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 Cellule LXVI

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Le Renard
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Le Renard

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MessageSujet: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyLun 19 Mar - 12:45

La lourde porte se referma. Les murs sentaient l'urine et les défécations, une main habile, peut être même illustre avait gravé sur le murs l'inscription suivante : "vous qui entrez ici perdez tout espoir"

Peut être c'est cette même inscription qui poussera Evariste Gallois, trois ans plus tard, enfermé entre ces murs à écrire : « Porte aussi massive que rébarbative, murs épais d'un mètre qui le disputent à l'horreur de sombres couloirs, suintant la crasse, le froid et le désespoir. Tout ici sent la Mort ! Dante a dû y venir, rédiger ses Enfers. »

Renaud Berger se traina jusqu'à à la planche et le vieux matelas de paille moisie. Son visage était constellé de tâches écarlates là où les phalanges des agents de police s'étaient abattues avec le plus de force. Il avait été sommairement soigné de ses blessures reçues lors de l'explosion mais certaines plaies s'étaient rouvertes après les longues heures d'interrogatoire.

Ce n'était pas la première fois qu'il passait entre les mains de la Police, mais cette fois les agents avaient fait du zèle, si au début Berger les avait provoqué avec arrogance vers la fin il en était réduit à se taire, serrant les dents pour qu'aucun gémissement de douleur ne passe ses lèvres parcheminés de coupures. Il avait maintes fois perdus connaissance et avait finit par gémir, mais n'avait rien dit. Sur le d'Harcourt, ou sur l'Opéra...

Finalement les cognes s'étaient lassées et craignant de le tuer sans qu'il ait parlé ils l'avaient mis au secret à Ste Pélagie. Mais Renard savait que les interrogatoire reprendraient bientôt, on le laisserait mariner dans l'isolement le plus total pendant quelques temps et le supplice reprendrait. Le mieux à faire était de prendre des forces et de se fortifier la caboche.

Il sombra dans un sommeil sans rêve.

N'émergeant que pour prendre sous le matelas, là où Gaston, un maton payé par la Cause glissait quelques liasses de papier et un crayon de bois. Rudimentaire mais de quoi faire passer quelques nouvelles. Il couvrit de son écriture malhabile plusieurs feuillet qu'il confia à Gaston au moment où celui ci servit la soupe et le quignon de pain sec. Ce fut sa seule activité de la journée et son seul contact humain.

Ne pouvant soutenir de trop longues périodes d'éveil tant il était fatigué il re-sombra, pour n'émerger qu'au bruit de sa porte qu'on ouvrait, les cognes, déjà ? C'était trop tôt, il était encore si faible...
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Pierrot Lunaire
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyMar 27 Mar - 0:45

Vaste carré aux murs épais et noircis, vieille prison pliée sous le poids des ans, des crimes et des idées qu'elle a accueillis en son sein, telle est Sainte-Pélagie. C'est là que l'on a enfermé Renaud Berger après l'attentat du d'Harcourt, dans une cellule fermée, sans contact avec le monde. Pendant qu'on mène l'Instruction, qu'on poursuit l'enquête, le Renard pourrit ici. Dans le silence et dans le vide, comme oublié de tous. Pourtant, à l'extérieur, l'on ne fait que parler de lui. Nombreux sont ceux qui s'interrogent sur son histoire, sur ses motivations ; les derniers mots qu'il a lancés à la face des passants sont sans cesse répétés, amplifiés, déformés. Puis un tel va-de-la-gueule, ça promettait pour le procès ...
Monsieur Jules Spéret, directeur de la Revue mauve, participait de cet intérêt généralisé. Aussi fut-il aux anges lorsqu'il apprit que le petit Debongure avait assisté à l'altercation. Il le convoqua dans son bureau de la rue de l'Echaudé et lui proposa une entrevue avec Berger. Impossible ? Ce mot existait-il dans le langage de la presse ?!

- Bah ! Il suffit de graisser la patte au bon maton. On a de ces tuyaux-là quand on est dans le métier depuis longtemps.

Quelques jours plus tard, M. Debongure recevait un penumatique où une main étrangère avait inscrit une date, une heure, une rue attenante à Sainte-Pélagie. Notre journaliste, incité par Spéret, se rendit au rendez-vous. Dans une petite rue attenante à la prison, peu fréquentée par rapport aux autres, se tenait un tout petit homme entre deux âges. Moustache poivre et sel, uniforme flambant neuf.

- Monsieur Debongure ?

A votre réponse, il hocha la tête, calmement. Il avait l'air habitué à ce genre de petites affaires.

- Une heure dans la cellule. Chuchotez, et pas trop de bruit, sinon on s'doutera de quelque chose. Si z'êtes pas assez discrets, que l'autre crie un coup alors qu'vous vous cachez dans l'ombre. On croira qu'il d'vient fou, et ce sera bon. Suivez-moi, maintenant.

Mais il s'arrêta presqu'aussitôt, avec un petit air contrit.

- Vous avez apporté un petit supplément personnel pour ma bonne volonté ? J'ai une femme, un petit garçon malade ... Et une fille à marier ! Pour sûr que j'gagne pas assez pour tout c'petit monde !

Heureusement que M. Spéret vous avait prévenu. Vous vous acquittez de votre dette - bon gré, mal gré, avec ou sans remarque ? - et le bonhomme pousse une porte dérobée et vous mène par les couloirs déserts et froids des chemins de ronde. Derrière des portes de bois, à la lucarne fermée, vous entendez des sanglots, des cris, des grognements - et parfois des silences, plus éloquents encore. L'endroit est noir, humide, sinistre. Un rat vous court dans les jambes, alors que vous bifurquez. Vous ne croisez personne, à croire qu'il se passe quelque chose de bizarre ... Le maton y aurait-il pourvu ?

Mais soudain il s'immobilise, et vous avez à peine le temps de lire le numéro peint au-dessus de la porte - LXVI - qu'il sort un trousseau de clés, ouvre, et vous pousse littéralement à l'intérieur. Alors que la porte claque derrière vous, vous entendez peut-être des pas lointains dans le couloir, des éclats de voix, un rire (?!). Puis les deux hommes s'éloignent, parlant d'une partie de pêche à faire un dimanche ... Et vous vous retrouvez seul avec cet homme qui a fait sauter un café, a pris des vies pour une cause ... Et qui ignorait sans doute votre visite à venir.
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyMar 3 Avr - 6:32

Maximilien, bien qu’il ne se l’avoue pas, était terrifié. Les couloirs étroits et sombres, d’une froideur et d’une humidité atroces, lui avaient paru interminables. Il comprenait désormais la lueur d’effroi qui passait dans le regard des anciens bagnards lorsqu’ils évoquaient leurs années d’emprisonnement. Tout ici l’étouffait, semblait vouloir lui tomber dessus ou se rétrécir autour de lui. Tout ici sentait le désespoir, la mort, les idées enterrées, les hommes au bord de la mort. Pas une couleur, pas une voix réconfortante. Il frissonna.
Et cette cellule ! Bon dieu. Seulement quelques secondes que son regard se heurtait aux parois trop proches, trop lisses et il se croyait déjà devenu fou.

Dans un coin de la pièce, il aperçut une silhouette. Renaud Berger, qui d’autre ? L’homme du café d’Harcourt, l’homme dont on causait partout. L’homme qui fascinait Maximilien, comme tous ceux qui avaient du cran.
Le journaliste toussota. Il ne savait quelle serait la réaction du prisonnier. D’autant que Maximilien n’était pas là pour le réconforter. Il était là pour mener son enquête, récolter des informations. Il était certain, intimement certain, que c’était sa place à la Revue Mauve qui était en jeu dans cette affaire.
Il toussota de nouveau.
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyMar 3 Avr - 9:00

Renaud leva les yeux devant cet étrange visiteur qui n'avait nullement l'air d'un cogne, encore moins d'un juge et sûrement pas d'un maton. Quel était encore ce nouveau stratagème mise en place par les ennemis du peuple.

Le Renard tenta de se lever mais à peine debout il vacilla, encore trop faible et il retomba lourdement sur sa couche en grimaçant de douleur, ô comme il s'en voulait de paraitre aussi vulnérable en cette heure sombre.

Il put tout de même articuler avec force, de sa voix basse et rauque.


"Qui t'es toi ! T'as pas la mine d'un cogne et tu m'as l'air bien jeune pour un avocat ou un juge, t'es venu voir l'gus enfermé, pour pouvoir t'vanter auprès du tout pantin, à moins que t’aie quelques sales idées derrière la caboche, t'as perdu un proche dans l'explosion ? Si tu veux m'suriner crois bien que malgré mon état j'me débattrai et t'as intérêt à frapper fort en premier parce que je te raterai pas moi !"

Le renard fixait Maximilien, pas encore avec haine, mais avec une méfiance accrue par la bonne mine du journaliste. Prêt à toute éventualité, sans se douter qu'il allait pouvoir s'exprimer, et faire passer, peut être certaines de ses idées au grand public, à moins qu'il ne soit censuré, ce qui serait peu surprenant.
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyVen 6 Avr - 23:39

Fallait-il lui serrer la main ? Garder ses distances ? Le Renard était faible mais Maximilien n’était pas sûr pour autant d’être en position de force. Il posa son porte document en cuir contre le mur et se dirigea vers la couche. D’instinct, il s’abaissa au niveau du Renard.
Il avait à peine posé le genou à terre que l’humidité tachait son costume tout soigné. Il sentit l’eau s’infiltrer dans le tissu et mouiller son genou. Il n’y prêta pas plus d’attention et posa le deuxième genou au sol. Il tendit la main au Renard.

« Maximilien Debongure pour vous servir, Mr Berger. Si vous le voulez bien, je serai votre voix derrière ces murs qui vous retiennent. »

Le journaliste supporta le regard du Renard. Il avait tout à perdre dans cette affaire, il le sentait.
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyDim 8 Avr - 10:04

Renard ne s'y attendait pas à celle là, le nom de l'homme lui évoquait vaguement quelque chose, un journaleux dans une de ces feuilles de chou de cette fin de siècle, mais une feuille de chou qui demande à ce qu'il s'exprime ce n'était pas banal.

Sa méfiance naturelle, ses habitudes de solitaire, tout l'enjoignait à ne pas répondre par la positive à l'homme, mais la douleur, l'interrogatoire musclé et les quatre murs de la prison avaient dû faire s'effriter ses propres barrières.

Aussi lui serra t-il la main.


"Enchanté autant que j'peux l'être par contre garçon personne ne me sert et personne qui souhaite mon respect ne m'appelle m'sieur, l'Renard ou Renaud si tu veux mais l'monsieur c'est pour les cognes et les ennemis du peuple. Qu'est ce que tu veux savoir ? Pour qui tu travailles ? "

Le ton était donné, et si le journaleux respectait ses engagements Renard tiendrait les siens.
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyMar 17 Avr - 3:33



« Renaud alors ! Je travaille pour la Revue Mauve. Mais peu importe, croyez que c’est un besoin de vérité qui m’a mené jusqu’ici »

Maximilien était toujours agenouillé au côté de la couche du Renard. Il ne s’attendait pas à ce que le bonhomme soit coopératif en aussi peu de temps. Le journaliste lui inspirait-il de la confiance ? Il l’espérait.
Il n’avait pas baissé la tête une seule seconde. Un sourire, léger, naquit sur ses lèvres.

« Je voudrais tout savoir, bien sûr. Mais parlez-moi au moins de vous, de votre lutte, de ce qui la motive. De ce que vous pensez des grands, de ce que vous désirez faire pour les petits. Parlez-moi de tout ce qui peut mener un homme à faire exploser un café ! »

Déjà un feu brûlait dans l’œil de Maximilien. Il sortit un stylo de la poche de son costume, et un bloc-notes aussi. L’obscurité de la cellule lui empêcherait sûrement de voir clairement ce qu’il écrirait, mais il s’en fichait. Tout ce que dirait le Renard viendrait trouver une place, et de taille, dans sa mémoire.

« Je vous écoute Renaud. C’est vous qui menez la danse… »

Il demeura agenouillé.

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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyLun 23 Avr - 7:44

Il respirait péniblement, mais écoutait attentivement ce que cet homme lui disait, lui proposait, il avait légèrement tiqué à l'annonce du nom du journal mais l'homme avait une gueule, une bonne gueule. Pour autant il n'était pas encore question de confiance, l'homme devrait faire ses preuves.

Il prit la parole, la voix parfois coupé par une relance sourde dans les côtes. Ses larges mains calleuses grattant parfois une blessure récentes sur ses pommettes ou ses lèvres sèches.


"Sur moi, il y a rien à dire, je n'suis qu'un homme du peuple, aujourd'hui c'est moi qui suis ici, mais ça aurait pu être toi, être n'importe quel homme du peuple. Il suffit d'ouvrir les yeux, d'marcher dans Pantin et tu verras assez rapidement que nous allons droit dans l'mur. L'argent n'est que pour ceux qui en ont déjà et pendant ce temps nous, prolétaires crevons la gueule ouverte d'vant l'mépris de la bourgeoisie. L'aristoractie d'sang a été remplacé par la noblesse du lard-feuille. Quand on ouvre les yeux la rage ne peut que te prendre. Alors quand t'en as marre oui, tu prend une marmite et tu vas la mettre là où ça fera mal !"

Il se tut, la gorge sèche, il se servit une rasade de l'eau saumâtre qui croupissait dans son broc en terre cuite ébréché.
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptySam 28 Avr - 22:41

Le journaliste termina de griffonner. « Là où ça fera mal »…

« Mais à qui vous comptez faire mal, au juste ? Avec tout le respect que je vous dois, Renaud, l’attentat du café n’a pas beaucoup blessé les grands. Il n’y avait guère qu’une mendiante, un jeune étranger et quelques autres peu puissants. Cet attentat là a gêné mais…que peut-il changer réellement ? Que peut-il changer par rapport au chaos qu’a produit l’attentat de l’Opéra… ? »

Il était bien sûr en accord avec tout ce qu’avait dit le Renard. Cependant, il ne connaissait pas la rage. S’il lui arrivait d’être agacé par quelque injustice, il ignorait la colère. A vrai dire, il était incapable de prendre parti pour une cause. Il ne pouvait que se pencher sur cette cause, la décortiquer, la comprendre et la diffuser. N’importe quelle cause. Bien évidemment, il savait reconnaître les causes justes de celles qui ne l’étaient pas. Mais du reste…il ne fallait pas lui demander de s’y joindre. Il attendait la réponse de Renaud et espérait pouvoir aborder l’attentat de l’Opéra.

Spoiler:
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyDim 20 Mai - 10:20

Mais ce n'est pas la voix rauque du Renard qui retentit, après les paroles de notre journaliste. Dans un bruit sourd, une trappe s'ouvre dans la porte épaisse, et on y glisse un mince objet blanc ... C'est une enveloppe. Le papier est blanc cassé, mais il porte déjà des traces - doigts d'un maton malhabile, crasse sur le sol ? Un silence ... Sur l'enveloppe, on lit, simplement :
A l'attention de Renaud Berger. Confession. Qui ramasse donc la lettre, et y pose en premier le regard ... ?

Citation :
Indiquez-moi le personnage qui prend la lettre. Il recevra le texte par MP et choisira d'en informer ou non son partenaire, de lui donner tout à lire, de lui raconter seulement des bribes ou de déchirer le papier, etc. Si les personnages décident de la lire en même temps, indiquez-le à la suite et elle sera postée ici. :)
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyLun 21 Mai - 0:19

Renard allait en effet répondre lorsque la lettre tomba dans la cellule, il déchiffra les quelques mots sur l'enveloppe et l'ouvrit sans un mot.

S'approchant de la mince lucarne pour pouvoir mieux la lire, la déchiffrer serait plus juste, car si il savait lire et écrire il était loin d'être un bon lecteur.

A la fin de sa lecture et quelque soit le contenu il la tendrait à Maximilien avec un pâle sourire.


"Le chaos n'est que le prémisse de plus grand bouleversement, c'est lorsque l'homme a peur qu'il se prend à espérer, et aujourd'hui l'espoir peut renaître, par mes actions mais surtout par celle de mes camarades dehors."
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyLun 21 Mai - 0:26

La lettre est une longue et unique feuille de papier blanc, recouverte d'une écriture petite, serrée et nerveuse. A certains endroits, on dirait que la personne a appuyé davantage sur la plume, comme si elle s'était laissée emporter, parfois, par son élan ... Voici ce que les personnages liront, à tour de rôle :



Et cet aveu de faiblesse contraste assez avec cet espoir, dont parlait Le Renard ... Que vous inspire alors cette lettre, dans ses aveux, son ultime silence, son mélange improbable de courage de lâcheté, de sincérité et de dissimulation ?
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyDim 27 Mai - 23:26

Les mains de Maximilien tremblaient, ses doigts froissaient le papier sans le vouloir. Celui qui avait écrit la lettre se doutait-il qu’un journaliste se trouverait dans la cellule du Renard à l’instant précis où il la recevrait ? Il n’en savait rien et, à vrai dire, ça n’était pas très important. Il releva la tête, l’œil interrogateur. Il essaya de lire quelque chose dans le regard, dans l’expression du bagnard. Connaissait-il l’expéditeur (et dans ce cas le coupable ultime) ? Il lui rendit la lettre. Ainsi, c’était un homme (une femme ?) du monde qui avait placé la bombe…Le journaliste n’y avait pas songé, ou de loin seulement. Dans son esprit, il se repassa tous les visages dignes de réputation. Le coupable avait-il eu l’audace d’assister à l’inauguration de l’Eden ? C’était bien possible.
Apparemment, l’auteur de la lettre se trouvait désormais dans une position moins avantageuse. Qui, parmi les gens importants de ce monde, avait eu quelques fâcheuses histoires ces derniers temps ? L’esprit de Maximilien se creusait, il devenait un puits où seuls quelques traits flous de personnages juste aperçus flottaient dans une eau croupie. A force de chercher des visages il les perdait.

Il ne put s’empêcher de reprendre la lettre des mains du Renard, demeuré silencieux. Il rouvrit son calepin et recopia quelques phrases, choisies sans aucun hasard :
« après trois ans de silence » ; « En multipliant les intermédiaires, en chassant l'argent dans des milieux plus conservateurs que criminels, en jouant, simplement, sur le ressentiment des piétinés, des déçus de ce monde-là, j'ai réussi à faire illusion jusque là. » ; « position relativement confortable » ; « je perds cette place privilégiée pour des malchances, des futilités, des scandales idiots dans lesquels je n'ai jamais eu part » ; « le rôle de Lorenzaccio. »
Des indices ? Sûrement. Il referma son calepin.

« Qu’est-ce que vous allez faire Renaud ? »
Cette lettre avait-elle seulement un sens pour lui ?...
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyJeu 7 Juin - 6:00

Renard resta un long moment silencieux. Cette lettre tombait comme un cheveu sur la soupe, il ne comprenait pas tout à ce charabia de gens du monde, il était déçu à vrai dire que l'attentat fut commis par un de ses hommes qu'il haïssait tant, ce qui avait tout, ou qui avait tout eu. Déçu de ne pas tout comprendre les tenants et les aboutissant de l'affaire.

"Bonne question, j'sais pas. Ce gars là semble vouloir que son blase soit balancé au monde mais j'ai rien d'une balance et j'assume ce que j'ai fais, mais je n'assumerais pas ce qui n'a pas été fait pour et par la cause."

Il se frotta les tempes, rendu douloureuses par la lectures, les coups et les conditions précaires.


"Toi qu'est journaleux ce bout de paperasse te seras plus utile qu'à moi. Fais en ce que tu veux, j'attendrais le procès et nierai ce que je n'ai pas fait, et assumerai ce que j'ai fait. Anarchie vaincra, avec, ou sans moi."
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyMer 13 Juin - 4:15

Les derniers mots de Renard furent recouverts par le lourd cliquetis de la clé. La tête du maton de tout à l'heure surgit dans la pénombre. Il chuchota :

- Hé, faut partir ! Tout d"suite, pas le temps ! Ronde exceptionnelle !

Sans demander son reste, il saisit Maximilien par le bras et l'attire à sa suite. La porte se ferme dans un lourd fracas, laissant le Renard seul, tout à ses pensées et à ses regrets ... Pendant ce temps, Maximilien et le maton bifurquent, de couloirs en couloirs, dans la grande prison sinistre ... Une porte, deux portes ... Soudain, le soleil, qui vous éblouit, durablement.

- T'as eu c'que tu voulais, alors, mon gaillard ? Qu'est-ce que tu vas faire ?

Mais il s'éclipse, sans attendre la réponse. La lettre, la précieuse lettre est toujours dans vos mains, Maximilien. La dissimuler pourrait vous coûter très cher, c'était certain ... La publier, alors ? La confier au commissaire Roche, qu'on disait sorti de l'hôpital ? Oh oui, la question mérite d'être posée, en effet ... Qu'est-ce que vous allez faire ?
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MessageSujet: Re: Cellule LXVI   Cellule LXVI EmptyLun 25 Juin - 6:18

Ce soir-là, le jeune journaliste rentra chez lui le coeur battant. Cette lettre, ils étaient trois à en connaître le contenu. Trois, dans tout Paris.
Le lendemain matin, à l'aube, il était le premier dans les locaux de la Revue Mauve. Il tapa quelques mots sur la machine à écrire et recopia la lettre. Puis dissimula le tout dans sa poche. Il se rendit au sous-sol, où était imprimée la Revue Mauve. Il glissa quelques billets dans la poche de l'imprimeur et demanda à ce que l'article paraisse le matin-même.
Ainsi, les lecteurs de la Revue Mauve purent lire ce matin-là, en buvant leur café:

Citation :
Ci-joint une lettre probablement écrire par le coupable de l'Attentat de l'Opéra. Cette lettre a mieux à faire dans les mains de tous les Hommes que dans celles d'un seul.

"On t'a accusé de l'affaire de l'Opéra. J'en suis le coupable, et j'estime que tu dois savoir ... Tu choisiras. Ils préparent déjà la lame de la Veuve et se passeraient bien d'un procès si c'était possible. Je profite du temps qu'il reste.


J'ai beaucoup réfléchi, et j'écris, réécris cette lettre depuis plusieurs jours - depuis le jour de l'arrestation, à vrai dire. J'ai pensé à toutes les éventualités. Révèle donc cette lettre si elle peut te sauver la vie, ça me surprendrait pas. Monnaye la en échange de quelque chose, ou revendique à ton compte une action que tu n'as pas commise, si tu t'estimes perdu et que tu crois qu'en sortira grandie la Cause ... Mais j'estime que, plus qu'aucun autre, tu dois savoir ... C'est une confession dont tu n'as peut-être que faire ... N'importe, c'est une confession tout de même, et dire la vérité m'est déjà une libération.


L'action s'est menée loin du Milieu, avec le moins de rapport possible avec ceux que je connaissais pour anarchistes. Naïveté ! C'était pour brouiller les cartes, ne pas mener jusqu'à vous - c'était sans compter les autorités qui ont sauté sur l'occasion. J'avoue que je les aurais pensé plus prudents, après trois ans de silence ... C'est une erreur idiote. En faisant sauter Garnier, j'ai voulu effrayer ces gens-là, dont j'ai pourtant fait partie un jour ... C'était peut-être pas le plus grand symbole de la République, mais ces gens-là avaient été si préservés, même après les révolutions ... J'ai voulu lancer un coup dans la fourmilière ... mais je vous ai peut-être attiré plus d'ennuis qu'il ne fallait.


La position que j'avais dans le monde m'a donné la possibilité de frapper plus fort et plus haut. Les attentats ont souvent touché des lieux isolés, des cafés ou des restaurants de petits bourgeois. J'ai voulu atteindre une société plus haute, celle qui nous domine sans partage ... Ce sont les gens les plus bêtes, les plus mauvais, les plus hypocrites que j'aie jamais vus. En multipliant les intermédiaires, en chassant l'argent dans des milieux plus conservateurs que criminels, en jouant, simplement, sur le ressentiment des piétinés, des déçus de ce monde-là, j'ai réussi à faire illusion jusque là.


Je suis encore dans une position relativement confortable et jusqu'à il y a peu, je jouissais même d'une certaine réputation dans le monde. Mais l'échiquier social ne reste jamais immobile bien longtemps. Je sens que la chute est proche ... Pour comble de la stupidité, je perds cette place privilégiée pour des malchances, des futilités, des scandales idiots dans lesquels je n'ai jamais eu part ... J'avais espéré continuer, trouver le moyen de faire un autre coup d'éclat ! ... mais peut-être est-ce dans l'ordre des choses et d'autres prendront, je l'espère, le relai.


J'espère que tu ne prendras pas cette lettre en mauvaise part. Je n'ai pas eu le courage de la signer, certes, par un dernier regain de lâcheté, mais c'est la première fois depuis des mois que je suis VRAI. Je passe, j'ai passé ma vie à mentir, à prendre le masque et à jouer la comédie, pour simplement pouvoir frapper plus fort. J'y ai possiblement perdu mon âme ...


Cet acte est peut-être le dernier que je fais en homme libre : non que je craigne d'être pris, mais mes convictions vacillent à l'heure où ma chute approche. A trop fréquenter ce monde-là, j'ai peur d'en avoir attrapé les travers ... J'aurais bien dû jouer, un jour, le rôle de Lorenzaccio. J'aurais trouvé le moyen d'être vrai, même devant eux.



***"

L'article était signé "Le Fouineur" et les gens avertis l'auront sans doute reconnu!

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