comme un singulier géranium
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| Sujet: Re: Mystère de la création Sam 3 Mar - 10:26 | |
| | La transaction touchait à sa fin, en effet. Yvonne hocha la tête, grave, alors qu'on abordait définitivement les choses sérieuses. Elle tentait même de retenir les noms des demoiselles que la couturière énumérait, d'un air concerné ... Marguerite ... Louise - non, pas Louise ! Justine. Elle saurait qui devait s'occuper d'elle, et qui ne serait pas à sa place, c'était déjà ça.
- Je viendrai donc jeudi, Madame et nous ... Comploterons encore, si j'ose dire.
Elle sembla se délecter en prononçant ce mot. Puis elle ajouta, un peu plus gênée : - Je ne suis pas sûre qu'il soit possible d'assister aux répétitions ... Cependant j'en parlerai, croyez-moi ... Dans tous les cas, je serais ravie que vous assistiez à la première, nous vous enverrons une invitation. Comme ça, vous mesurerez votre triomphe directement, c'est mieux, n'est-ce pas ? | Puis, se levant et prenant sa capeline : - Mais ce n'est pas tout, c'est en effet à moi de jouer maintenant ! Madame, - elle s'inclina - C'est un plaisir que d'avoir affaire avec vous. Se dirigeant vers la sortie, elle s'arrêta cependant et, prenant exemple sur les grands gestes et l'air élevé de Mme Sarah Bernhardt, elle ajouta d'une grosse voix et d'un air pompeux : En scène, maintenant ! Il est temps d'exercer mon aaaart ! Cette jeune femme, pour son plus grand malheur, avait parfois des éclairs d'intelligence ... Mais elle était incapable de rester admirable plus de deux minutes d'affilée. - Spoiler:
Tu me diras si je peux clore. :)Dans le cas où tu aurais l'occasion de jouer après ton départ, il est prévu que la première représentation soit jouée - Lise ne serait pas la seule invitée. ^^
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| | | Lise ChampmézièresElle court, elle court, la cousette !
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| Sujet: Re: Mystère de la création Sam 10 Mar - 2:26 | |
| « Je viendrai volontiers, bien sûr. » Lise raccompagna sa visiteuse à la porte et, un peu surprise, assista à la mise en scène de son départ. « Eh bien, puissiez-vous trouver l’inspiration ! » lança-t-elle un peu au hasard, tandis qu’Yvonne disparaissait déjà. En refermant la porte, la couturière semblait légèrement inquiète. La sortie de mademoiselle Galant laissait perplexe, en fait. Néanmoins – et Lise se rassit pour songer à son aise –, néanmoins la métamorphose accomplie entre l’arrivée et le départ de l’actrice méritait d’être reconnue. Il y avait peut-être un potentiel à creuser… Il fallait donc prier pour qu’Athys ait une pelle solide, et sache creuser au bon endroit. Lise soupira doucement. Quelle guigne. Elle avait espéré que son commanditaire serait un peu plus… disons moins… Enfin, c’était ainsi. Et elle chassa vivement toute trace de déception. Spectacle raté ou non, le tout Paris verrait l’œuvre Champmézières et c’était tout ce qui comptait. Cela comptait même grandement. Ainsi, de nouveau guillerette, Lise sauta sur ses pieds et courut sonner généreusement – frénétiquement, pesterait Marguerite. Il était temps de mettre de l’ordre dans cette pièce. - Spoiler:
Tu peux clore ! Merci pour cette Yvonne tout à fait rafraîchissante
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| Sujet: Re: Mystère de la création | |
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