Pierrot LunaireLa bouche clownesque ensorcèle comme un singulier géranium
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| Sujet: Petite Histoire Récente Mar 1 Fév - 11:22 | |
| Quelques évènements qui ont marqué les générations
• 1852 - 1860
Les comptes fantastiques d'Haussmann Petites rues du Paris d'avant-Haussmann Nous remontons pour cela au Second Empire, sous Napoléon III. Depuis des années, déjà, on constatait un réel malaise urbain. Les petites rues étroites, encore moyenâgeuses, n'étaient plus adaptées, à présent que la population parisienne avait considérablement augmenté. De plus, les concentrations de population étaient très inégales, et se cantonnaient à certains quartiers du centre, d'où partaient de nombreux troubles et émeutes. Outre qu'elles favorisaient le désordre et les barricades, ces petites rues surpeuplées posaient d'énormes problèmes d'hygiène et de promiscuité. La courte République qui avait précédé le régime de Napoléon s'était déjà posé cette importante question, mais sans y apporter de réponse durable. Il faut attendre le Second Empire et l'arrivée du baron Haussmann pour voir la ville se transformer. Haussmann est choisi en 1853 pour devenir Préfet de la Seine et, sous l'impulsion de Napoléon III, prend la situation en main. Pour financer une tâche de cette ampleur, il a recours à l'Etat, mais également au privé. - La Ville et l'Etat qui s'occupent de dessiner les plans, d'exproprier les habitants et de les indemniser, de construire les équipements comme les canalisations et les réseaux d'eau.
- En revanche, ce sont les compagnies privées qui construisent, vendent et louent les immeubles.
Boulevards haussmanniens sous le pinceau de Caillebotte Plusieurs grandes percées sont ainsi opérées : un axe nord-sud (boulevard Sébastopol, boulevard de Strasbourg, boulevard Saint-Michel) et un axe est-ouest sont ainsi tracés. L'île de la Cité, jusqu'alors surpeuplée, est vidée de ses habitants et transformée en centre administratif. De nombreuses percées dans l'est de la capitale ont pour but de contrôler les populations "dangereuses" et de faciliter la circulation : c'est le cas, ainsi de la place de l'Opéra ou de la place du Trône. Mais l'entreprise d'Haussmann est critiquée sur de nombreux aspects. Tout d'abord, ces démolitions et constructions contribuent à chasser la population la plus pauvre de Paris, les immeubles construits étant destinés aux bourgeois. D'autre part, les grandes avenues rectilignes proposent des façades souvent uniformes, d'un néo-classicisme bien solennel : on reproche à Haussmann de défigurer Paris. Les bouleversements du tissu urbain ne résolvent d'ailleurs pas les problèmes, et en viennent parfois à les accentuer : chassés du centre, les ouvriers se regroupent notamment à l'est, dans les quartiers de Belleville, de la Villette ou de Mesnilmontant ; les transports à faible prix manquent et les encombrements demeurent. Enfin, l'entreprise d'Haussmann fait la part belle à la spéculation, et les loyers grimpent bien vite ; les travaux, ruineux pour la Ville, sont confiés de plus en plus à des entreprises privées que l'on contrôle difficilement. On finit par dénoncer ces "comptes fantastiques d'Hoffmann" (la formule est de Jules Ferry) ; en 1869, le Corps législatif obtient le contrôle des dépenses de l'Hôtel de ville et Haussmann est contraint à quitter son poste, en janvier 1870. A sa suite, cependant, de grands travaux seront initiés par la IIIe République, afin d'optimiser les déplacements et les liaisons d'un quartier à l'autre. A la suite d'Haussmann, ces entreprises gigantesques font de Paris une ville moderne, et ont durablement modifié le visage de la ville. L'année 1870-1871 fut surnommée l' « année terrible ». Il faut dire qu'entre la chute du Second Empire, la défaite contre la Prusse et les soulèvements patriotiques, la vie n'était alors pas de tout repos ! Tout commence par la guerre contre la Prusse (voir Relations internationales) : mal préparée, la France court à sa perte et des émeutes durables dans la rue renversent le Second Empire en septembre 1870. Un gouvernement de défense nationale, de forme républicaine, mais avec le statut de gouvernement provisoire a été créé. Mais dès le 20 septembre, les Prussiens sont aux portes de Paris. Commence alors un siège très dur, où la capitale souffre des bombardements, où les habitants manquent de vivres et de produits de première nécessité. Pour bien comprendre le phénomène de pouvoir qui eut lieu alors, il faut se rappeler qu'il existait un profond décalage entre Paris et la province. Cette dernière a voté majoritairement à droite, parce que la droite était pour la paix. Paris, en revanche, élisait 36 députés républicains sur 43 sièges, et voyait la signature de l'armistice comme une honteuse capitulation. On prononça cependant l'arrêt des hostilités, notamment parce que l'Assemblée manifestait alors une haine farouche à l'égard de Paris, ville révolutionnaire qui voulait lui dicter ce qu'elle devait faire - en dépit du reste du pays. Les troupes prussiennes défilent ainsi sur les Champs Elysées et Adolphe Thiers devient le chef du pouvoir exécutif de la République provisoire. Après avoir constitué un gouvernement mixte, constitué de légitimistes, d'orléanistes mais également de républicains modérés, accepté les dures conditions de l'armistice (dont la perte de l'Alsace-Lorraine), et déchu pour de bon Napoléon III, Thiers décide de s'occuper du cas de Paris, alors presque en sécession ... Parce qu'entre temps, depuis le 24 février (jour anniversaire de la révolution de février 1848), les manifestations autour de la colonne de la Bastille se multiplient. La garde nationale de la ville, qui s'est organisée en factions, élit le 15 mars un Comité central qui veut s'opposer à tout risque de renversement de la République (on a vu que le gouvernement provisoire était fragile, et il est constitué pour une part de monarchistes). Les élus parisiens essaient d'intercéder auprès du gouvernement national (installé à Versailles), pour obtenir un statut spécial à la ville de Paris et éviter un soulèvement complet, mais l'Assemblée s'y oppose. Paris organise alors des élections et la municipalité élue se pose très vite comme un contre-gouvernement révolutionnaire. Sa majorité est constituée des différentes gauches révolutionnaires et patriotes, qui entend imposer la dictature de Paris à la province jugée conservatrice voire rétrograde. Peu à peu naît l'idée de faire de Paris une « république indépendante ». La ville s'organise : des comités d'arrondissement gèrent les affaires locales, les journaux se multiplient en toute liberté, des associations de femmes se fondent, tandis que des artistes se liguent contre l'académisme. Plusieurs décisions sont prises : séparation de l'Église et de l'État, service dans la garde nationale obligatoire, et divers projets sociaux se forment. Mais c'est oublier le gouvernement national, qui ne voit pas tout cela d'un bon œil - et c'est un euphémisme. Pour venir à bout de la Commune, Thiers a constitué une armée de 130 000 hommes (essentiellement des prisonniers des prussiens, libérés après l'armistice), qui marchent sur Paris. Les hostilités commencent le 3 avril 1871. Malgré les efforts de certains, notamment les républicains modérés, pour éviter une guerre civile, les Versaillais entrent par surprise dans Paris, le 21 mai 1871. C'est le début de la « Semaine Sanglante ». Les Communards, tentant de récupérer leurs quartiers face à une armée régulière, sont condamnés à une lutte désespérée. Dans leurs fuite, ils détruisent bon nombre de maisons et de monuments : les symboles du pouvoir, (Hôtel de Ville, Tuileries, Palais de Justice, Palais-Royal) sont incendiés. Ils fusillent également une centaine d'otages. La répression en face est très dure. Même si le décompte est toujours difficile à faire, on dénombre environ 20 000 exécutions sommaires pendant les combats, 26 conseils de guerre qui prononcent 93 condamnations à mort, 251 aux travaux forcés en Guyane, 4586 à la déportation en Nouvelle-Calédonie. Paris perd 100 000 habitants en à peine une semaine. En 1896, la Commune entre assez peu dans les conversations. Plus qu'un tabou, l’événement a l'image d'une tentative de révolution amorcée par des fous-furieux d'extrême-gauche, qu'il était normal de punir. Il s'agit cependant d'une date majeure de l'histoire du XIXe siècle, qui devait encore être présente dans les souvenirs. • 1889
L'Exposition Universelle à Paris Garen, Embrasement de la Tour Eiffel pendant l'Exp. Univ. de 1889 Du 6 mai au 31 octobre 1889, la dixième Exposition Universelle fit la fierté des parisiens. Elle mena à Paris nombre d'étrangers curieux et représentait la puissance technologique, culturelle et coloniale de la IIIe République. Cependant, son organisation ne se fit pas sans heurts. - Les dates de l'Exposition Universelle correspondaient au premier centenaire de la Révolution Française. Malgré les efforts des autorités pour commémorer cette date hors contexte de l'Exposition, les puissances monarchiques européennes ont boudé l’événement. Parmi les personnalités royales, seuls le prince de Galles, le roi des belges Léopold II et le shah de Perse ont visité l'Exposition.
- La construction de la Tour Eiffel a déchaîné quelques passions et réveillé des inquiétudes. Le futur monument a été dessiné par Gustave Eiffel, spécialiste de la grande construction métallique. Il s'était fait une réputation dans les années précédentes (sa société avait construit de grands ponts et viaducs, ainsi que des gares et des galeries, notamment la galerie des Machines de l'Exposition Universelle de 1867 ; Eiffel avait aussi élaboré la structure intérieure, en fer, de la Statue de la Liberté). Commencée le 26 janvier 1897, la construction de la Tour gigantesque (le plus haut monument du monde à l'époque, avec ses 300 mètres de haut) s'achève en mars-avril 1889. L'édification avait été retardée, au courant de l'année 1887, par l'action juridique d'un propriétaire du Champ de Mars, qui craignait que la Tour, en s'effondrant, n'écrasât sa maison ... Face à l'ouvrage de fer, symbole de la construction industrielle, des artistes se sont également révoltés. Une protestation d'artistes et écrivains (parmi lesquels Leconte de Lisle, Gounod, Charles Garnier, Maupassant, etc.) fut adressée à Alphand, l'organisateur de l'Exposition Universelle, en vain. Le monument, achevé, attirera le public, mais des mécontents continueront de déplorer la laideur de cette tour ...
Parmi les attractions de l'exposition, l'on comptait : - Une Histoire de l'Habitation, à savoir 49 petites constructions représentant les différents habitats de l'homme, selon les pays, et de la préhistoire au XIXe siècle.
- La Tour Eiffel où l'on pouvait monter. On y trouvait par exemple divers restaurants, une petite salle de spectacle, un marchand de tabac, des magasins de souvenir, une imprimerie (au deuxième étage).
- Le Palais des Beaux-Arts et celui des Arts Libéraux, aux décors polychromes, faits de céramiques et d'armatures peintes.
- Le Pavillon colonial qui réunit constructions et populations indigènes venus de toutes les colonies françaises. S'y côtoient un village algérien, des pavillons tonkinois ; des guerriers congolais et des populations canaques. C'est un des clous de l'exposition, et les spectateurs se pressent pour goûter un peu d'exotisme. Parmi les représentations, on s'extasie notamment devant les danseuses javanaises, symboles d'un exotisme mystérieux, beau et inaccessible. Cependant, même si peu de gens à l'époque le remarquaient (ceux qui le décelaient étaient des gens ayant vécu aux colonies ou quelques intellectuels ayant un peu de recul), ces spectacles étaient souvent des caricatures de ce qu'étaient la vie et les coutumes des populations colonisées.
- Le Chemin de fer de Decauville. Payant, il promenait les visiteurs d'un bout à l'autre de l'Exposition, en passant par deux tunnels. Il parcourait 3 km de distance.
- Deux Ballons remplis d'hydrogène, reliés au sol par des treuils qui permettaient une vue d'en haut de toute l'Exposition.
- La Galerie des Machines, abritée sous un pavillon métallique de très grande dimension, comparé à une cathédrale du XIXe siècle. Elle rassemblait locomotives, grues, chaudières, etc. Elle sera détruite en 1909.
- Divers restaurants de plusieurs régions du monde, où l'on vous servait en costumes traditionnels. Un grand café-concert réunissait, le soir, les artistes en vogue du monde européen.
Pour un ou deux francs (billets journaliers) ou cent francs (carte d'abonnement), ils furent plus de 32 millions à avoir visité l'Exposition Universelle de 1889. |
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