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 Avec un gant de soie...

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Charles-Armand de Lonsay
Dandynosaure
Charles-Armand de Lonsay

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MessageSujet: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyLun 25 Juin - 22:20

Avoir un accroc à sa chemise faisait partie des pires hantises de Charles-Armand. Un accroc, ou une tache, ou un défaut, ou une imperfection, ou tout simplement une entorse à la perfection de rigueur, voilà ses hantises vestimentaires. Sans parler, bien évidemment, des couleurs criardes et des autres horreurs du temps.

Or, c'était justement pour une petite retouche à une chemise que Charles-Armand avait été amené à fréquenter la boutique de la couturière Lise Champmézières, il y a désormais quelque temps. Depuis lors, il avait pris en affection la petite boutique, la gentillesse des employées et de la patronne, sans parler de la qualité de la confection. Et il était revenu plusieurs fois, quand bien même cette boutique était essentiellement dédiée aux femmes.

Oui, il y était revenu lui-même, en personne, au lieu de déléguer ses gens. La raison en était fort simple : si chercher un vêtement commandé était à la portée de tout le monde, parler chiffons en amateur éclairé s'avérait déjà beaucoup plus difficile - à ses yeux - pour le commun des mortels. Or, comme il n'était pas le commun des mortels...

En ce calme jour de début de printemps, le vicomte avait eu envie d'ajouter une nouvelle pièce à sa garde-robe. Pour ce faire, il lui fallait examiner les étoffes, réfléchir, prendre son temps... Bref, tout ce qu'il y a de plus naturel ! Et comme il avait rendez-vous avec la Champmézière et son employée principale, le vicomte avait décidé d'arriver avec un peu d'avance. Il profiterait du temps ainsi obtenu pour jeter un oeil sur les étoffes et songer à sa prochaine acquisition.

Quand il entra, accompagné de son valet, dans le salon de la couturière, celle-ci était occupée avec une cliente. En guise de salut, préférant ne pas les déranger, le vicomte se contenta d'un sourire à la couturière, tandis que l'autre femme lui faisait dos. Sans plus s'embarraser de leur rendez-vous, Charles-Armand commença à promener ses regards sur les étoffes qui l'entouraient, lorsque son oeil se posa sur un petit objet, à terre... Un petit objet blanc. Il n'était pas du genre de la couturière de laisser trainer ses affaires, ou du moins, il n'était pas du genre de la couturière de laisser trainer ses affaires dans le salon où elle recevait ses clientes, pourtant...

Notre dandy se pencha en avant, attrapa l'objet entre ses mains gantées, s'aperçut que c'était un petit gant étroit de soie blanche... comme celui qu'avait à la main gauche la dame inconnue dont il n'avait pas encore vu le visage. D'ailleurs, celle-ci semblait avoir bientôt fini sa commission... Il attendit donc qu'elle en finisse avec toute cette affaire de chiffons pour l'aborder.

"Pardonnez-moi, madame...", fit-il en haussant un peu le volume de sa voix d'ordinaire basse, je crains que vous n'ayez perdu ceci.

Et la dame, heureusement, se retourna...

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Catharina de Fréneuse
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyVen 6 Juil - 3:20

On sera toujours étonné de la vitesse à laquelle les jeunes enfants grandissent, tout en ayant l’air de rester minuscules. Cette croissance exagérée que vivait mes quatre poupons changeait bien des choses au fil des mois : Pour benjamin, une nourriture plus variée, pour cadet, moins de jouets plus de connaissances et pour les deux autres… Ils s’en sortaient relativement bien, si on oubliait leurs douleurs aux jambes qui apparaissaient à des moments incongrus. L’été se faisant bientôt sentir, il fallait faire préparer à ses petits marmots quelques nouveaux habits. Ne pouvant pas tasser quatre enfants qui brouillent dans une maison de couture, je m’étais contentée de prendre grossièrement leurs mesures. La joie de Honey étant contagieuse –il avait gagné quelques centimètres, oui !- je pouvais me rendre en ville apaisée, sans craindre quoi que ce soit.

J’entrai dans la boutique et survolai l’ensemble de mes yeux bleus. Je saluai la couturière d’un signe de tête –celle-ci devait sans doute en avoir marre de me voir- et me dirigeai d’abord vers les étalages de tissus. Je regardai d’abord leur couleur et motifs, puis retirai mon gant pour palper entre mes doigts leur texture. J’en touchai plusieurs pour trouver la plus douce et la plus confortable. Réunir ces critères rendaient mes enfant heureux, eux qui n’aimaient pas les tissus rugueux –ceux qui grattent- et aimait pouvoir bouger à leur aise. Comme ça, j’en sélectionnai quelques-uns, trouvai même une jolie dentelle qui ferait un rebord parfait pour ma fille. Je regardai également les rubans et autres décorations plutôt enfantines.

J’allai m’entretenir avec Lise, lui faisant part de ma commande. Beaucoup de petits morceaux, rarement pour moi, qui avais déjà tout ce dont elle avait besoin. Mon mari n’en finissait pas de m’acheter robes et chapeaux –c’est ainsi que l’on achetait une femme, semblait-il- et, même si certaines faisaient encore très anglaises, je me plaisais à les porter. Je tendis à la dame le bout de papier sur lequel étaient inscrit le nom, l’âge et les différentes mesures de mes enfants et elle nota dans un coin de sa tête les tissus et autres frivolités que je lui dictais. Malgré toutes les indications, Lise savait que je pouvais lui faire confiance et que, de ces étoffes sans formes, en ressortiraient de jolies petites tenues pour les bambins Ainsworth.

Je saluai la couturière et, entendant une voix fluette à mon oreille, me retournai. Je le dévisageai un moment avant de baisser les yeux sur mon gant blanc. Surprise, je vérifiai d’abord sur moi, pensant l’avoir gardé dans un pli de ma robe mais je me rendis vite compte qu’il était parti. Je tendis lentement la main et attrapai le gant doucement avant de lever les yeux à nouveau vers l’homme qui, loin d’être petit, faisait pourtant ma taille. « Je vous remercie, je… » Je baissai la tête et enfilai aisément le gant que j’avais échappé. J’esquissai un fin sourire, j’aurais bien pu le perdre à tout jamais ! « …suis bien bête de l’avoir échappé. » J’époussetai distraitement l’envers de ma main, retirant les poussières invisible que le gant aurait pu attraper en trainant parterre.
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Charles-Armand de Lonsay
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyVen 13 Juil - 14:19

Quand la dame se retourna, elle lui fit l'effet... Pouvait-on dire, d'une apparition ? Jusque-là, il ne l'avait vue que de dos, et bien distraitement : robe claire, d'apparence sobre, chevelure blonde, une voix feutrée... et c'était tout. Il devait également avouer n'avoir, jusqu'à la découverte du gant, prêté aucune attention à la jeune femme. La concupiscence n'était pas dans son caractère, tout simplement, et avait-il seulement déjà envisagé qu'on puisse regarder une femme étrangère sous un autre angle ? Cela même était douteux. À sa décharge, il avait essentiellement eu commerce avec sa mère, ses soeurs, les amies de sa mère et les domestiques... Et comme on avait peu cherché à le marier (ou que, plus exactement, sa mère était morte avant d'avoir pu trouver une épouse digne de son fils), comme lui-même n'y attachait pas de réelle importance, la question était tout simplement restée en suspens. De même que ses relations à la gent féminine. Les spécimens de femme qui lui étaient donnés à voir n'étaient, en outre, généralement pas de nature à encourager le vicomte à changer d'opinion...

Et voilà que celle qui se tournait vers lui ne ressemblait pas aux autres, pas du moins à celles qu'il connaissait. Non, elle était élégante, mieux, elle était élégante au sens exact où il entendait ce terme : la simplicité est la plus raffinée des sophistications. Quelle différence par rapport à certains accoutrements féminins ! Il en était médusé, ce qui revenait à dire qu'il était encore plus intimidé que d'habitude. Par conséquent, le gant reposait encore dans sa main tremblante et légèrement tendue lorsqu'elle le reprit - après avoir vérifié dans sa jupe, par acquit de conscience - et le remit en rougissant, la tête un peu baissée. À vrai dire, plus le vicomte la voyait, et plus sa physionomie lui rappelait quelque chose... mais quoi ? Ou, plus exactement, mais qui ? Peut-être l'avait-il déjà croisée, au fond... mais où ? Voilà bien des questions...

- Je vous en prie, madame... C'était tout naturel..., dit-il d'une voix beaucoup plus ténue que celle dont il l'avait interpellée. Puis, se ressaisissant un peu : Vicomte Charles-Armand de Lonsay, pour vous servir... Peut-être nous sommes-nous déjà croisés ?...

Ah, cette timidité ! Elle semblait atteindre autant l'un que l'autre des interlocuteurs... En même temps, le vicomte continuait à se demander où il avait bien pu la voir, avant. Elle, ou... un de ses proches ? Ne ressemblait-elle pas à l'un des invités de la duchesse de Lambresac ? Un Scandinave, qui avait un accent proche du sien, plus prononcé peut-être... Mais, d'un autre côté, tous les Scandinaves ne se ressemblaient-ils pas dès lors qu'il était question d'être de haute stature et de cheveux blonds ?

Vraiment, cette impression de déjà vu le laissait perplexe...

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Catharina de Fréneuse
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyDim 15 Juil - 16:30

Cet homme n’était pas vêtu comme les autres. Je ne saurais dire ce qui clochait, d’où sortait ces habits, mais ils n’étaient pas communs. Il est vrai que je voyais peu d’hommes, majoritairement confinée chez moi ou à des après-midi entre dames et jeunes filles, mais ceux que je voyais défilé étaient beaucoup plus sombres. Voilà que je venais de trouver un compère qui n’était pas à la mode, ou du moins, pas celle de Paris de 1896. Pourtant, ce n’était pas moi qui manquais de robes, mais je n’arrivais pas à totalement changer de garde-robe. De la Suède-Norvège à l’Angleterre, de l’Angleterre à la France, cela faisait beaucoup, beaucoup de vêtements que l’on ne devait plus porter.

J’acquiesçai de la tête, sans relever les yeux pour le moment. « Hm.. Oui, merci. » Dis-je avec une voix qui, suivant la sienne, devait avoir l’air de messes-basses. Lorsqu’il se présenta, je daignai de le regarder, levant de grands yeux turquoises sur lui. J’esquissai un mince sourire, discret mais sincère. Vicomte Charles-Armand de Lonsay. J’ignorais où se situait Lonsay mais je n’avais jamais vu cet homme. Peut-être m’avait-il aperçu en compagnie de mon mari ? Lui qui trainait un peu partout, cela pourrait être possible. J’étais cependant convaincue de n’avoir jamais rencontré ce vicomte et de ne pas ressembler aux autres parisiennes qu’il avait dû croiser dans sa vie. « …Madame Catharina Ainsworth. » Je pinçai mes lèvres brièvement et détournai mon regard pour le perdre sur la pièce, avant de revenir au Vicomte nouvellement présenté. « Je ne crois pas que nous nous soyons déjà croisé… » Je me permis d’étirer un peu mon sourire, mais ma voix demeurait basse et douce. « Quoi que… Maintenant, si. »

Je m’écartai de quelques pas sur le côté pour laisser passer un client de la Maison de Couture, je ne lui jetai pas même un coup d’œil, désintéressée. Après mes précédentes phrases hachées, lancées entre plusieurs souffles de timidité, je relançai des mots avec plus de tenue, ou du moins, avec plus de sûreté, mettant ma peur des inconnus de côté. « Puis-je vous demander où nous nous serions possiblement croisé, Monsieur ? » Je n’étais pas une personne de nature curieuse, mais l’idée d’être associée à une autre femme, me perturbait.
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Charles-Armand de Lonsay
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptySam 21 Juil - 11:11

Ainsworth ! Il lui avait suffi de prononcer ce nom pour que, tout à coup, la mémoire lui revienne. Mais bien sûr ! Cette timide dame était l'épouse du vicomte Ainsworth, ce noble anglais arrivé depuis quelques années en France... Et l'endroit où il l'avait déjà croisée, ce devait être l'Opéra Garnier, avant sa sinistre destruction... Oh ! l'échange s'était limité aux salutations, comme il convient de faire lorsqu'on est en présence de quelqu'un de son rang mais qu'on connaît peu, mais tout de même ! Voilà enfin qu'il avait retrouvé l'endroit où il l'avait déjà vue, au moins une fois... Ni très récent, ni très précis, mais souvenir quand même...

Ce souvenir fugace lui étant revenu en mémoire, il constata qu'elle n'avait pas plus que lui gardé à l'esprit ce bref moment commun de leurs existences. Il ne pouvait guère lui en tenir rigueur (d'ailleurs, comment lui en vouloir, alors que toute sa personne respirait la douceur et l'humilité ?) et ce fut en hésitant un peu qu'il lui retraça les grandes lignes de la seule fois où ils s'étaient véritablement vus.

" Cela devait être... il y a deux ans, ou peu s'en faut. À l'opéra. Vous étiez en compagnie de M. le vicomte Ainsworth, que j'ai parfois l'heur de côtoyer... Oh ! ce fut bref, certes. Mais je crois me souvenir de vous en cette occasion... "

En cette occasion, oui. Et peut-être en d'autres. Plus il la voyait, plus il lui semblait se ressouvenir d'une femme qui lui ressemblait fort... en compagnie d'un ou deux enfants... dans les jardins de Paris, comme deux des Plantes, du Luxembourg, des Tuileries... Il n'avait pas manqué de la prendre pour quelque gouvernante. En raison de sa simplicité, sans doute. Mais, maintenant qu'il y repensait...

" Peut-être n'est-ce qu'une impression... Madame, je vous prie de me pardonner cette offense si mes dires vous blessent... Serait-il possible que... vous fussiez quelque jour dans quelque jardin de Paris... avec vos enfants ? "
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Catharina de Fréneuse
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyLun 23 Juil - 6:41

Monsieur Ainsworth était un homme qu’il était possible de croiser à peu près n’importe où. Autant beau monde que demi-monde, il avait des intérêts bien variés et il était impossible de satisfaire tous ses petits caprices en ne restant qu’à des endroits où trainaient les gens biens et respectables. Oh ! Ce n’était pas pour autant qu’il se laissait faire par les commentaires et critiques qu’il pouvait recevoir à son égard, Monsieur savait très bien se faire respecter, avec sa grande taille et sa voix forte –et surtout avec son caractère… particulier. Il n’était donc pas impossible que ce cher Vicomte de Lonsay l’eusse aperçu à l’Opéra.

Une certaine culpabilité me fit froncer les sourcils. Même si nous nous étions croisés l’espace de quelques minutes, ne serait-ce que pour échanger un signe de tête, il aurait été favorable que je me souvienne de cet homme… Ou du moins de son identité. Bredouille, j’hochai la tête, que je baissai ensuite, en signe de désolation. « Oh, me pardonnerez-vous, Monsieur… mais je ne m’en souviens toujours pas… » Il fallait aussi dire que, il y a deux ans, je parlais à peine le français. Au bras de mon mari, je me contentais de sourire subtil et d’hochements de tête, parfois il me faisait la traduction, mais pas toujours… Pas souvent, à vrai dire. Il fallait que je l’apprenne, cette langue ! Disait-il –et il le disait toujours- en commençant à me parler plus ce langage teeellement compliqué plutôt que l’anglais.

Charles-Armand reprit la parole et je me redressai pour le regarder, grands yeux interpelés posés sur lui. Je parus d’abord inquiète : Quelle horrible chose allait-il m’annoncer pour ainsi me prévenir d’une future offense ? Allait-il me confier qu’il m’avait confondue avec une femme de mauvaise vie qu’il eut aperçue un soir antérieur ? Heureusement, ses paroles enchainèrent avec une toute autre affirmation. J’adorais les jardins de Paris, je m’y rendais avec des amies et plus souvent avec les enfants. Eux aussi, aimaient bien l’endroit. Courir partout entre les buissons et les arbres leur dégourdissait les jambes. Et pour tout dire, je crois que la majorité des personnes m’ayant « Croisés » peuvent affirmer m’avoir vue là-bas. Entre les salons et les jardins, je choisissais de loin les jardins.

« Oui, c’est tout à fait possible, Monsieur. » Je me permis un sourire, mes enfants, je ne savais pas pourquoi, me donnaient toujours un peu plus d’assurance. « Je m’y rends souvent, avec eux… » Et puis, un peu plus à moi-même, distraite, je continuai. « …Ils adorent les grands jardins… » L’envie d’accourir chez moi pour les revoir germa dans mon esprit, mais je ne le montrai pas. Je me déplaçai sur le côté, faisant quelques pas pour laisser le passage à une autre dame qui avait à faire dans ce coin-là.
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyDim 29 Juil - 5:24

Étrange, parfois, comme les mentalités pouvaient varier selon l'origine ou les habitudes ! Il avait cru froisser la délicate personne qui lui faisait face en mentionnant sa présence avec ses enfants dans un jardin, tant cela pouvait sembler... bassement populaire aux yeux d'un Parisien pure souche habitué à voir les enfants avec leurs gouvernantes, et cette inquiétude avait sans doute fortement inquiété madame Ainsworth. Pourtant, la mention de ses enfants ne semblait pas du tout l'avoir dérangée, même si sa phrase avait pu laisser sous-entendre qu'il l'avait prise pour une gouvernante... Au contraire, elle semblait éprouver un véritable amour maternel à leur égard, ce qui se voyait à son teint soudainement plus animé, plus confiant, ainsi qu'à l'espèce de retenue rêveuse qu'elle mettait à en parler...

Un instant, il se prit à penser à sa "triste" situation de célibataire, à se demander si un jour il aurait la "joie" d'être père, de donner à la dynastie - encore bien récente ! - des Lonsay un héritier... Encore lui faudrait-il pour cela une épouse digne de lui, ce qui pouvait se trouver... Et surtout, encore fallait-il qu'il osât la courtiser, la demander en fiançailles, puis en mariage... Oh ! voilà qui serait bien trop complexe, assurément... trop intimidant... Tellement intimidant qu'un peu de timidité empourpra ses joues alors même qu'il n'avait absolument aucune raison de l'être en la circonstance. Comme l'avait fait son interlocutrice, il s'écarta un peu pour laisser passer la clientèle de la couturière.

" Comme vous semblez heureuse d'être mère... " ne put-il s'empêcher de dire d'un ton rêveur. Cette phrase n'avait d'ailleurs rien de péjoratif : comment aurait-il pu dénigrer ou admirer cette situation, qui lui était particulièrement inconnue, à la fois de par son état d'homme et de célibataire. Certes, ses soeurs avaient eu des enfants, mais il les voyait fort peu et n'avait jamais vu Adélaïde ou Mathilde particulièrement ravies de cet état de fait... Au fond, peut-être, sans doute même ! n'était-ce qu'une question de tradition et de culture. Mais ce changement-là lui semblait particulièrement intriguant. Et son regard semblait prier son interlocutrice de lui en dire plus.
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyLun 30 Juil - 15:02

Je ne relevai pas les rougeurs sur ses joues. Sa peau était tellement pâle –presque maladive- que ce n’était pas surprenant de la voir s’empourprer. Je ne pris même pas la peine de me demander pourquoi il avait rougi aussi subitement. À vrai dire, mon peu d’empathie me rendait indifférente, Monsieur le Vicomte pouvait bien faire trotter ce qu’il voulait dans sa tête, au risque de se trahir. Malgré les violentes bousculades auxquelles je faisais face une fois chez moi, à l’hôtel particulier, je paraissais toujours aussi absente, comme si j’étais seul et que je n’étais pas réellement en train de parler à quelqu’un. Néanmoins, je levai les yeux vers lui, un sourire illuminant mon visage. Heureuse d’être mère ? Ces temps-ci, il s’agissait bien de la seule chose qui me rendait belle et bien heureuse, oui. Sortir m’effrayait, les parisiens étaient intimidants. Rester seule chez moi, à errer, n’était pas mieux : Lorsque mon mari daignait rentrer, il me jetait de ses regards froids, presque meurtrier. Comme si nous étions des inconnus, des ennemis. J’avais toujours su accepter ses sautes d’humeur, ses insultes, sa violence psychologique, mais ça devenait de plus en plus difficile. À chaque fois que je voulais craquer, je pensais à mes enfants qui avaient besoin d’un père, d’un toit et de trois repas par jour. Je pouvais survivre aux coups de mon mari, mais son courroux était beaucoup trop fort pour mes frêles enfants, encore innocents.

Néanmoins j’hochai la tête avec un brin de vie. « Effectivement… » Je ne savais point quoi ajouter, les enfants avaient toujours été une source d’ennui profond chez tout et n’importe qui. Les enfants, il fallait les exclure : Ils étaient dérangeants. Je me sentais bien seule à ainsi réjouir des petites choses qu’ils accomplissaient chaque jours. Peut-être étais-je surprotectrice parce que j’avais quelque chose à compenser. Que je leur donnais de l’attention comme j’aimerais en recevoir, ou bien que l’on me traite comme je traite mes chérubins : Avec respect. Instinctivement, je tirai sur le bout d’une de mes manches, dissimulant mon poignet. « Oh mais, vous savez… Je suis certaine qu’être père doit créer le même sentiment… » Comme pour me rattraper, le Vicomte ne pourrait sans doute être maman, un jour. Pouvait-on vraiment comprendre avant de le devenir ? Une pensée, néanmoins, s’échappa de mes lèvres. « …Quand on trouve le temps… » Quand votre fils à plus d’affinité avec un domestique illettré que son propre père, fort et fier, il y avait un problème, selon moi. Secrètement, j’éprouvais une certaine colère face à mon époux qui ne savait se faire connaitre de mes enfants, ne leur inspirant que de la peur et de l’autorité. Surtout depuis plusieurs semaines, ils ne recommençaient à souffler que lorsqu’il quittait la maison.
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyLun 13 Aoû - 11:15

Créer le même sentiment... lequel ? Et trouver le temps... pour quoi ? Des questions qui, manifestement, resteraient en suspens pendant encore un bon moment. Après tout, il ne risquait pas trop d'être père avant un bon moment... Et tout cela, sans parler du fait que ceux de ses amis qui avaient l'heur d'être pourvus d'héritiers ne semblaient pas vraiment considérer cela comme une bénédiction, excepté peut-être pour ce qui est de transmettre un nom, une lignée, un métier, une collection ou que sais-je. Excepté la fierté de transmettre tout ce qui est transmissible à un héritier, quelle fierté pouvait-on donc tirer de la paternité ou de la maternité, quel pouvait donc être ce sentiment dont la vicomtesse parlait ainsi ? Une question de plus dans le tas des interrogations sans réponse. Malheureusement. À moins d'un miracle...

Seul un petit détail avait fait sourciller le vicomte, un petit geste distrait, celui de remonter sa manche sur son gant... comme si rien de son corps ne pouvait se voir, même pas la plus fine lamelle de chair, excepté son visage encadré de blond... Il n'hésita pas à attribuer cette attitude à une pudeur de femme bien éduquée, peut-etre même un peu trop bien, et ne remarqua pas la marque bleuâtre que le poignet en question portait. De tout cela, il ne retenait qu'une seule chose, c'était que leur timidité commune freinait largement le dialogue qui pouvait s'établir entre eux deux... Peut-être d'ailleurs la dame souhaitait-elle prendre congé ? Peut-être la retenait-il importunément ? Sans doute avait-elle d'autres choses à faire que de discuter stérilement avec lui, n'est-ce pas ? Presque honteux de la conduite qu'il pouvait avoir eue à son égard, il lui posa la question.

" Mais je vous importune, sans doute... ", fit-il après un moment de silence dans la conversation. " Vous devez avoir hâte de retrouver vos enfants... "
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Thalie
Mademoiselle Clairon
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyLun 20 Aoû - 8:24

Marie-Madeleine Pentois, fille à marier

"La duègne" (ce n'était nullement son vrai nom, mais Marie-Madeleine trouvait qu'il lui allait à ravir) avait appliqué sa main sèche sur la peau tendre de l'enfant.

— Jeune fille, votre trousseau.

Marie-Madeleine avait tenté d'amadouer la vieille femme, mais rien n'y fit. Il fallut se rendre dans la maison de couture afin d'acheter ce qui manquait à ce trousseau qui semblait sans fin. Quelle sotte idée que de le confectionner alors même qu'elle n'avait encore aucun promis ! Mais les mères et les gouvernantes ont ce pouvoir de vous faire faire ce qu'elles veulent.

Elles avaient du finir par traverser la porte de cette maison de couture, connue dans tout Paris pour ses prix et sa qualité d’œuvre. Marie-Madeleine aurait pu trouver admirables les confections qui s'étalaient sous ses yeux, mais savoir qu'on venait là pour mener son trousseau - que dire sa prison ! - la chagrinait trop. Elle avait laissé "la duègne" s'enquérir auprès de la couturière. Au moins elle espérait qu'on n'allait pas la faire tourner dans tous les sens pour prendre ses mesures. Dieu qu'elle détestait ça !

    Au sein des rubans se fit voir une chevelure blonde que Marie-Madeleine connaissait. Cette dame elle l'avait déjà vue chez sa mère, laquelle avait voulu que son amie mette un peu de plomb dans la tête de sa fille. En grande perte ! Voyant là l'amie qui la sauverait du dragon, Marie-Madeleine accourut, relevant ses jupons pour ne pas tomber. Oubliant toute prestance et éducation.

    — Madame ! Cela est si bon de voir un visage ami ! (Marie-Madeleine était même à deux doigts de serrer les mains de Madame Ainsworth mais un rien de pudeur l'empêcha) Si vous saviez... Ma mère m'oblige à faire un trousseau, alors que je sors à peine du pensionnat ! Et elle m'a mis un dragon pour me surveiller, une vraie mégère.

    Les derniers mots avaient été prononcés d'un ton plus bas mais assez haut pour que l'homme accompagnant Madame Ainsworth l'entende. Marie-Madeleine n'en vit la présence qu'après s'être remise de son émotion. La rougeur vint sur ses joues virginales, et la jeune fille salua gauchement, gênée de se trouver devant un homme.

    — Veuillez m'excuser Monsieur, je ne vous avais point vu...
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyVen 24 Aoû - 13:36

Un sourire sur les lèvres, une voix douce « J’ai connu bien plus fâcheux que vous, vous ne m’importunez pas le moins du monde. » Le pire, c’était qu’il s’agissait là de la vérité. Parler à Charles-Armand, c’était comme parler à… un nuage, pour aller dans les images enfantines. Mon mari serait plutôt une roche, un gros caillou immobile qui n’écoutait rien, qui faisait mal lorsque vous le receviez sur la tête, mais Monsieur de Lonsay… Malgré le dialogue difficile, la timidité commune, il était plus doux, il paraissait beaucoup plus compréhensif. Néanmoins là se cachait sans doute quelque chose, on ne rencontrait pas un homme pouvant naturellement faire preuve de timidité et délicatesse. S’il était de la même branche que ces grands mondains, sans doute tentait-il de se faire valoir… avec la timidité ? Peut-être était-il tout simplement froid, distant. Certaines femmes me trouvaient tout particulièrement snobe, pour la bonne raison que je parlais peu, comme si je m’abstenais de gaspiller mes mots pour elles –ce qui n’était pas tout à fait faux- mais il s’agissait en fait d’un grande gêne et d’un malaise flagrant.

Et là, Signe ! Comme si je ne m’inquiétais pas suffisamment pour mes chéris, une jeune fille me tomba dans les bras, la charmante petite Marie-Madeleine. J’avais bien tenté de lui inculquer l’esseeence de l’épouse parfaite, mais notre conversation à plutôt dériver vers des sujets divers. Aujourd’hui, toute troublé par la brutalité de mon mari et de l’effondrement de mon petit monde, je ne saurais lui dire ce que doit faire une bonne épouse. À quoi on remplir ses devoirs et être attentionnée si on vous ruait de coup ensuite ?

« Marie-Madeleine, chérie, je suis heureuse de vous voir aussi. » Un sourire éclaira mon visage, les jeunes filles parlaient si librement en présence de certaines personnes, c’était bien mignon. Insouciante, persuadée que je ne répèterai aucun de ses écarts à sa mère. Un soupir s’échappa de mes lèvres, quelle insulte ! Un dragon, une mégère ! Marie-Madeleine aurait la vie bien dure, si elle insultait ainsi toutes les personnes qui lui déplaisaient. « Ma petite, vous ne devez pas parler de cette dame comme ça, voyons. » Je penchai vers elle, susurrant tout bas, toute à son intention. « …Même si elle est désagréable, mais il faut avouer que si vous étiez totalement libre de faire ce que bon vous semble, ça ferait d’elle une mauvaise domestique. Alors bon… ! » Je me redressai, et tournai lentement la tête vers le Vicomte. « Monsieur de Lonsay, je suis certaine, fera preuve de tolérance face à votre écart de comportement, pour cette fois-ci, n’est-ce pas ? » Regard à l’appui.

Des cheveux blonds et des yeux ronds, on pourrait croire que Mademoiselle était ma jeune sœur, ou bien ma fille –la violence et la fatigue me donnait quelques traits plus âgés. Cependant, il était évident pour moi que je ne ferais preuve d’autant de clémence avec ma propre fille, elle exigeait beaucoup de fermeté, la gamine. « Soyez sans crainte, ma chérie, je ne rapporterai rien à votre mère, mais tâchez de faire attention à l’avenir, d’accord ? » Ma voix, soufflée, laissait transparaitre l’empathie que je n’avais pas.
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptySam 25 Aoû - 14:19

Un tourbillon de tissu lui fit subitement hausser le sourcil.

Qu'est-ce que c'était que... ça ?

Une toute jeune femme, la vingtaine tout au plus, qui courait à la rencontre de madame Ainsworth, échappant à une gouvernante que le vicomte avait remarquée et qui discutait avec la couturière. Eh bien ! que de belles manières ! La lèvre du dandy se fronça quelque peu en signe de désapprobation, un signe qui ne cessa de s'accentuer alors qu'il l'entendait traiter la malheureuse domestique de mégère et de dragon. Tss ! Cette jeunesse ! Aucune éducation ! Feue la vicomtesse de Lonsay n'aurait certes pas laissé passer de telles choses à ses filles !

Visiblement, la vicomtesse Ainsworth avait les mêmes principes que feue Louise de Moroges, vicomtesse de Lonsay. La voilà en effet qui sermonnait la jeune fille, avec raison qui plus est, mais sans doute avec un peu trop de douceur ? Sans doute la demoiselle n'était-elle pas sa fille - les enfants de la vicomtesse semblaient bien plus jeunes, et la demoiselle paraissait un peu trop âgée pour être leur soeur, tout de même... -, peut-être lui était-elle apparentée. Quelle curiosité, d'ailleurs, se morigéna-t-il, que de penser à de pareilles choses ! Après tout, c'était censé lui être plus qu'égal, n'est-ce pas ? La preuve, il s'était même légèrement détourné pour laisser les deux femmes discuter ensemble, et seule la voix de la vicomtesse lui refit tourner véritablement les yeux sur la petite jeune femme.

"Certes", répondit-il à la vicomtesse lorsqu'elle lui demanda s'il laisserait passer la "petite" entorse aux convenances qu'avait fait la demoiselle Pentois. De toute manière, il ne lui revenait pas de tenir de longs sermons aux enfants. Il n'était pas femme, il n'était pas mère, il n'était pas tuteur, il n'était pas domestique, il n'avait aucune raison de s'auto-proclamer moralisateur comme ça. Son visage plus sévère et fermé qu'il y a peu encore suffisait à manifester la désapprobation qu'il pouvait ressentir à l'égard de la conduite de Marie-Madeleine.

Et, comme pour mieux laisser les deux femmes seules, le vicomte s'écarta légèrement. Après tout, si elles étaient apparentées ou du moins se connaissaient, il était fort convenable que lui les laisse en paix... n'est-ce pas ?
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptySam 25 Aoû - 21:08

Marie-Madeleine Pentois, fille à marier

Marie-Madeleine, vous voici dans de beaux draps !

S'inclinant bien bas comme lui avait appris sa gouvernante ("ne vous baissez pas comme une paysanne !"), l'enfant cacha ses rougeurs qui marbraient jusqu'à son cou. Honteuse qu'elle était d'avoir laissé échappé de tels mots devant un homme. Et s'il les rapportait à Mère ? Marie-Madeleine se mordit les lèvres en songeant aux réprimandes qui en découleraient.

— Veuillez m'excuser Monsieur. Je veillerais à ne plus prononcer de telles infamies.

Mais elle pourrait toujours les penser. Se retournant vers sa chère Madame Ainsworth, elle baissa les yeux devant son discours. La dame n'avait pas totalement tort mais tout de même...

    Se penchant vers Madame Ainsworth après l'avoir mené vers un étal de gants (donnant ainsi prétexte à un rapprochement - diantre cette enfant savait déjà feindre !), elle confia ses craintes. S’épanchant comme si elle s'adressait à une amie de pensionnat.

    — Je ne saurais tout de même l'aimer. Elle semble si froide... Et elle s'est alliée à ma mère pour me marier. J'ai peur du mariage, Madame. Si l'on me forçait à prendre époux, je m'enfuirais ! Cela serait mieux qu'une prison que de vivre avec un homme méchant.

    Caressant un gain du bout des doigts, Marie-Madeleine eut un mot fâcheux :

    — Je vous envie d'être heureuse avec votre époux.
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyDim 26 Aoû - 11:08

J’envoyai la main au Vicomte lorsque la jeune fille m’emmena à l’écart. Je trouvai curieux la confiance que Marie-Madeleine avait en moi, comme si j’étais une bonne copine du pensionnat, ou bien un membre de sa famille. Peut-être était-ce mon âge, ni trop vieille pour être sa mère, si trop jeune pour être aussi innocente qu’elle ? Ou ne s’agissait-il pas de mon ton de voix bas et doux, laissant facilement imaginer que je ne me mettrais jamais en colère. Je fronçai les sourcils, inquiétude mélangée avec appréhension, s’enfuir, vraiment ? Et pour aller où ? Mis à part les lieux de débauche, la vie n’offrait aucune solution à une femme sans époux. Pour une fois, je pouvais me mettre à la place de quelqu’un : Mon mari était méchant, plus je m’éloignais de lui, mieux je me sentirais mais, je ne pouvais point m’enfuir bien longtemps, puisque j’avais des enfants à m’occuper. Et Dieu sait que je n’irai pas loin sans eux.

Cependant, je fus surprise par les paroles de Marie-Madeleine, d’un coup, je levai les yeux vers elle, la regardai droit dans les yeux, comme si elle avait dit quelque chose de travers. Je me radoucis rapidement, souriant gentiment pour la rassurer. Je posai une main sur son épaule, maternelle, et lui répondis « Vous ne serez jamais heureuse avec votre époux, si vous n’en avez pas, hm ? » Feinte, j’attrapai un gant sur l’étagère, comme matériellement intéressée et y glissai mes doigts longilignes. Trop petits. Mes ongles touchaient le fond, mais ma paume était à moitié découverte. Je fronçai les sourcils, contrariée, et reposai l’accessoire là où je l’avais pris. « Si vous vous renfrognez devant chaque prétendant, le plus charmant pourra paraitre le plus idiot… » Je vis un gant, pâle, mignon, innocent, et l’attrapai. « …Tendez-moi votre main. C’est normal d’avoir peur… » J’enfilai à la jeune fille le gant que j’avais trouvé, repoussant un peu la manche de sa robe pour le placer convenablement. « … mais comme toutes les peurs, il vous faut les affronter. Votre bonheur dépend de vous, meg hjertet. » Ah ! Mais c’est qu’il allait parfaitement bien à la petite, ce gant ! C’était réellement injuste, pourquoi les parisiennes se faisaient-elles si petites ? Gardant la main de l’innocente sur la mienne « Les aimez-vous ? »
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyVen 31 Aoû - 9:46

Marie-Madeleine Pentois, fille à marier

Oh chère madame Ainsworth, que n'êtes-vous ma mère !


Ainsi songeait la petite Marie-Madeleine, imaginant sa vie avec une telle mère. Tout serait bien plus simple ! Les mots de sa confidente l'apaisaient - c'était là des mots différents des reproches lancées par Madame Pentois. On l'écoutait, on la comprenait l'enfant mais on ne donnait pas raison à ses rêves.

— N'existe-t-il donc pas d'homme charmant et intelligent ? Beau et bon ?

    C'était un cri sorti du cœur d'une jouvencelle qui apprenait que la réalité était bien dure. Monsieur Ainsworth était-il donc comme tous les autres hommes, avec des défauts auxquels il fallait s'accoutumer ? Sans mot dire Marie-Madeleine regarda sa main posée sur celle de sa confidente, le gant épousant les formes et procurant une délicieuse sensation.

    — J'aime les gants mais... les hommes... Je les crains, Madame.

    On disait tant de choses, elle avait vu tant de prétendants.

    — Que me conseillez-vous ?
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyVen 31 Aoû - 15:05

Charmant, intelligent, beau et bon, ah ! N’était-ce pas le rêve de la plus part des jeunes filles, ça ? The man, celui qui regroupait toutes les qualités et n’avait pour défaut que d’être parfait. Cela m’arracha un sourire, mon mari ne regroupait pas ces essentielles quatre qualités, mais je trouvais encore matière à l’aimer. Je me surpris à penser qu’un homme qui était à la fois charmant, intelligent, beau et bon devait forcément être ennuyeux. Aucune chance d’y résister, il était charmant ! Aucune chance d’avoir le dernier mot, il était intelligent ! L’âge me permettait sûrement de voir ces choses-là, ou n’était-ce là que mes gouts personnels ? Depuis des années que je me chamaillais avec mon époux et ce, même lorsque nous étions fiancés. Comme une constante bataille, une animation sans fin, sans jamais que l’un veuille vraiment blesser l’autre. Sauf depuis quelques semaines, mais ça, c’était une autre histoire. Histoire que je ne souhaitais pas à Marie-Madeleine. Je me contentai donc de lui répondre « Ce ne sont pas des qualités que l’on remarque au premier regard, ma chère ».

Je souris lorsqu’elle me dit qu’elle aimait le gant. Je n’avais pas l’air de l’écouteur sur la suite de sa phrase mais, au contraire, mon oreille captait chacun de ses mots. Elle craignait les hommes, je craignais les hommes. Voilà ce qui nous unissait. « Les craindre, pourquoi donc ? » Je glissai des doigts sous son menton pour le lui relever, qu’elle soit fière, la petite ! Je refermai ma main sur le gant qu’elle portait « Les voulez-vous ? » Je pris le jumeau du premier et le lui enfilai également. De loin, aux yeux de la vieil de Marie-Madeleine, aux yeux du Vicomte de Lonsay, de tous les autres en fait, nous avions l’air de discuter accessoires et fanfreluches. « …Ce que je vous conseille… » J’écarquillai les yeux, par où commencer ? Il y avait tant à dire sur les hommes, sur leur méchanceté et leur stupidité, sur leur égoïsme et leur brutalité. « Ne choisissez pas le plus beau, si vous ne vous entendez pas avec lui, vous finirez par le trouver bien laid. Celui qui se jettera à vos pieds est un menteur, un profiteur… Ah ! Mais je ne devrais pas vous dire tout cela, votre mère serait fort contrariée si elle l’apprenait… » Je lâchai subitement ses mains, brisant la confidence qui nous liait. Il ne fallait pas l’effrayer, cette petite. Elle était si jeune, si innocente !
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyMer 5 Sep - 9:52

Marie-Madeleine Pentois, fille à marier

La demoiselle devait être effrayée d'apprendre que la vie n'était pas un roman, et que même sa grande confidente le pensait. Mais elle n'eut pas le temps de dire la fond de sa pensée que la duègne revint, posant sa main acérée sur l'épaule de l'enfant.

— Mademoiselle prévenez-donc ! Nous vous cherchions... La voici madame, veuillez l'excuser...

La gouvernante s'adressait à la couturière, maîtresse des lieux, qu'elle avait fait expressément demander pour s'occuper de sa commande. Il ne fallait que le meilleur pour l'unique enfant des Pentois, sa protégée. Se conduisant convenablement, la femme salua Catharina.

— Et veuillez m'excuser d'interrompre votre échange. Vous essayiez des gants à ce que je vois. Mademoiselle remerciez cette dame de sa patience et de son bon goût. Ils vous vont à ravir. (S'adressant à la couturière) Nous allons les prendre, madame.

Marie-Madeleine n'avait plus prononcé un mot, s'efforçant de sourire comme on lui avait appris. Et puis elle ne voulait pas que sa chère madame Ainsworth soit victime de ses petits scandales.

Spoiler:
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyDim 9 Sep - 6:07

Un tourbillon de taffetas et de dentelle.

Lise, les joues rougies par l’agitation, volait de client en client. Beaucoup trop de monde dans ce salon, on allait bientôt se croire aux Galeries. L’idée la contrariait. Pourtant, elle ne pouvait s’en prendre qu’à elle-même. Marguerite lui avait bien rappelé la visite du vicomte de Lonsay, ce matin (et Lise avait poussé un cri de joie – elle adorait Charles-Armand) ; Catharina, elle aussi, s’était annoncée (quel plaisir, de toute façon, d’habiller ses bambins qui avaient le bon goût de pousser comme du bambou). Mais les autres, eh bien… ils avaient rendez-vous, peut-être. Sûrement. Mais Lise n’était sûre de rien. Il n’était pas impossible qu’elle ait, disons… oublié. Et dans le doute, elle accueillait chaque client comme si elle l’avait attendu de pied ferme. Ce qui, de fait, créait un certain désordre.

Enfin, tout était arrangé avec cette gouvernante. La jeune fille reviendrait plus tard dans la semaine pour un essayage, rendez-vous était pris (« Vous avez noté, Marguerite ? »). Justine emballait déjà les gants et l’on pouvait espérer voir la clientèle du salon diminuer un peu. Lise pourrait, alors, se consacrer au vicomte.

« Excellent choix, oui, vraiment. » approuva-t-elle en surgissant dans le petit groupe. « La texture de ces gants est tout simplement divine ; la soie vient directement de Chine, c’est incroyable tout le chemin qu’aura parcouru ce fil avant de venir habiller vos mains, Mademoiselle ! Catharina, comme vous devez être impatiente que votre fille atteigne l’âge de porter de semblables gants, n’est-ce pas ? »

Et elle couvait la jeune femme d’un regard affectueux. Puis, virevoltant, elle se retrouva devant Charles-Armand et l’accueillit avec un sourire lumineux :

« Monsieur de Lonsay ! Quel plaisir de vous recevoir ! Vous me pardonnerez, je l’espère, toute cette agitation… Donnez-moi quelques minutes, et je suis tout à vous. J’ai reçu quelques pièces de toute beauté que je veux absolument vous présenter ! »

Charles-Armand de Lonsay – quel nom magnifique, Seigneur ! elle rêvait de l’appeler par son prénom rien que pour le plaisir de prononcer ces syllabes –, Charles-Armand de Lonsay était amateur de belles choses, ce qui avait conquis Lise dès leur première rencontre. L’élégance du jeune homme, ses excellentes manières et sa gentillesse timide avaient fait le reste : Lise avait un faible.

« Je vous ai vu converser avec madame Ainsworth. » Duo touchant s’il en est. « Une femme charmante, vous serez sans doute de mon avis ! »

Un geste et un sourire vers ladite femme charmante qui n’était peut-être même pas hors de portée de voix.
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyMer 2 Jan - 6:58

Il ne savait pas pourquoi il avait toujours vu cette femme-là aussi différemment des autres. Peut-être parce qu'elle était sa couturière. Peut-être parce qu'avec elle, il avait un sujet de conversation tout trouvé, qui ne risquait pas de dériver vers autre chose de potentiellement inquiétant, comme des questions plus privées. Peut-être parce qu'elle était une bonne conseillère vestimentaire, et qu'il avait conscience de parler à un ministre de la mode tout à fait diligent. Ou peut-être pour autre chose. Bref, il n'en savait rien, mais il voyait Lise Champmézières très différemment des autres femmes... Elle le mettait beaucoup moins à l'aise que la plupart des femmes. Et son incessant bavardage le dispensait bien de répondre par autre chose qu'une immense majorité de monosyllabes.

Ainsi, lorsqu'il vit arriver la tornade de tissus qui d'ordinaire contenait la couturière - elle aurait pu faire de la concurrence à la Fuller, pensait-il -, puis la Champmézières discuter avec la vicomtesse Ainsworth avant de revenir vers lui, il ne rougit pas... ou du moins, beaucoup moins que devant toute autre dame. Et lorsqu'elle revint lui parler, elle aborda directement le sujet tissus. Ouf !

"Oh, bien sûr, je vous en prie...", répondit-il lorsqu'elle le pria de le pardonner quelques instants. Au reste, la couturière avait un immense avantage : quand elle disait "quelques instants", c'était toujours quelques instants, jamais dix minutes ou une heure. Alors que d'autres femmes, sa cadette en premier lieu... ne manquaient pas de faire toilette pendant des années, à se demander si elles sortaient un jour de leurs cabinets. Il avait bien de la chance de savoir que tel était le cas !

Malheureusement, ses espoirs de mener une conversation plus technique qu'autre chose s'évaporèrent lorsqu'elle aborda, pour meubler son temps d'absence, le sujet de la vicomtesse Ainsworth. Une femme qui, elle, le menait aux sommets de la timidité.

"Oui... certes...", répondit-il, le sang lui remontant furieusement au visage. Espérons qu'elles ne s'en rendent pas (trop) compte...
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptySam 5 Jan - 23:59

… Mais pouvait-on ignorer l’éclosion d’un coquelicot dans un champ de lys ?

Lise n’eut besoin que d’un coup d’œil à son vicomte (ahem… nous admettrons ici l’emploi exceptionnel de l’adjectif possessif) pour constater l’effet qu’avaient eu, bien malgré elle, ses paroles aimables. Ayant goûté le privilège de discuter longuement avec monsieur de Lonsay (ou, du moins, d’obtenir parfois de lui des répliques autres que son légendaire « Certes… »), elle en oubliait la timidité maladive du jeune homme envers le sexe féminin. Une fraction de seconde elle se mordit la lèvre, désolée d’avoir manqué de tact… mais se reprit vite.

La duègne et l’ingénue s’en allaient, il fallut les raccompagner un peu, les saluer, leur assurer que rendez-vous était pris – mais quand, déjà ? … Puis Lise put revenir à son duo charmant : Catharina qui ne semblait pas pressée de s’en aller (tant mieux, tant mieux !), et le vicomte de Lonsay dont l’heure du rendez-vous devait avoir plus ou moins sonné. Marguerite, qui supervisait le rangement du salon, avait toujours un œil sur sa patronne. Lorsque celle-ci lui adressa un signe discret, la Première accourut.

« Marguerite, je vais recevoir monsieur de Lonsay. »

Et, presqu’aussitôt, deux petites ouvrières apportèrent précautionneusement des housses noires qu’elles déposèrent sur la table la plus proche du vicomte.

« Voulez-vous jeter un œil ? » Lise affichait une mine ravie à l’idée de montrer ses derniers trésors à un client qui, comme elle, pouvait passer deux heures à choisir entre deux tissus blancs. « Oh Catharina, venez voir également, je vous en prie ! » Elle lui effleura le bras pour l’inviter à approcher ; l’occasion était excellente pour éveiller l’amour du vêtement chez son amie.

Ouvrant les housses, elle sortit petit à petit les pièces qu’elle avait présélectionnées pour monsieur de Lonsay. Des couleurs qu’il aimait – crème, bleu, gris perle – et des couleurs qu’elle pensait qu’il pourrait aimer – tel sépia, tel bisque, tel audacieux petit parme. Et les tissus commençaient à envahir les sofas tandis que Lise invitait ses clients à regarder, tâter, caresser, sentir même ! au son de ses commentaires : « mon fournisseur l’importe de Perse, imaginez-vous ?! », « ce satin est à tomber, il ferait une cravate formidable, non ? », « que pensez-vous de ce drap ? »… Des tissus à veste, des tissus à pantalon, des tissus à foulard… et même un sublime duvet de cygne anglais dans lequel elle imaginait un gilet merveilleusement suranné.

Enivrée par tant de possibles, Lise finit par s’interrompre et se retourner vers Catharina pour lui offrir un sourire navré :

« Je vous assomme, pardon… Mais vous prendrez bien un thé ? Ou un cognac, monsieur de Lonsay ? »
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyVen 11 Jan - 3:35

« Nei, je désire offrir ces gants à Marie-Madeleine. » Les gants furent tout de même emballés mais le paquet me revint plutôt qu’à la chaperonne de l’enfant. Je lui soufflai quelques mots avant son départ, rassurants. Quelle dame serais-je si je la laissais partir avec des idées si horribles dans la tête ! J’espérai de tout cœur qu’elle retienne plutôt mes paroles réconfortantes à celles qui dénigraient les hommes. Cette petite était beaucoup trop adorable, il ne fallait pas faire faner son joli sourire.

J’eus à peine le temps d’errer que Lise m’appelait. Ses ouvrières apportaient des housses qui, sans doute, étaient pleines de tissus magnifiques. Je la regardai d’abord avec un air désemparé. Ne se souvenait-elle pas de mes gouts étranges et dépassés en matière de mode et de mes connaissances lacunaires concernant les tissus ? Probablement pas, il s’agissait de Lise, après tout –elle devait me confondre avec une énième cliente qui s’y connaissait, elle. Je vins donc, m’approchai des très jolies pièces de tissus mais demeurai à l’écart. Je m’écartai un peu brusquement lorsqu’une ouvrière recula sur moi, dépliant un large tissu tout en l’admirant et ne faisant pas attention à où elle mettait les pieds –elle était jeune, pardonnable. Il fallait croire que je n’étais pas assez grande pour que l’on me remarque.

Je jetai un bref coup d’œil à l’homme perdu au travers ces mesdemoiselles, celui qui avait eu la charmante gentillesse de me ramener mon gant tombé. Ses vêtements me semblaient étranges, hors du temps… Dépassés ? Je me questionnai alors : Pourquoi lui pouvait-il se vêtir old time et pas moi ? Je battis des paupières, regardai son visage, ses yeux, sa bouche, ses mains. Ah, voila ! C’était donc pour cela –C’était forcément que pour cela.

« Hm ? » Mes yeux revinrent à Lise et j’hochai doucement la tête. « Bien sûr, si vous me le proposez. » Et souris maigrement. « Vous ne m’assommez pas, loin de là. » Voir une femme au travail et se laisser aller à sa passion, c’était très distrayant –agréable, aussi. Cela me réchauffait le cœur de voir une amie proche se rouler ainsi dans les tissus. « Je vais même participer. Oh ! Pas que vous ayez réussi à faire évoluer mes gouts mais… »

Je me glissai jusqu’aux housses et tendis les bras pour prendre, avec une grand délicatesse, un tissu bleu clair qui avait attiré mon attention. Je le rapportai contre moi et me reculai à ma place initiale. Je levai le tissu à la hauteur du vicomte et me penchai vers Lise « Je trouve qu’il porterait très bien cette couleur. » Puis je baissai les bras, et répondit sur un ton encore plus bas, presque pour moi « Quoi que mon avis ne vaille pas grand-chose… » Pas même auprès de mon cher et tendre époux qui, s'il n'était avec des hommes de son cercle de connaissances, devaient être en train de démolir les tiroirs à la recherche de preuves de mon adultère. À l'idée, je serrai davantage mes doigts autour du tissu et me renfrognai, paraissant beaucoup moins amusée, du coup.
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptySam 26 Jan - 2:03

L'arrivée des deux petites cousettes et de leurs housses à tissus fut pour Charles-Armand un soulagement appréciable, une diversion tout à fait bienvenue à sa timidité naturelle (qu'il lui faudrait bien combattre un jour, d'ailleurs). Ses joues retrouvèrent leur tranquille pâleur, son visage s'anima un peu, le vicomte était dans son élément. Que Mme Champmézières convie la vicomtesse Ainsworth à prendre part à cet intéressant choix de tissus ne le dérangeait pas le moins du monde, d'ailleurs : tant qu'il y avait un sujet sur lequel se passionner, le moyen de penser à autre chose... tout lui allait. C'est donc avec intérêt qu'il se pencha sur les tissus que Lise déballait tout à tour, commentant chacun avec une exaltation qu'il partageait - modérément, certes, il n'était pas du genre à se laisser aller à l'euphorie.

Alors qu'il étudiait attentivement un taffetas acier qui, à ses yeux, ferait une doublure tout à fait élégante (oui, oui, vous avez bien lu, une doublure...), la couturière lui proposa un thé, ou un cognac. La vicomtesse répondit tout d'abord, et lui-même accepta sans se faire prier : "Volontiers, volontiers..." Quelque chose semblait cependant montrer qu'il n'avait prêté à la demande qu'une attention très modérée : il préférait penser à ce nouvel habit auquel il songeait depuis peu. Depuis qu'il avait vu certaines étoffes, en fait.

À côté de lui, madame Ainsworth s'emparait d'un tissu bleu auquel il n'avait prêté qu'une attention dérisoire, reculait un peu et jaugeait l'adéquation de cette couleur avec le teint d'un monsieur de Lonsay qui n'y prêtait aucune attention... jusqu'à ce qu'un instinct curieux l'invite à détourner la tête du gris anthracite et du gris souris, à porter ses regards jusqu'aux deux femmes. Madame Ainsworth avait en main un tissu bleu qu'il n'avait pas remarqué, mais esquissait une grimace qui l'interloqua. Surpris de cette mine, il s'avança vers les deux dames mais, ne sachant trop que dire, garda les yeux rivés sur le tissu et laissa échapper, comme pour lui-même : "Excellent choix, tiens..."

Citation :
C'est nul à pleurer, désolée... Embarassed J'essaierai de faire un RP un peu plus passionnant la prochaine fois. x)
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyDim 3 Fév - 4:25

« Voyons Catharina, tout avis de femme est précieux lorsqu’il s’agit d’habiller un homme ! » répliqua Lise joyeusement. Et quel homme ! … La couturière vint se placer tout près de Catharina pour admirer avec elle comment se mariait la couleur du tissu avec le teint du vicomte. « En plus, vous avez très bien choisi. Monsieur de Lonsay porte merveilleusement bien ce bleu fumée. » En réalité, monsieur de Lonsay était ce bleu fumée. D’ailleurs, Lise ne pouvait plus voir ce bleu fumée sans penser à monsieur de Lonsay… Bref.

Elle s’éloigna pour servir trois tasses de thé et un verre de cognac. Le petit guéridon sur lequel on avait déposé les boissons était à quelques pas ; Lise ne doutait pas des excellentes manières de ses clients, mais une maladresse était si vite arrivée… et renverser du thé sur l’un des tissus, c’eût été un drame absolu, n’est-ce pas ?
Lorsque chacun se retrouva avec sa tasse ou son verre entre les mains, Lise eut un geste un peu flou vers les tissus qu’elle avait déballés, et un sourire pour le vicomte :

« Eh bien, monsieur de Lonsay, qu’est-ce que tout cela vous inspire ? »
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MessageSujet: Re: Avec un gant de soie...   Avec un gant de soie... EmptyDim 3 Fév - 10:02

Ah, ce bleu fumée... il ferait une agréable cravate Empire, assorti à une veste bleu horizon... oui, ça serait assez élégant, bien qu'un bleu gris-de-lin ne manque pas de charme dans une telle perspective... Mais le vicomte était attaché au bleu fumée, comme il l'était au bleu poudre. Une réminiscence de ses origines militaires, sans aucun doute, quand bien même il n'avait rien d'un soldat. Un peu trop d'imaginaire, sans doute... Aussi le vicomte disserta-t-il un long moment sur les valeurs respectives de la moitié des bleus de la palette, sur certaines nuances de gris, sur ce curieux parme que la couturière avait trouvé... Bref, des discussions vestimentaires tout ce qu'il y a de plus rébarbatives pour le lecteur... C'est pourquoi nous, narrateur de cette histoire, cesserons de suivre les aventures de nos trois amis... pour l'instant.
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