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Tout esprit profond s'avance masqué
Description physique & psychologique :
Mme Séraphine Spéret, née de Ressal, est une jolie petite femme dont le port de tête trahit à lui seul toute l’éducation qui a été la sienne alors qu’elle était une jeune fille. Elevée dans le respect des traditions, elle conserve de ses jeunes années un menton fier, un teint de lait et une indéfectible confiance dans les enseignements de sa mère. De longues boucles brunes encadrent un visage dont les joues pleines la désespèrent, orné d’une petite bouche souvent pincée et d’un minuscule nez retroussé qui agrandissent ses yeux verts en comparaison. Du haut de ses trente et une années, Séraphine conserve donc dans les traits une certaine jeunesse, qu’elle troquerait volontiers contre les pommettes gracieuses et racées qu’arborent nombre de ses amies.
Sa silhouette potelée, toute de formes généreuses, est le plus souvent ensevelie sous des mises à la pointe de la mode : robes aux coupes savamment étudiées pour la mettre en valeur, teintes douces soulignant la pâleur de son teint et chapeaux de toute sorte constituent les menus plaisirs de cette femme pour qui l’apparence est un élément crucial. Séraphine, malgré son mariage, tient à conserver en apparence le rang qu’elle considère être le sien. Les yeux tournés vers les grandes aristocrates de Paris et plus particulièrement vers le salon de Gisèle de Lambresac, elle se tient aux convenances les plus strictes et se lamente de l’attitude bohème de son mari.
Car il s’agit là du grand malheur de Séraphine : mariée à 17 ans avec ce riche bourgeois épris d’avant-garde et d’innovation, la jeune fille qu’elle était alors, dont l’éducation se réduisait aux conseils maternels et aux enseignements dispensés par sa gouvernante, se vit plongée dans un univers qui lui était totalement étranger. En réaction, elle se raccrocha fermement à ses certitudes – peut-être un peu naïves, à l’époque – et, bientôt, les deux époux n’eurent plus que des paroles rageuses à s’échanger… une situation que, bien souvent, Séraphine regrette. Mais comment parvenir à tenir une conversation avec cet homme frivole, vêtu de mauve et le regard toujours fuyant, toujours irritant et jamais conciliant ? Comment lui faire comprendre que, pour elle, l’oubli des traditions revient à oublier ses racines ?
Pour autant, et malgré ces dissensions, Séraphine se prend à espérer parfois qu'un jour, l'amitié pourrait revenir dans leur couple. Quelques marques d'affection et de brèves accalmies tendent à renforcer ses espoirs, d'autant que la jeune femme ne désespère pas d'avoir enfin un enfant. En effet, deux fausses couches sont venues, en quinze ans, miner encore davantage la vie de ce couple déjà disparate. Cette absence d'enfant et la crainte d'être réellement infertile pèse sur sa tranquillité de femme du monde consciente de son devoir conjugal. Aussi la conception d'un héritier Spéret est-elle à l'ordre du jour dans ses priorités.
Cette tâche risque cependant d'être compromise du fait que son mari la considère la moitié du temps comme une momie venue du fond des âges, et l'autre moitié comme une mégère assommante uniquement capable de lui lancer des platitudes domestiques au visage. Séraphine sait pertinemment d'où viennent ces impressions: après tout, elle sait se montrer très colérique. Alors même qu'elle peut se targuer d'être la reine de la maîtrise de soi lorsqu'elle se trouve en bonne société, elle se trouve incapable de se maîtriser face à ce mari qui ne la comprend pas, et ne cherche pas à la comprendre. Pour autant, jamais Séraphine n'a regardé un autre homme: que Jules monopolise suffisamment de son énergie pour qu'elle s'encombre d'un autre homme ou qu'il s'agisse d'une admiration inexprimée à son encontre, celui-ci reste le seul homme qui compte pour elle.
Séraphine n’est pour autant pas dépourvue de jugement et de conversation, des qualités apprises tant en compagnie de sa mère que sur le tas, alors qu’elle se faisait une place au sein de son nouveau voisinage. Aiguisant son esprit au fil des soirées mondaines, Séraphine, bien que ses vues soient encore naïves du point de vue de la politique ou même de l’Histoire, s’est forgé en matière d’art quelques convictions qui mettent le conventionnel à l’honneur. Peignant sans grand talent et seulement par vanité, elle est cependant assez douée au piano, ses petites mains fines devenant remarquablement agile lorsqu’elle en joue.
La petite madame Spéret est donc une femme dôtée d'une grande autodiscipline, mais qui sait se montrer tout à fait charmante dans les dîners mondains, bien que son attitude pleine de retenue ne soit point de la plus grande spontanéité. Elle se montre respectable à tout point de vue, et ses quelques talents de musicienne lui permettent de marquer les esprits sans avoir recours à des moyens plus tapageurs.
Seules les pensées que l'on a en marchant valent quelque chose.
Texte d'introduction au personnage ou Test RP :
La voiture personnelle des Spéret filait dans les rues parisiennes, cahotant sur le pavé inégal. Assise, très droite, à côté de la petite fenêtre, Séraphine regardait défiler les façades tout en affichant un désintérêt rigoureux. La pierre blanche parcourue par la lumière chaude et ondoyante du soleil se couchant sur la ville avait toujours sut éveiller en elle une admiration mêlée de nostalgie. Alors que, jeune fille, elle allait faire des visites en compagnie de sa mère, souvent elles prenaient le chemin du retour sous une semblable luminosité. Il aurait cependant été malvenu de sa part de coller le nez au carreau, comme elle le faisait parfois en cette époque reculée. Il se passa quelques minutes, la voiture pila pour laisser passer un bambin imprudent, puis repartit dans un grand fracas de roues et d’imprécations de la part de son conducteur et, enfin, le soleil sombra derrière quelque immeuble anonyme, coupant court à sa torpeur admirative.
En cette journée de juin, Séraphine ponctuait sa journée de visite d’un détour à la maison de couture. On lui avait bien proposé une soirée au théâtre, mais elle l’avait poliment déclinée, prétextant l’urgence de cette course. Un pieu mensonge... Depuis que l’Opéra avait été soufflé, en cette tragique nuit où elle avait cru perdre un mari, elle n’allait voir une pièce que de temps en temps, bien que l’on donnât désormais des spectacles tout à fait convenables au nettement moins convenable Eden Théâtre. Il y avait quelque chose de rompu, désormais, dans l’impression de magie qu’elle ressentait souvent au moment du lever de rideau. Une vague angoisse, une inquiétude, un souvenir qui hantait la conscience du public et que l’on ressentait comme une onde vague, mais présente, et qui lui gâchait le plaisir. Pour autant, la jeune femme ne pouvait cesser de se montrer en de tels endroits, et en bonne compagnie : il en allait de son image. Elle ne pouvait se permettre de passer pour une femme recluse, alors même que son mari écumait les divertissements de Paris. Si elle ne l’accompagnait pour ainsi dire jamais, elle se devait d’avoir des activités de son côté. Ainsi, et malgré la fatigue qu’elle ressentait ces derniers temps, elle se forçait à garnir son emploi du temps de milles et unes activités. Ce soir, elle avait une excuse toute trouvée.
Ils passèrent par la rue de l’Echaudé et, involontairement, elle pinça les lèvres. Encore une fois, chez les Fresson, on avait parlé d’art et d’avant-garde et de la vulgarité de certaines pièces que l’on donnait de plus en plus souvent dans Paris. Evidemment, on avait parlé de la
Revue Mauve, et elle s’était contentée de serrer les lèvres sans rien dire lorsque l’on s’était tourné vers elle. On avait alors hoché la tête, pour signifier sa compassion, et la conversation avait repris. Dieu, quel embarras… Jules devait-il toujours être pour elle source de gêne ?
La voiture s’arrêta devant la maison de couture où elle devait faire faire quelques retouches sur la tenue qu’elle avait commandée pour la garden-party des Lebrun, une semaine plus tard. Cette partie là de son mensonge, à tout le moins, était vraie. La portière s’ouvrit en grinçant légèrement, et son pied chaussé d’une jolie teinte vert d’eau foula délicatement le pavé. Sa robe, de la même teinte, jusque là ramassée dans l’habitacle du véhicule, se déploya autour de sa petite silhouette et, serrant autour de ses fines épaules un châle immaculé, elle releva une tête enchapeautée de blanc vers la maison de couture. Là, attendait une robe qui, elle en était sûre, lui assurerait de ne point passer inaperçue à sa prochaine sortie.
Theatrum Mundi
Pour terminer ...
• Pseudonyme : Epok
• Âge : 21 ans
• D'où nous venez-vous ? Site de référencement Puzzle
• Quelque chose à nous dire ? N'ayant pas de raison de faire prendre le train à notre petite mondaine, j'ai plutôt décrit un voyage en voiture... J'espère que cela ne gêne pas trop.