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 Revue de presse n°5

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Pierrot Lunaire
La bouche clownesque ensorcèle comme un singulier géranium
Pierrot Lunaire

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MessageSujet: Revue de presse n°5   Revue de presse n°5 EmptyMar 24 Avr - 3:15

Revue de presse - Début du mois d'avril 1896


LE FINANCEMENT DE LA BOMBE DE L’OPÉRA RÉVÉLÉ !

    La révélation est de taille : la Police a trouvé d'où venait le financement de la Bombe de l'Opéra qui avait tant impressionné par son amplitude. Cela commença par un drame qui eût pu figurer dans les faits divers : ce matin à huit heures, Monsieur Horace Huchon est découvert inconscient par sa domestique, Denise Rougeault. Ne réussissant pas à réveiller son maître, Denise alerte les voisins, un médecin est appelé, la Police arrive ... A côté du lit, on retrouve un flacon de chloral*, bien entamé. La révélation est de taille : Monsieur Huchon, connu pour sa droiture et sa dévotion, aurait donc tenté de se suicider ...

    Cette hypothèse est corroborée par une lettre que l'on découvre bientôt, soigneusement pliée en quatre et déposée sur un guéridon. On y lit les mots suivants :

      « On m'a fait croire qu'une explosion du centre de la vie mondaine permettrait un retour à l'ordre et à la morale, comme sous le gouvernement du si regretté Mac Mahon. Mensonges ! J'ai financé malgré moi l'entreprise d'un petit ambitieux qui n'a rien d'un homme du monde.

      Je me suis confessé à un prêtre qui, en homme religieux, gardera le silence. Mon âme est en paix, et je veux quitter ce monde dans lequel confiance et respect sont devenus des mythes. Vous trouverez ci-joint les dispositions que j'ai prises avec mon notaire. »


    A la suite de cette étrange révélation, la Sûreté a vérifié les comptes de Monsieur Huchon ... La surprise est de taille : l'on constate en effet de fréquents retraits d'argent, commencés il y a un an, achevés en janvier 1896, pour un destinataire inconnu. L'équipe de M. Roche, persuadée qu'il s'agit bien de l'argent qui a financé l'attentat au palais Garnier, s'attèle à retrouver le chemin de ces fonds.

    Le suicide de Monsieur Huchon, s'il vient couronner d'horribles erreurs, ne doit cependant pas nous faire oublier qu'il avait servi sous notre drapeau en 1870, et qu'il avait apporté un soutien sans faille à la fondation de la République. On peut mesurer l'étendue de la crise des valeurs qui fait trembler notre monde, quand des conservateurs aguerris, parangons de morale, faute de trouver satisfaction dans l'état social, se mettent en toute inconscience à financer des trublions et des anarchistes ...


    Citation :
    * Mélangé avec de l'eau, le chloral est un puissant sédatif. En prendre une trop grande quantité peut se révéler mortel.
Le Grand Journal, 4 avril 1896

CHRONIQUE : LES FEMMES DE NOTRE TEMPS
Madame Le Roux, ou la dignité du deuil.

    Nous rencontrons, en ce jour, une femme bien différente de celles qui font habituellement notre chronique. Elle est cependant tout aussi digne, sinon plus, que l'excentrique comtesse de Beaumont ou l'intransigeante duchesse de Lambresac. Madame Le Roux n'a jamais fait les frais de la presse, et menait une vie modeste à l'abri des regards, dans un ménage heureux, jusqu'à ce que la tragédie de l'Opéra la touchât de plein fouet. Encore en deuil de son mari, elle accepte cependant de nous recevoir pour évoquer son souvenir, sans manières, dans le boudoir où elle nous accueille.

    La pièce est à l'arrière de la maison, et est éclairée par une grande fenêtre par laquelle perce la lumière froide de ce début d'avril. Une imposante bibliothèque occupe tout le mur, au fond de la pièce, et un bureau de chêne massif se présente, froid et vide, comme une pierre tombale. La rigueur et la simplicité de la pièce laissent deviner, à chaque instant, une présence masculine, rationnelle ... Et Madame Le Roux, dans sa petite robe noire, semble d'autant plus femme et fragile, dans ce cadre qui n'est pas le sien. Nous remarquons une peinture, accrochée au mur, et que l'on a recouverte d'un drap : nous supposons que Madame Le Roux a fait couvrir le visage de son défunt mari, sans se résoudre encore à décrocher le cadre ... Touchante expression de la dévotion d'une femme pour son mari.

    Après avoir assuré Madame Le Roux de notre profond respect et lui avoir adressé nos condoléances, l'entretien commence. A notre question sur sa fréquentation de l'Opéra, elle répond qu'elle en était une fervente habituée. « Oui. Je ne manquais presque aucune représentation. Je m’y rendais parce que j’appréciais véritablement le spectacle qui se déroulait sur scène. J’ai toujours apprécié les grands auteurs classiques – je pense ici à Molière, Racine ou Corneille. Enfin, je ne vous cacherai pas que c’était aussi un lieu de rencontre très prolifique. C’est aussi cela qui me manque. »

    Avec précaution, nous l'invitons ensuite à évoquer son mari. Visiblement émue, elle déglutit et, sans oser nous regarder, toujours très modeste, elle commence à parler de l'homme dont la présence plane dans toute la pièce : « M. Le Roux est homme de loi, un grand avocat. Il suit les traces de son père, l’honorable Charles Le Roux, juge à la Cour de cassation. C’est un homme incorruptible, respectable et très intelligent. Un homme très occupé par son travail, travail qui lui tient véritablement à cœur... La justice c’est toute sa vie. Je pense qu’il ... sera impitoyable avec ceux qui... qui ont provoqué cette tragédie. – Ô pauvre femme en deuil, qui évoque son mari disparu comme s'il était toujours vivant ! – Sinon, il est d’une agréable compagnie, toujours avenant. Il a toujours le mot juste. Il sait être sérieux quand il le faut et faire sourire même les plus revêches quand l’ambiance devient morose. C’est un homme fondamentalement bon et généreux. »

    Nous hochons la tête, grave. La douleur de Madame Le Roux est bien visible, mais c'est une douleur digne. La maison semble d'ailleurs s'en être imprégnée : point de fleurs, de panier à ouvrage dénotant d'une détente agréable. C'est d'une austérité presque protestante. Nous évoquons alors avec elle les messes, que certaines femmes en deuil ont fait prononcer, pour les âmes des disparus. A notre grande surprise, elle ne semble pas prendre cette démarche en bonne part : « Chacun vit son deuil comme il le peut et il va de soi que célébrer une messe en leur mémoire peut être salutaire pour ceux qui restent – moi je n’y aie pas pris part. Je considère que le deuil doit se vivre seul, en retrait et dans la plus grande sobriété. Une cérémonie en grande pompe serait vraiment répréhensible. » Son regard est étonnamment dur et sévère. Avec une telle rigueur de morale et de conduite, nous supposons que Madame Le Roux ne voit pas la rapide ouverture de l'Eden d'un bon œil. Elle y vient :

    « L’ouverture du nouveau théâtre fut définitivement trop rapide. J’en étais d’ailleurs abasourdie quand j’ai lu la nouvelle par hasard dans Le Grand Journal. Vous comprendrez que dans mon délaissement de la vie mondaine, les nouvelles m’arrivent souvent avec quelques jours de retard.

    La population traverse une difficile épreuve. En de telles circonstances, se divertir impunément en assistant à des spectacles presque frivoles n’est-il pas un peu inapproprié? C’est ce que je crois. C’est vouloir oublier trop vite, effacer de nos mémoires ceux qui sont disparus. Et puisque vous abordez le sujet, je crois que ce n’est pas un endroit digne d’accueillir les spectacles de l’Opéra Garnier. Je ne sais pas quand je m’y présenterai... je ne sais même pas si je m’y présenterai. »


    Elle s'arrête, visiblement prise de vertiges. Puis d'une voix qui tremble un peu, étouffant ses larmes qui voudraient se montrer mais qu'elle semble vouloir cacher, par pudeur, elle conclue : « Je suis très réticente à l’idée de me retrouver à nouveau dans une salle de spectacle... je... je ne sais pas si j’en serais capable. Les souvenirs sont si tangibles. C’est trop tôt. Beaucoup trop tôt. »

    Nous remerciâmes Madame Le Roux pour son courage, et nous engageâmes à publier ce qu'elle avait dit sans en retrancher le moindre mot. C'est sans doute un risque qu'elle prend, mais une parole d'un sentiment digne et austère n'est jamais de trop dans ces temps où l'on oublie tout si vite. On n'a pas le temps d'être inconsolable à Paris, disaient de mauvais plaisants ... Madame Le Roux, dans son silence et sa solitude, semble être la preuve du contraire.


Spoiler:

La Presse du soir, 3 avril 1896


Dernière édition par Pierrot Lunaire le Mar 24 Avr - 3:45, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Revue de presse n°5   Revue de presse n°5 EmptyMar 24 Avr - 3:19


FAIT DIVERS
Le ventre de Léviathan

    Que de choses Paris recèle en ses flancs, choses inconnues, étranges, macabres, que le hasard, un jour, nous révèle, étale à nos yeux !
    Depuis quelques jours, de nombreux ouvriers exécutent des travaux de terrassement avenue Henri-Martin, dans un terrain appartenant à Mme la comtesse de Beaumont qui doit faire construire en cet endroit un hôtel et une salle de théâtre*.
    Or, hier matin, en creusant les fondations de l'hôtel, les ouvriers ont découvert une quantité considérable d'ossements humains, crânes, tibias, fémurs.
    Les ossements ont été soigneusement recueillis par les soins du commissaire de police du quartier, M. Bacot, et le conservateur du cimetière de Passy, M. Judot, a fait creuser dans le cimetière une large et profonde tranchée, où ils ont été déposés. On évalue à une cinquantaine le nombre de squelettes trouvés dans ce terrain.
    D'où proviennent ces ossements ? On croit, et c'est chose à peu près certaine qu'ils doivent remonter à l'époque de la guerre et des événements de 1871 ; car on a trouvé à proximité des squelettes des boutons d'uniforme de gardes nationaux et d'artilleurs.

L’Écho de Paris, 6 avril 1896*

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