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Catharina de Fréneuse
L'enfant reconnaît sa mère à son sourire.
Catharina de Fréneuse

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MessageSujet: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyJeu 13 Sep - 11:39

Je tapais compulsivement des mains dans tous les sens, comme si j’essayais d’attraper un moustique volant autour de moi. Cependant, je faisais de lents mouvements, plus haut, plus à droite, plus bas, vers la gauche. Mon bambin suivait mes gestes, ses grands yeux bleus bien ouverts, attentifs. Pour une personne plus âgée, ne serait-ce que pour mes autres fils, il s’agissait d’un jeu bien anodin, ennuyeux, mais pour lui, c’était tout un défi, il ne cessait pas de rire ce qui, du même coup, réchauffait mon cœur de mère. À défaut de passer du temps avec mon mari ou de pouvoir quitter l’hôtel particulier, je m’isolais avec mes enfants. Même si les ainés voyaient l’effet malsain qu’avaient les coups sur moi, ils étaient encore trop petits pour comprendre ce qu’il se passait : L’important pour eux demeurait ma présence, mon amour, ils avaient donc l’habitude de me voir trembler et couvertes d’hématomes, maintenant.

« Madame ! » M’interpela une domestique, me faisant sursauter. Je cessai tous jeux et me retournai lentement vers elle, un air de mort volant sur mon visage. Elle s’arrêta net, et, bredouille, ajouta « …Madame Champmézières… Est arrivée… » mais déjà mon attention était de nouveau toute à mon bébé. Je souris faiblement, Lise était tellement… tellement énergique ! Et si… « Ah ! Lise ! » L’enfant me regarda, curieux, me lever précipitamment pour courir au miroir. Mais quelle robe je portais ! Une ancienne, même pas anglaise, suédoise. Pas du tout à la mode parisienne. J’écarquillai les yeux, oubliant les soucis conjugal et marchai à pas rapides autour d’Hansel qui continuait de m’observer. Lise allait m’arracher mes vêtements et les jeter par terre, sur ma tête, par la fenêtre, tant ils étaient horriblement passés date –Elle l’avait déjà fait, j’en pleurais presque la nuit, mes robes ! Je stoppai mes pas et pris une grande inspiration pour me calmai, frottant au passage un bleu dissimulé sous ma manche pour estomper la douleur.

J’attrapai ridiculement un châle pour le glisser autour de mes épaules, cachant ma robe si peu fashion. Chose sincèrement idiote si l’on me connaissait un peu : Point frileuse, je portais des châles en hiver pour faire genre. Les hivers parisiens n’étaient pas très rudes, je les adorais, cela dit. Mais diable, nous étions l’été ! Juin ! Sans laissant mon bambin seul, je le pris doucement dans mes bras et embrassai chaleureusement sa tête avant de descendre au salon où Lise avait sans doute été conduite. Je tins l’enfant un peu plus haut dans mes bras et appuyai ma joue contre son petit nez retroussé, cachant ainsi une blessure derrière sa tête ronde.

Je soufflai doucement, enjouée « Lise ! Je suis heureuse de vous voir. » Je m’approchai d’elle, calme, puis stoppai mes pas, soudainement. « Êtes-vous venue pour un honnête essayage ou complotez-vous secrètement de dépouiller une nouvelle fois ma garde-robe ? » Je changeai alors mon visage sérieux pour un sourire plutôt large, étrange vue la situation de crise que me faisait faire mon époux aujourd’hui absent.
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Lise Champmézières
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyDim 16 Sep - 10:27

« Voyons, Catharina ! Vous laisser vous fourvoyer dans des robes hors du temps, voilà ce qui serait malhonnête ! » se récria Lise en avançant pour serrer les mains de son amie dans les siennes. Puis elle attrapa la menotte du bébé et joua avec quelques instants :

« Mon Dieu qu’il pousse vite, ce minuscule enfant ! Catharina, il faut me les amener plus souvent, ces petits, je peine à chaque fois à les reconnaître ! »

Elle chatouilla Hansel dans le cou, déposa un baiser sur sa joue. Elle adorait les enfants. Son cœur se serrait quand elle songeait que, sans doute, elle ne serait jamais mère. Edmond, Edmond, pourquoi ne m’avez-vous pas fait un fils avant de me laisser veuve, vieille bientôt… Ah, il valait mieux ne pas y penser.

Lise se redressa et tourna autour de Catharina :

« Enlevez-moi ce châle, c’est ridicule. D’ailleurs, vous avez tort de vouloir cacher le haut de cette robe, il est beaucoup plus réussi que le bas. En fait, il est même tout à fait acceptable. Oui, oui, l’idée est intéressante. Allons, c’est décidé, je vous autorise à porter cette robe ! » conclut-elle en riant.

C’est alors que, ramenée face à Catharina, elle aperçut l’hématome qui couvrait la joue délicate. Son sourire s’effaça et une expression de surprise et de peine le remplaça sur son visage :

« Oh, Catharina… »

Mais elle se reprit très vite. Cela faisait plusieurs semaines qu’elle avait remarqué. Les efforts de la vicomtesse pour cacher les marques et ses petits mensonges ne faisaient guère illusion. Mais Lise avait fait mine de ne se rendre compte de rien, évidemment, elle ne voulait pas mettre Catharina dans l’embarras. Pourtant, si cela continuait, il faudrait bien en parler.

Dans l’immédiat, Lise préféra passer outre et tapota gaiement le gros paquet qu’elle avait amené.

« Elle est quasiment terminée, vous savez ! Je pense qu’après une ou deux retouches, elle vous ira parfaitement. Oh, vous serez éblouissante ! Hansel, je vous le dis solennellement, madame votre mère sera éblouissante dans cette robe ! »
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Catharina de Fréneuse
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyLun 17 Sep - 12:40

Je gardai mon sourire, amusée, et tendis la main vers Lise pour attraper la sienne. Je serrai ses doigts avec insistance pendant quelques secondes avant de les lâcher, pour la libérer. Je pivotai un peu pour que mon bambin puisse lui faire face, ce dernier demeurant tout collé contre ma poitrine, timide. Cependant, il ne manqua pas d’échapper un rire cristallin, ses grands yeux bleus et innocents fixant la couturière « Ils grandissent très vite, oui ! Moi-même je suis étonnée… » Ma petite Gardenia semblait prendre quelques centimètres à chaque semaine, elle n’arrêtait pas de pousser et elle en était bien heureuse. Hansel, juché au creux de mes bras, quant à lui, restait ridiculement petit. Petit mais en santé, pour moi, c’était l’important. « Hansel, meg hjertet, tu ne veux pas faire un coucou à Lise ? » Je tentai de le décoller, de le tourner un peu vers la femme, mais il lutta, avec ses maigres forces. Quel timide, ce brin d’homme ! Il daigna quelques secondes de regarder l’étrange brune et alla vite cacher son visage dans mon cou « Ah, petit effarouché ! » J’embrassai sa tête, ne cillant pas lorsque Lise me tourna autour.

Son discours ne m’étonna pas, mon incapacité à assimiler la mode française était sans borne. Je gigotai un peu pour faire tomber le châle de sur mes épaules et l’attrapai avec ma main libre. Ses paroles changèrent subitement, ce qui me fit lever les yeux vers elle. Je devinai pour quelle raison elle s’était exprimée ainsi, mais ne put m’empêcher de ramener le châle contre moi « Ah ! Ne revenez pas sur vos paroles, je garde cette robe ! » Je souris, et ajoutai « Pour une fois que la grande Lise Champmé… mé… mais ne mets pas ta main dans ma bouche… ! » Je détournai la tête, visiblement, mon bébé ne voulait pas que je parle. Hansel se mit à rire devant le regard faussement sérieux que je lui fis.

Il tapota mon visage encore un moment, je me contentai de l’ignorer, m’approchant du paquet de Lise. « J’ai si hâte de la voir ! » Je fis signe à une bonne de faire monter le paquet. « Je me sens chanceuse de porter quelques-unes de vos robes, Lise. » Sourire absent, regard perdu. « On se sent belle dedans… »

Je me redressai un peu, malgré une douleur occasionnée dans une parcelle de mon dos et attrapai la main de mon amie. « Venez donc, allons me faire essayer cette éblouiiissante robe ! » Gentiment –et surtout du côté où mon visage était intact, je trainai la couturière, grimpant les escaliers menant à l’étage les jambes un peu tremblotantes, mais le visage imperturbable.
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyDim 23 Sep - 3:21

Catharina avait cette faculté étonnante de ne jamais se lasser de sa progéniture. Lise était sûre de ne pas avoir la patience de son amie. A cet instant, par exemple, le bambin prenait un malin plaisir à obstruer la bouche de sa mère, l’empêchant de parler convenablement, et Catharina riait doucement. Lise considérait la scène avec un mélange d’envie et d’ennui, et fut heureuse lorsque Catharina proposa de monter. Elle ne se fit pas prier pour la suivre à l’étage et grimpa les marches prestement, en bavardant comme à son habitude. Le temps qu’il faisait et ce que l’on disait dans la rue, la décoration de la maison, les enfants… Ah ça, la couturière avait toujours quelque chose à raconter.

A peine arrivée dans la chambre, elle se dirigea vers les hautes fenêtres et acheva d’ouvrir les rideaux. Le soleil de juin ruissela dans la pièce et la baigna d’une lumière dorée.

« Voilà, c’est excellent pour le moral ! Et surtout, nous y verrons plus clairement. »

Retournant vers le paquet qu’avait monté la domestique, Lise en défit les agrafes et écarta le papier, révélant ce qu’il contenait.

C’était une robe d’automne. Couleur feuille morte, elle était ornée de jolis motifs floraux beige et vert profond qui évoquaient une promenade en sous-bois. Lorsqu’un rayon de soleil se posait sur le vêtement, on voyait des fils dorés briller délicatement dans le tissu. La coupe était simple et à la mode ; seule l’encolure avait été arrêtée plus bas que de coutume afin, disait Lise, « de tirer parti de votre résistance au froid ; quand toutes les femmes se couvriront fébrilement et pesteront contre la brise de septembre qui les cloue au lit avec le nez rouge, votre joli cou dénudé défiera tout Paris et vous attirera la jalousie des femmes et le ravissement des hommes. »

« Eh bien ma chère, qu’en dites-vous ? »
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyLun 24 Sep - 12:49

J’hochai la tête face aux paroles de Lise, l’écoutant attentivement sans pour autant formuler de réponses plus poussées que quelques onomatopées. Mon fils se tenait plus calme, maintenant, lové au creux de mes bras, la joue écrasée contre mon épaule et semblait écouter la couturière autant que moi, la fixant avec insistance pendant que nous montions les escaliers puis nous dirigions vers la chambre.

Je poussai la porte pour entrer et laissai la créatrice me dépasser. Je plissai les yeux lorsque les rideaux s’ouvrirent violemment, éclairant la grande pièce –qui, il fallait l’avouer, avait perdu en décoration depuis la dernière venue de Madame. Puis je la rejoignis et me penchai sur le paquet qu’elle ouvrait. Je me baissai un peu plus, pour discerner davantage les détails de cette robe toute en beauté et y posai délicatement ma main pour toucher le tissu. « Elle est… tout simplement… » Je cherchai mes mots. Ne profitant plus de rien, il ne suffisait que du petit plaisir de découvrir une nouvelle robe pour m’émouvoir. « …Storslått ! » Je voulus trépigner sur place, mais mes faibles forces m’en empêchaient pour le moment, aussi me contentais-je d’attraper un bout de la robe entre mes doigts et de le faire toucher à mon bambin. Même s’il ne savait pas trop ce que c’était, il aimait bien regarder les fils dorés qui brillaient sous la lueur du –cruel- soleil d’été.

Lèvres étirées niaisement, je me reculai de quelques pas et déposai l’enfant dans son parc, ainsi il pourrait jouer en toute sécurité sans me perdre de vue. « Lise, j’espère que ça ne vous dérange pas, s’il reste ici ? » Je lui expliquai alors l’angoisse du jeune garçon qui, lorsqu’il ne me voyait plus, pensait que je n’existais tout simplement pas. Il fendait l’air de ses cris et de ses pleurs et, tout particulièrement aujourd’hui, je ne me sentais pas assez forte pour entendre mon fils pleurer. Cela brisait mon pauvre cœur de mère battue et abattue. Je revins vers la couturière, plus apaisée et surtout très excitée à l’idée d’essayer la robe. « Cette robe me donnera encore plus envie que l’été passe rapidement ! Sérieusement, Lise, comment les parisiens font-ils pour apprécier ce temps de l’année ? » En trois ans d’immersion en France, je ne comprenais toujours pas, et je ne comprendrai sans doute jamais.

J’entrepris de détacher le haut de ma robe, débutant par le col qui, jusqu’ici, dissimulait à la perfection les marques rougeâtres de mon cou. Rapidement, je le refermai et feintai un oubli « Quelle tournure faut-il avec la robe ? » Et vite comme l’éclair, les quelques boutons défaits étaient tous retournés à leur position initiale. Je tentais de repousser le moment fatidique où Lise verrait mon corps mutilé, ces bleus étaient si dégoutants sur une peau aussi claire que la mienne. Malheureusement, pour faire les ajustements de la robe, il fallait d’abord que je daigne retirer quelques vêtements et qu’elle m’aide à l’enfiler. Ah ! Je savais pertinemment que ce moment arriverait, Lise devait avoir à faire avec des clientes fort capricieuses et ce n’était pas moi tournant en rond dans ma chambre qui la dissuaderait de faire un essayage. « Faut-il également sortir un tabouret pour que je me mette dessus, ou serais-je trop haute pour vous ? » Je me sentirais davantage coupable si je devais faire travailler mon amie à bouts de bras dans les airs. J’étais suffisamment grande pour qu’elle puisse ajuster à son aise le haut de ma nouvelle robe sans monter sur quoi que ce soit, mais pour le bas, c’était là une toute autre histoire. Je ne voudrais pas non plus qu’elle travaille accroupie sur le sol, tout de même…

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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyDim 7 Oct - 4:05

Lise ne savait pas ce que signifiait « Storslått », mais la joie de Catharina se passait de traduction. La couturière se réjouissait de pouvoir lui apporter de petits bonheurs. Quoi de mieux, pour une femme malheureuse en mariage, que de jouer la coquette, se trouver belle et plaire ?

Lise rappela la domestique qui sortait et lui donna quelques instructions au milieu de sa réponse à Catharina, ce qui rendait son bavardage un peu difficile à suivre :

« Poussez un peu ce guéridon, s’il-vous-plaît. Pourtant l’été est si plaisant, à Paris ! Il ne s’y passe rien, ce qui est tout à fait stimulant. Encore un peu. Voilà, c’est parfait. Les hommes marchent moins vite et sourient aux passantes… Les dames excellent au jeu des ombrelles, qui consiste à se cacher pour mieux se montrer… Apportez-nous aussi un tabouret. C’est moi qui en aurai besoin, pour retoucher votre col ! Les enfants se gorgent de soleil dans les parcs et leurs joues prennent de jolies couleurs chaudes… Mes petites ouvrières ont les yeux plus clairs, le rire plus facile… Oh, de ce point de vue là, ce n’est pas la saison la plus efficace, évidemment. Merci mademoiselle, nous ferons sans vous pour la suite. »

La bonne sortit et referma la porte sur eux trois. Le soleil chauffait délicieusement la chambre et Lise aurait bien aimé être celle qui devait enlever sa robe… !

« Eh bien, nous commençons ? Pour la tournure, je pense que le modèle que vous portez – est-ce un simple coussinet ? – fera l’affaire, mais à vrai dire votre robe cache un peu trop bien vos formes, j’aurais besoin que vous l’enleviez pour me prononcer. »

Elle s’approcha de la jeune femme et passa derrière elle pour l’aider à se débarrasser de ses vêtements.

« Hélas, les tournures passent de mode. On croirait retourner quinze ans en arrière, lorsque la mode était aux robes serrées, vous vous souvenez ? Ah non, vous ne devez pas savoir… Enfin, cela ne fait rien, mais c’est dommage tout de même, la tournure donne tant d’élégance à la silhouette ! Oh je dis cela, mais vous savez… Catharina, que vous est-il arrivé ?? »

Le tissu s’était écarté et dévoilait la nuque, les épaules et le haut du dos. Lise, affolée, ne pouvait détacher ses yeux des hématomes qui bleuissaient la peau d’albâtre. Le cœur serré, elle maîtrisa difficilement son émotion et repassa devant Catharina. Elle lui prit gentiment les mains et demanda doucement :

« Que se passe-t-il ? »

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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyDim 7 Oct - 15:42

Avec un peu de concentration, j’arrivai à comprendre les réponses que m’accordait Lise. Elle était dure à suivre, parfois, elle savait mélanger plusieurs sujets et conversations sans reprendre son souffle, ce qui se montrait à la fois impressionnant et quelques fois énervant lorsqu’il fallait que je lui demande de répéter à nouveau. À peine deux ou trois années plus tôt, et je n’aurais rien compris aux rapides paroles de la couturière ! D’ailleurs, la première fois que je l’eus rencontrée je n’avais, effectivement, rien compris. Je m’étais contentée d’hocher la tête. À l’époque, le français n’était que pur charabia. C’en était toujours mais, aujourd’hui, j’arrivais à le comprendre.

Madame passa derrière moi et détachait soigneusement ma robe. Je me tenais tendue, espérant qu’elle n’émettrait aucune remarque sur les blessures couvrant mon corps. Malheureusement, elle fut choquée mais je ne me sentis pas le besoin de laisser paraitre une quelconque émotion. Depuis des semaines que je portais ses hématomes, ils en devenaient presque une partie intégrante de mon corps. J’avais l’habitude de les voir, ils se promenaient, changeaient de couleur, de forme. Même la douleur m’était coutumière, mais cela, c’est depuis bien plus longtemps que l’arrivée de cette rumeur ! Je terminai le travail moi-même en faisant glisser les manches sur les bras –ne manquant pas de dévoiler d’autres horreurs- et retirai complètement mon haut. Je regardai ses mains prendre les miennes, réfléchissant à ce que je pourrais bien lui dire. « Vous n’êtes pas une femme idiote, vous savez très bien ce qu’il se passe. » Je relevai le visage vers elle, neutre. Je ne paraissais ni accablé ni piteuse. Hors de question d’attiré la pitié !

Les blessures qui parcouraient ma peau étaient diverses. Mes avant-bras portaient des bleus que l’on attribuait à une poigne trop brusque et serrée. Sur mes épaules et mon dos étaient dessinés des ecchymoses dues aux bousculades et chutes violentes. Mon cou enlacé de lignes violacées. À vrai dire, certaines blessures n’étaient pas nouvelles, au contraire. Mon époux –ou du moins ce qu’il en reste- avait du mal à saisir la notion de délicatesse et fragilité. Il me traitait comme son inférieure mais me charriait comme si j’étais aussi forte que lui. « C’est beaucoup moins grave que ça en a l’air, vous savez… ! » Je la regardai, sérieuse, rien de mon regard fatiguée ou de ma douce voix laissait paraitre de la panique, du désespoir ou de la peur que je ressentais. Néanmoins, je ne lâchai pas ses mains. Même que je les levai à la hauteur de nos épaules et croisai nos doigts. « Ce qu’il se passe, Lise, c’est qu’il croit que j’ai un amant. » Je fronçai les sourcils. Qu’est-ce qu’il était ridicule de croire une telle chose ! Je n’aurais jamais cru que mon mari puisse être crédule et idiot à ce point.

« Cette robe ne se mettra pas toute seule. » Et je libérai Lise de mon emprise pour détacher jupes et jupons. Je les passai par-dessus ma tête et les laissai choir avec le haut. J’écartai ensuite les bras pour lui montrer ma silhouette. « Alors ? Dois-je mettre une tournure ou pas ? Oui, je sais, j’ai un peu maigris. Je devrais en mettre une. » J’attrapai celle que je portais quelques minutes plus tôt et ouvrit ma penderie pour la comparer à quelques autres que je possédais. « …Ou peut-être que non, puisqu’elles passent de mode ? » Je me tournai vers elle, particulièrement incertaine de la tenue à adopter. Je savais pertinemment que cela ne lui ferait pas oublier mes coups et blessures, mais je pouvais toujours essayer.
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyDim 14 Oct - 23:22

L’indifférence de Catharina déstabilisa Lise un instant, mais elle ne fut pas dupe. Elle retint néanmoins ses protestations jusqu’au moment où…

« Un amant ? Vous ? Mon Dieu, ce que les hommes sont stupides quand ils sont jaloux… Vous êtes la femme la plus sage de Paris, la plus dévouée à sa famille ! » s’écria-t-elle.

Et elle n'avait même pas eu vent de cette affreuse rumeur dans ses salons ! C'était dire si ces balivernes étaient peu fondées !

Mais Catharina tentait déjà une diversion en ramenant la conversation aux affaires de jupons. Comme si le sujet était clos. Circulez, il n’y a rien à voir ; après tout, ces blessures, c’était si peu de chose ! Evidemment, la vicomtesse n’allait pas se débarrasser de Lise aussi facilement. Songeuse, la couturière considérait distraitement la silhouette de sa cliente.

« Et il croit vous empêcher de prendre un amant en vous défigurant. Non mais vraiment, a-t-on idée de traiter ainsi un ange comme vous ?! Quel rustre, quelle brute, quel… Pardonnez-moi, ma chérie… mais quel sale type ! »

Elle s’était enflammée en parlant, et ses pommettes se couvraient dangereusement de rouge.

« Ah mais, il mériterait que vous en preniez un, d’amant ! Tenez, vous allez être merveilleuse dans cette robe ! Vous en aurez à la pelle, des amants ! Avec une tournure, oui, bien sûr, il vous en faut une, vous ne voulez pas que tout ce tissu-là pende lamentablement à l’arrière, tout de même ? – Elle lui désigna la pièce de lingerie qu’il fallait, et l’aida à la passer –. Vous arborerez la silhouette pleine et fière d’une femme qui n’a rien à se reprocher, et je voudrais bien voir qui oserait médire de vous ! Ah oui, j’aurais deux mots à lui dire, à çui-là ! »

L’indignation, décidément, ne la quittait pas. Dans sa peine et sa colère, son langage devenait moins soigné, il rappelait parfois la fille de domestiques qu’elle était.

La tournure en place, Catharina était prête à l’essayage et Lise eut un bref hochement de tête approbateur. Elle se calmait peu à peu.

« Voilà, nous allons pouvoir enfiler notre création automnale, maintenant. »

Elle alla chercher la robe, et la ramena vers son amie dont elle chercha le regard. Elle demanda :

« Catharina, qu’allez-vous faire ? »

Pas de pitié ni de supplication. Le ton était simplement sérieux. Pour elle, il était évident que la situation ne pouvait pas durer.

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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyLun 15 Oct - 13:21

La situation était parvenue à me blaser. Oui oui, un amant. Un homme autre que votre mari qui partageait votre couche, avec qui vous passiez de meilleurs moments et parliez de choses bien plus intéressantes ! Voila, mon époux, tout crédule qu’il était depuis plus d’un mois, croyait que j’avais les mœurs assez légères pour pratiquer l’adultère, une infamie ! J’hochai la tête aux contestations de Lise. Oui, j’étais sage, oui, j’étais dévouée à ma famille… Un peu trop même, mais suffisamment pour ne pas laisser place à un quelconque bonhomme qui s’attaquerait sans pitié à ma vertu.

Subitement, mon expression changea. Me défigurer ? Je portai une première main à mon visage, dissimulant une moitié, le côté meurtri, et au fur et à mesure qu’elle parlait, j’ajoutai la seconde main pour cacher mes traits derrière mes longs doigts. Me défigurer ? Ah, mais c’était si peu de changement ! Un ange ? Loin de là ! J’étais une épouse insupportable, si peu obéissante, idiote, et bien d’autres choses ! C’est ce qu’il me disait, du moins, et, avec le temps, je m’étais mise à y croire. Ces franches paroles, bien que poussées, étaient très appréciées mais, elles finirent par m’achever. J’écarquillai largement les yeux, grandes billes bleues cadavériques, effarée. Prendre un amant… ? Prendre un amant, nom de Dieu ! Des pelles d’amants ? Je reculai de quelques pas, aussi apaisée qu’une jeune fille lors de sa nuit de noce. Finalement, cette robe n’était pas si jolie, hors de question de la porter !



En réalité cette robe était merveilleuse, Lise avait beaucoup trop de talents pour mon bien. Je la laissai passer la tournure autour de ma taille, maintenant que la folie des amants étaient passées. Je marmonnai un faible « …Mais… mais je ne veux pas d’amants… » Inquiète. Il se trouvait, en effet, que j’étais timide, gênée, angoissée. Non, pas d’homme qui ne soit pas mon mari.

Néanmoins, j’esquissai un sourire. Lise était pleine de vie, rafraichissante ! Sa présence me soulageait, apaisait mon cœur meurtri par mon mari agressif. Je me tournai vers elle et pris son visage entre mes mains froides « My Elske, ne vous énervez pas ainsi. » Je la libérai, tentant un sourire rassurant. J’acquiesçai lorsqu’il fut temps d’essayer la fameuse robe ! Avec une pointe d’excitation, j’allais la prendre et la serrai dans mes bras, très désireuse que l’automne arrive pour la porter. « Je porte habituellement peu de couleurs foncées, mais j’ai une totale confiance en vous. » Ma garde-robe enrichie de pastels et autres pâles me donnait des airs plus doux, moins snob. Les foncés et saturés me donnaient un teint étrange, une allure de mondaine qui se prenait pour plus que ce qu’elle était réellement mais, depuis le temps, Lise me connaissait. Je savais que je n’aurais pas l’air bête et vaniteuse dans l’une de ces robes. « Et bien je pensais mettre la robe mais…. Ah ! Ce n’est pas de cela que vous parliez… »

Je baissai les yeux au sol, mal à l’aise, avant de redresser le regard vers mon amie. J’eus une sorte de moue désolée, une tête de prisonnière, de femme déchue. « J’ai pensé à bien des choses mais… Rien ne me va mieux que de rester avec Monsieur, pour le moment. » Je jetai un coup d’œil à mon bambin, si petit et faible pour son âge. C’est alors que j’eus l’idiotie de renchérir, avec un haussement d’épaules et un large et faux sourire « …Ou bien vous n’aurez qu’à venir à mes funérailles… ! Ça me ferait plaisir. » L’humour noir dans la vie de tous les jours, c’était plus ou moins passable. L’humour noir lorsque l’on était une femme battue et complètement à terre, désespérée, c’était autre chose.

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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyVen 19 Oct - 23:37

Un amant. Bon. Des amants à la pelle… En se calmant, Lise se rendit compte qu’elle avait complètement affolé la sage vicomtesse. Elle eut un air un peu désolé et murmura : « Mais non, Catharina, mais non, je plaisantais… Bien sûr que vous n’êtes pas femme à prendre un amant. » Comment une femme de la constitution de Catharina pouvait-elle être soupçonnée du péché de la chair ? Comment son idiot d’époux avait-il pu imaginer une chose pareille ?

Etrangement, l’image d’Edmond s’imposa à l’esprit de la couturière, comme s’il eût pu être d’une quelconque aide à Catharina face au vicomte. Si Edmond Champmézières pouvait être particulièrement railleur à propos du mariage, il avait des principes et de la sensibilité. Non, Edmond ne serait pas resté insensible à la situation de Catharina. Et soudain, de manière imprévue, Lise ressentit pleinement l’absence de ce mari taquin et tendre.

Elle refoula rapidement le trouble qui montait. Qu’aurait fait Edmond dans le cas présent, de toute façon ? Il eût été sensible, certes. Bienveillant, oui. Mais compétent ? Sans doute pas. Aux relations humaines, il préférait les sciences. Aux labyrinthes du cœur, il préférait ceux de la connaissance et de la réflexion : philosophie, anatomie, épistémologie, théologie… Déchiffrer la calligraphie arabe ou chinoise le fascinait ; lire entre les lignes d’un mot doux le dépassait et, pire, le barbait. Erudit, intrépide, habile négociateur, fantaisiste à ses heures, observateur impitoyable de la société... Mais humaniste. Edmond était de la veine des Lumières, en quelque sorte.

Rien à voir avec ce stupide vicomte Ainsworth. Idiot d’époux auquel Catharina comptait rester enchaînée, apparemment, jusqu’à ce que mort s’ensuive… Jusqu’à ce que mort s’ensuive ?

« Vos funérailles ??! » répéta-t-elle, incrédule. La plaisanterie lui était insupportable. Loin de répondre au douloureux sourire de Catharina, Lise fronça les sourcils et répliqua sèchement : « Ma chère, l’humour noir ne vous sied pas. Du reste, l’humour noir ne sied à aucune femme dans votre situation. »

Plus gentiment, elle aida Catharina à passer la robe. L’essayage détendait, par intermittences, l’atmosphère figée autour de la violence du vicomte Ainsworth. Il y avait des retouches à faire, évidemment, les ourlets à terminer… Mais l’essentiel du travail était fini. Lise recula d’un pas pour admirer son œuvre sur celle qui la portait, et un vrai sourire illumina son visage :

« Ah, je le savais ! Les couleurs pâles vous correspondent, évidemment. Mais cet ensemble sous-bois, ah, cela vous va à ravir ! Vous avez vu ? Vous avez l’air plus mûre, plus assurée, plus… » sensuelle, mais elle n’osa pas prononcer le mot, de peur d’effrayer encore la jeune femme. « Plus femme. C’est charmant. Cela vous plaît ? »

Mine de rien, elle laissa à la jeune mère le loisir de s’admirer dans le miroir, et se tourna vers Hansel qui gazouillait dans son coin. Elle s’approcha, se pencha, joua avec la menotte de l’enfant. Derrière une apparente légèreté, son ton se fit plus grave.

« Vous savez, Catharina, pourquoi l’on considère que le mariage est indissoluble ? Parce que la société trouve bon que les enfants de France soient élevés par un homme et une femme qui ne se quittent pas. Foyer stable donc société stable ; foyer heureux donc société heureuse. A partir du moment où la relation entre l’homme et la femme est plus nuisible que bénéfique, l’indestructibilité du mariage perd toute sa signification. »

Il n’était pas commun pour une femme de parler ainsi. Lise en était bien consciente ; elle avait lu un auteur qui parlait de ces choses un peu modernes, et cela l’avait marquée. Etait-elle en train de conseiller le divorce à Catharina ?

Elle hésita un instant, le regard distraitement posé sur le bébé, puis ajouta :

« Si vous aviez besoin, eh bien, d’un soutien… Ma maison est ouverte pour vous et vos enfants. Quand vous voulez. »

Dos à Catharina, elle se mordilla la lèvre. Evidemment, sa proposition était loin d’être parfaite. La maison de couture grouillait d’activité, elle était bien peu propice à la retraite. Sans compter l’aspect financier : tous ces enfants à nourrir… Ce ne serait certes pas la même vie qu’à l'hôtel particulier des Ainsworth. Mais cela ne valait-il pas mieux que la vie que menait Catharina en ce moment ? Quel était le prix à payer pour l’indépendance et la dignité ?
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptySam 20 Oct - 10:35

Et Lise approuva : Pas d’amant, mais elle n’était pas prête à assister à mes funérailles. Je me demandai si je devais être triste ou réconfortée. J’eus une moue étonnée mais n’ajoutai rien, ne voulant pas inquiéter davantage ma chère amie. Si je pouvais me contenter en imaginant de beaux et jolis arrangements floraux sur mon cercueil, ce n’était pas le cas de tout le monde. J’enfilai donc la robe, y allant très lentement pour les manches. Le frottement du tissu épais sur mes bleus n’était pas agréable, même douloureux. Je serrai les dents, tentant de ne rien montrer. Lise avait bien mieux à faire que de se soucier de mes petits bobos personnels. Je fis quelques pas, lents, pour me mettre devant le miroir. J’aplatis la robe contre mon corps meurtris et levai les yeux vers la glace, restant de marbre le moment de me jauger. La robe était magnifique. Sur ces mots, je me raidis et me tins plus droite, comme si j’étais équipée d’une quelconque assurance, d’un certain prestige. J’approuvai en bougeant lentement la tête « Storslått ! Comme j’ai dit, elle est sublime. »

Je palpais les tissu quand Lise s’en était allée près de l’enfant pour enchainer sur un discours plus sérieux. Je m’approchai doucement d’elle pour écouter son discours, moyennement à l’aise dans la robe encore en cours. Je fermai les yeux, le temps de penser. Détruire mon mariage ? Malheureusement, ce n’était pas envisageable. On m’en avait déjà parlé et il s’agissait d’une chose tout à fait impensable. Lorsque l’on était une femme mondaine, éprise de ci, éprise de ça, c’était possible, mais en tant que mère bienveillante éprise de ses bambins, je ne pouvais me résoudre à suivre une voie qui me séparerait de mes enfants, et surtout, un chemin qui les laisserait aux prises de Monsieur Ainsworth, cet homme qui remplissait la tâche de père aussi bien que celle d’époux. « Les enfants de France sont plutôt élevés par une nourrice. » Je disais cela sans reproche, alors que mon regard était tout porté sur le petit enfant qui s’amusait à attraper la main de Lise, la regardant avec ses énormes yeux bleus clairs, maladroit dans ses gestes enfantins.

La suite de ses paroles me surprit et me touchèrent à la fois. Lise, veuve depuis quelques années, travaillant pour subvenir à ses besoins, seule, me proposait d’aller chez elle et d’héberger cinq personnes qui ne pouvaient travailler et la mènerait assurément à la ruine ? Quelle délicate attention, j’en esquissai même un sourire. Il était évident que je ferais la même chose pour elle, Lise était l’une de mes rares amies proches, après tout, mais vivre sur les économies d’une honnête couturière me paraissait abusé. Elle était agréable et enjouée, mais ce n’était pas une raison pour profiter d’elle ! « Votre proposition me va droit au cœur, Lise, sincèrement. Je vous remercie pour l’espoir que vous tentez de me donner. » Car après tout, ce n’était qu’une phrase dite par pure gentillesse voire pitié, pour ne pas paraitre sans cœur devant une femme aussi faible que moi. Je m’approchai d’elle et patientai jusqu’à ce qu’elle se redresse pour passer mes bras sous les siens et laisser ma tête retomber sur son épaule. Tout en prenant appui sur elle, je cognai du talon contre le sol, contrariée, avant d’ajouter « J’en ai plus qu’assez que cet imbécile me reproche une chose que je n’ai pas fait alors que lui il est passé sur toutes les c… alors que lui il a fait pire. » Murmurais-je, un peu à moi-même, tâchant de ne pas faire chuter mon langage dans l’estime de Lise. Je redressai la tête, regardant la designer de mode dans les yeux avant d’encadrer mon visage de mes mains, une soudaine panique me possédant « Mais je le mérite ! » Je refermai mes doigts sur mes cheveux pour agripper mes mèches et cherchai un point auquel accrocher mes yeux « Il m’avait ordonnée de ne pas parler à un autre homme, il me faisait confiance, c’est de ma faute si aujourd’hui il se sent complètement trahi ! »
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyDim 28 Oct - 5:29

Lise fut assez étonnée de la petite démonstration de colère de Catharina – c’était si rare ! Le « passé sur toutes les c… » la stupéfia tout à fait, et elle adressa un regard surpris (mais pas vraiment désapprobateur) à son amie. En revanche, elle sentit la moutarde lui monter au nez lorsque Catharina effectua un revirement total et offrit un spectacle terrifiant de culpabilisation. La couturière parut désemparée un moment, impuissante à comprendre les méandres relationnels du couple Ainsworth. Elle tapota gentiment le bras de la vicomtesse dans une tentative de réconfort. Sa voix s’éleva, inhabituellement calme :

« Voyons, Catharina, comment pouvez-vous dire cela ? Vous interdire de parler à un autre homme, est-ce une façon de se comporter avec son épouse ? En quoi est-ce là une marque de confiance ? »

Elle chercha le regard de son amie et rencontra deux yeux immenses, fatigués et perdus. Comme cet homme l’avait détruite !

« Votre vicomte est un homme jaloux... violemment jaloux. Que vous ayez ou non parlé à un autre n’a aucune importance ! Que veut-il au juste : vous enfermer dans une tour d’ivoire, ne vous y visiter que lorsqu’il veut un nouvel héritier et passer le reste de son temps auprès de cat… auprès d’autres femmes ? »

Après un temps de silence, doucement, elle lui effleura la joue et lui sourit :

« Vous méritez tellement mieux. »

Elle eut un geste pour désigner Hansel :

« Et vos enfants méritent mieux, eux aussi, que de grandir avec un père qui maltraite leur mère. »

L’argument ultime. L’argument qui ne visait plus le cœur de l’épouse – que Lise jugeait complètement déboussolé – mais le cœur de la mère. Et si Catharina ne voulait pas agir pour son propre bien, elle serait capable de tout pour protéger ses enfants.
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyLun 29 Oct - 9:16

« Dit ainsi, parler à un homme et la confiance ne semblent pas avoir de rapport… » Je soufflai, je me le permis, lorsque Lise toucha mon bras et baissai les miens le longs de mon corps. J’eus une moue inquiète, pensive. Je cherchai la réponse dans le regard de Lise, l’écoutant de manière attentive, comme captivée. Était-elle en train de retirer la culpabilité de ma tête ? Cependant, ses paroles me vexèrent. Je tentai de m’y opposer, en vain, ma réaction était plutôt lamentable. Venir me voir que pour un nouvel héritier ? Il n’était pas ainsi ! Mais… « S’il pouvait m’enfermer, il le ferait, pour sûr. » Peut-être était-ce pour cette raison qu’il me frappait, pour m’empêcher de m’enfuir avec mon supposé amant. Mon époux devra se rendre compte bientôt –je l’espérais- que je n’étais pas comme les femmes peu vertueuses qu’il côtoyait.

Lorsqu’elle désigna le bébé, je me penchai un peu vers l’avant, vers lui. La robe dépourvue d’épingles glissait sur mon corps, remontait au niveau des hanches et plissait de manière si peu esthétique, élégante. Évidemment que mes enfants méritaient mieux. Innocents et candides, ils se questionnaient sur l’attitude de leurs parents. Lise avait visé juste, le point sensible qui me ferait évidemment réfléchir. « Je sais, ma chère, je sais…! » Je soupirai de désespoir, bougeant dans ma robe pour la replacer convenablement sur mes épaules. « Mes enfants écoutent leur père, mes fils veulent devenir comme lui, c’est normal mais… Quel exemple est-il en train de leur donner ? » Soucieuse, je m’avançais vers l’enfant et caressai avec une délicatesse infinie sa tête ronde et dégarnie. Monsieur avait d’affinité avec ses progénitures que moi avec de potentiels amants, c’est-à-dire très peu voire rien.

Lise n’était pas la première à me proposer de quitter mon mari –de manière plus ou moins sous-entendue- et je n’étais pas complètement contre cette idée. Si mon esprit d’épouse me poussait à désirer m’éloigner de lui, mon cœur de mère m’y rattachait automatiquement. Si je le quittais, y laisserais-je mes enfants ? Et si non, que deviendraient-ils ? Seront-ils charriés et rejetés pour ne pas avoir de père ou bien auront-ils un caractère complètement décalé parce que je les aurais élevés seule, sans exemple d’autorité paternelle ? « Mais pourraient-ils s’en sortir, sans père, Lise ? » Malheureusement, j'ignorais la réponse et je préférais ne pas agir dans l'incertitude. « Mais nous nous égarons, il vous faut faire les dernières modifications sur cette robe, avec que mon époux revienne. »
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyJeu 1 Nov - 2:28

Un peu en retrait, Lise suivait du regard les gestes tendres que la mère prodiguait à l’enfant. Elle était à bout de son argumentaire. D’ailleurs, il valait peut-être mieux ne pas insister pour ne pas braquer Catharina. Celle-ci avait son cheminement à faire, qui ne pouvait pas être brusqué.

« Un jour vous rassemblerez votre courage et vous partirez, j’en suis sûre. Ce jour-là, vous aurez au moins une porte à laquelle frapper, n’oubliez pas. » dit Lise doucement.

Elle s’approcha de son amie, sourit en la voyant maladroite dans sa belle robe mal ajustée.

« En attendant, vous avez raison, nous avons du travail. Voulez-vous vous tenir par ici ? Voyons d’abord les épaules. »

Elle grimpa sur le petit tabouret pour atteindre plus aisément le haut du vêtement. Pinçant le tissu, tirant délicatement, posant une épingle de temps à autre, elle ponctuait ses gestes de quelques mots inutiles : « Voilà. Encore un peu… C’est ça. Parfait. Alors, par ici… ». Pendant quelques minutes, ce furent les seules paroles prononcées par la couturière. En réalité, elle pensait toujours aux violences du vicomte Ainsworth. Elle prenait plaisir à ajuster cette robe sur Catharina comme si, en faisant cela, elle prenait une revanche sur son époux : lui s’acharnait à faire ployer ce corps sous les coups ; elle en prenait soin, s’attachait à en souligner la beauté, l’innocence. Inconsciemment peut-être, elle voulait enseigner à Catharina à apprécier ce corps, à l’habiter, à ne pas l’habiller que pour le cacher.

Après quelques instants de travail, Lise sauta au bas de son petit banc et admira l’ouvrage à moitié achevé dans le miroir, à côté de Catharina. Tout le haut de la robe tombait bien, à présent, et serrait la silhouette corsetée de la vicomtesse.

Le reflet de Lise sourit à celui de la jeune femme en robe d’automne. Le soleil dans la pièce la rendait plus blonde encore, tandis qu’il donnait des reflets cuivrés au chignon de Lise. Dans son parc, Hansel s’endormait. Après les tensions de leur discussion, la chambre respirait paisiblement.

« Ses cheveux, effleurés du souffle de l'automne,
Dessinaient sur sa tête une pâle couronne,
Et, de l'air matinal par moments agités,
Répandaient sur son front des reflets argentés ;
Mais, à travers ce front où son âme est tracée,
On voyait rayonner sa sublime pensée…
»



« Allons bon, vous m’inspirez du Lamartine, maintenant ! »

Et elle rit, parce qu’il n’y avait que ça à faire.

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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyVen 2 Nov - 9:32

Craintive, j’opinai lentement de la tête. « Et ce jour-là, je vous en serai reconnaissante. » Mais ce jour n’était pas arrivé, pas encore. Me monter contre mon époux me paraissait improbable, presque hors portée. Penser uniquement à me révolter contre ses mots et injures me semblait déjà énorme ! Néanmoins, je me trainai vers Lise, un nouveau sourire innocent ayant naquit sur mes lèvres. Je me postai près du tabouret et laissai la fée peaufiner son œuvre. Je levai les yeux vers elle, la regardant monologuer sur son travail, amusée. Puis je regardai les détails de la robe, glissant un doigt contre la dentelle délicate qui ornait le haut de celle-ci. Je pourrais adopter n’importe quelle dentelle que la mode parisienne m’imposera, j’adorais ces filages fragiles et légers, je n’avais jamais repris la couturière la dessus mais, en ce qui concernait les manches, ah ! Ça, c’était une autre chose. L’Angleterre avait eu le bon gout de les garder à une taille raisonnable, mais les français, eux, non. De là étaient nés mes gouts douteux en matière de mode et les caprices que je soumettais à Lise à propos de mes robes. « Pas trop encombrantes, pas trop épaisses, pas trop voyantes. » Pour le reste, elle avait carte blanche.

Me tournant vers le miroir, je joignis les mains près de ma poitrine et admirai la robe une fois ajustée. « Je ne me lasse jamais de vos robes, à chaque fois vous me surprenez. » Cependant, Lise ne s’arrêta pas là et continua sur des paroles qui me parurent d’abord hors de sens. Je l’écoutai, tendant l’oreille pour essayer de comprendre les subtilités de ses… vers ? Je joignis ensuite mon rire au sien. « Ce que vous dites est très beau, mais je suis navrée, car je ne connais pas de Lamartine. » Ni très peu d’écrivains, littéraires ou qui que ce soit de français. Je pouvais le comprendre, j’arrivais à le parler de manière pas trop mauvaise, la lecture romantique ira à plus tard !

Une mine plus enjouée et moins abattue sur mon visage, j’ajoutai doucement « Si vous ne travailleriez pas autant, je vous inviterais plus souvent. Votre présence m’apaise et me rend de bonne humeur. » Hélas Lise était couturière six jours sur sept et le dimanche, elle avait bien d’autres choses à faire que de trainer avec une noble riche refrognée et battue. De plus, l’invitée plus souvent augmenterait les risques qu’elle puisse croiser mon mari, chose que je voulais éviter à tout prix. En plus que les deux possédaient un caractère plutôt fort… Je n’avais pas peur d’un affrontement, mais je ne désirais pas non plus faire régner un climat de tension. Surtout que Monsieur n’appréciait pas Lise –Une femme qui travaille, une ouvrière ! Et en réalité, il n’appréciait personne mis à part lui-même.

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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyJeu 8 Nov - 7:47

« Oh, je vous ferai parvenir un ouvrage de poésie. Mais pas Lamartine, il est un peu trop… larmoyant. »

A vrai dire, Lamartine n’était sans doute pas le meilleur choix pour une jeune femme qui avait tendance à céder à ses idées noires. Même Lise se laissait parfois avoir par la mélancolie traînante du cher Alphonse, c'était dire.

Les derniers mots de Catharina la touchèrent plus qu’elle n’aurait voulu l’avouer. Après un temps de silence, elle sourit et, comme toujours lorsqu’elle ne savait trop quoi répondre, se laissa aller à un flot de paroles et d'activité :

« Je le regrette au moins autant que vous ! Vous me reposez des Parisiennes… Et vous me laissez une telle liberté d’action, c’est inespéré ! Et tous ces petits garçons adorables ! » Elle évita d’évoquer la fille, qu’elle trouvait infecte. En parlant, elle invita d’un geste Catharina à monter à son tour sur le petit tabouret, et se mit à arranger le bas de la robe. Quelques épingles pincées entre ses lèvres rendirent la suite un peu difficile à comprendre. « Tenez, rien que d’entendre le fon de fotre foix, fe fuis de bonne humeur ! Un fiolonfelle du Nord ! Non, croyez-moi, f’est moi qui prends le pluf de plaifir à nos rencontres ! Fous fiendrez foufent me foir, n’est-fe pas ? Fe finirai par fous faire aimer la mode, fous ferrez ! Ah, voilà, c’est mieux. C’est mieux, n’est-ce pas ? » Loin de parler de sa prononciation, elle désignait le bas de la robe. « Et bien ma chère, nous avons bien travaillé. Ces petites retouches seront finies la semaine prochaine, je vous ferai livrer la robe ou bien vous viendrez, cela me permettra de vous voir un peu ! »

Elle se redressa souplement, rassembla son petit bazar. Il lui coûtait de devoir partir et de laisser Mme Ainsworth aux griffes de son époux. Mais elle avait trop tardé, déjà.

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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyDim 11 Nov - 4:10

Je lui souris doucement « Je ne sais pas si je lis suffisamment bien le français pour me mettre à la poésie. » Je pris un air faussement secret, comme si j’étais affecté par ses lacunes. Le français était une langue cruelle et difficile. À mon âge, l’apprendre était une tâche ardue. C’est qu’ils faisaient des assemblages de lettres très inutiles pour faire un son ! Mes enfants s’y débrouillaient mieux, eux, avec leur petite tête en développement !

Je trainai ma nonchalante carcasse et grimpai sur le tabouret. D’abord instable, j’agitai un peu les bras pour trouver mon équilibre et m’immobiliser –ou presque. « Si je vous donnais des instructions plus précises, vous les ignoreriez, protestant devant mon mauvais gout ! » Mes paroles ressemblaient à des reproches mais étaient dites sur le ton de l’humour. Je portai une main à mon cœur, touchée qu’elle aime mes petits garçons, même si son antipathie pour ma fille me rendait un peu triste. Gardenia n’était pas si infâme ! Elle s’exprimait de manière un peu plus brusque que les autres… Lise tournait autour de moi, elle posait des épingles dans le bas de ma robe, et je pouvais m’empêcher de m’incliner vers elle, comme pour la suivre. « Vous me demandez, à moi, si c’est mieux ? Allez, j’ai une confiance aveugle en vous... Et des gouts lamentables. »

Par la suite, je me contentai d’hocher la tête. Je ne sortais plus depuis plusieurs jours à cause de mes maux et blessures et je doutai aller chercher ma robe moi-même. Dans quel état serais-je la semaine prochaine ? Aurais-je l’œil complètement noircis sous un coup de travers et trop violent ? Pendant que Lise rassemblait ses choses et moi je m’essayai à retirer la robe toute seule pour la lui remettre. Je détachai un bouton, peut être deux, et quémandai ensuite son aide pour la retirer. Je me rhabillai ensuite de ma robe très simple, ordinaire et m’approchai de mon bébé. « Enfin, il s’est endormi ! » De voir que la dame grouillante ne lui enlèverait pas sa mère l’avait peut-être apaisé ? Roulé sur le ventre, il dormait calmement. Je le retournai sur le dos et caressai son bedon rebondi avant de revenir vers Lise. « Je vous accompagne jusqu’à la porte, Lise ? » En fait, ce n’était pas une question, je le lui imposai, tout simplement et sortit avec elle de la chambre, commandant à une bonne de faire porter ses choses dans le hall d’entrée.

Si Hansel s’endormait, l’heure de la sieste était terminé et son frère, lui s’était réveillé. Lentement, il avait trainé ses petits pieds à l’extérieur de la chambre et trônait au centre du corridor dans sa large robe de nuit. « Je crains que vous devrez retarder votre départ, ma chère. » Honey Edward Ainsworth frotta un de ses yeux et prit quelques secondes avant de se rendre compte que… Oh ! Qui était cette mère qui se tenait près de la sienne ? Ah ! C’était Lise ! La gentille Lise, la douce Lise, l’amie-de-mère Lise. Un sourire fendit aussitôt sur son visage et il prit son élan pour nous rejoindre. Il trébucha dans son vêtement et s’étala sur le sol. Moment de silence… Il se redressa et reprit sa course enfantine vers la couturière et attrapa sa jupe dans ses courts bras, tout excitée. « Madame, madame ! Venue me voir ? Yes ! See that ! ‘M porter robe de vous ! » Il sautilla autour d’elle avant d’aller prendre sa main. Avec ses grands yeux pairs, il ne cessait de la regarder, tout enjoué. C’est que l’enfant aimait beaucoup Lise Champmézières, les femmes en général, aussi.
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyJeu 15 Nov - 9:14

Ah, Honey ! C’était son préféré, évidemment. L’aîné était attachant aussi, mais Honey était… terriblement attachant. Le sourire qu’il lui adressa en la reconnaissant lui fut rendu en toute sincérité. On ne pouvait que sourire à cet enfant-là !

« Bonjour, Monsieur Ho… ouille. »

Un instant, elle eut peur que le garçon ne se mette à pleurer de sa chute, mais non. Ouf. Lorsqu’il vint s’agripper à elle, elle se baissa, déposa un baiser sur sa tête. Quant à comprendre le babillage de l’enfant, c’était autre chose. Mais son enthousiasme parlait pour lui. Comme il se pavanait dans sa petite robe de nuit, Lise éclata de rire :

« Que vous êtes joli, Monsieur Honey ! Que vous me semblez grand ! Ah, bientôt on vous habillera comme un homme ! »

Et la petite main, chaude encore de la sieste, se glissa dans la sienne. C’était sans doute pour cela qu’elle préférait Honey. Il offrait son affection, sa tendresse. Il ne comptait pas. Il regardait avec confiance, jouait avec innocence. L’aîné, lui, avait déjà cette retenue adulte, ce sérieux enfantin qui était un peu triste.

Avec Honey, et même si elle ne comprenait pas la moitié de ce qu’il disait (l’inverse étant sans doute vrai aussi), elle entrait dans le monde un peu absurde des petits. Il lui était arrivé, une fois, de partager son jeu. Elle avait accepté alors les répétitions sans fin, les règles aberrantes, les temps d’attente, les moments d’excitation dont elle ne saisissait pas les causes.

Lise aurait aimé, oui, avoir un petit bonhomme comme celui-là, qui l’aurait appelée « Maman ».

Elle s’accroupit pour être à sa hauteur, prit la menotte dans la sienne et, sortant un joli petit dé à coudre de sa robe, en coiffa l’index du garçon :

« Tiens, il est pour toi. Il s’appelle Aldo, il est italien… Bon il n’est pas très bavard, mais je suis sûre que si tu le mets tout près de ton oreille et que tu écoutes très très attentivement avant de t’endormir, tu l’entendras. » Chuchotant : « Il paraît que, parfois, il chante des airs d’opéra mais je ne sais pas si c’est vrai, moi, je ne l’ai jamais entendu. »
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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyLun 19 Nov - 15:17

Entendre mes fils se faire vouvoyer et appeler Monsieur m’arrachait toujours un petit sourire. Je levai les sourcils lorsque l’enfant trébucha, mais ne semblai pas réagir ou m’alarmer. Il tombait… tout le temps ! Se heurtait à tous les meubles à sa disposition, butait dans ses jouets, dans les tapis… Si au début je me mettais dans tous mes états –à cet âge-là, la tête est encore fragile- maintenant, je m’inquiétais que lorsqu’il y avait cris et larmes. Grâce à L’Effet Lise, Honey c’était habilement relevé et avait plongé vers la couturière.

Il était heureux qu’on le complimente, qu’on lui dise qu’il était grand et presque un homme ! Un peu en retrait, je frottai le bleu sur ma joue, l’épuisement me rattrapait. « Et toi… » Je me redressai, sortis de mes pensées et répliquai « C’est vous, Honeysuckle*, tu dois la vouvoyer. » Il s’arrêta dans son élan pour remodeler ce qu’il allait dire dans sa tête. « Et vous… allez do… vêtements pour moi, when je… suis homme ! » Le bambin de deux ans nageait difficilement entre l’anglais et le français –et ne parlons pas du norvégien !, de plus, il était très excité et en venait même à bégayer. Je pris une inspiration pleine de patience « Lise ne parle pas anglais, meg elske. Il faut que tu dises des mots tous en français, sinon elle ne comprendra pas ce que tu dis. » Même moi j’arrivais à me perdre dans ses phrases coupées n’importe comment et ses mots bilingues ! Il fronça les sourcils, contrarié : Quel honte pour un grand homme comme lui de se faire reprendre par sa mère devant une jolie dame ? Il demeura dans ses jupes.

Heureusement, Lise Champmézières était une femme remarquablement patiente. Une femme qui avait eu le malheur de donner un peu d’attention à Honey qui lui, c’était engagé à lui rendre au centuple. D’une oreille attentive, j’écoutai sa petite histoire tant dis que l’enfant jouait avec son nouveau dé à coudre, tentant d’y rentrer tous ses minuscules doigts. Une main vint cacher ma bouche et dissimuler un rire. De l’opéra… Sérieusement ? Visiblement, elle était aussi douée pour créer des robes que pour raconter des histoires. Ému, le bambin marmonna « Pour moi ? » Il était content, il leva même les doigts vers moi pour me montrer son nouveau meilleur ami et j’hochai la tête, souriante. « Merci you ! Je va le mettre dans mon oreille cette nuit ! » Et il passa ses bras autour du cou de la femme qui était à sa hauteur, son entrain le fit même sautiller, alors qu’il était toujours accroché à elle. « Il se pourrait, madame, qu’il vous… » Je n’eus pas le temps de terminer ma phrase qu’Honey avait pincé ses lèvres pour les plaquer sur la joue de mon amie.

Voilà comment la gentille et jolie Lise fut attrapée par Honey Ainsworth, prédateur de ces femmes qui avait le malheur de tomber pour ses beaux yeux clairs.

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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyJeu 29 Nov - 8:35

Lise n’avait jamais su résister aux yeux clairs. Quand Edmond lui-même lui lançait ce regard perçant dont il avait le secret, d’un bleu bouleversant, elle ne pouvait rien lui refuser. Et il savait en profiter, le sacripant.

En l’occurrence, elle était sous le charme d’un enfant de moins de trois ans. Lorsqu’il s’accrocha à elle, tout excité, et vint lui offrir un baiser aussi affectueux et collant que dynamique, Lise faillit perdre l’équilibre. Tout accroupie qu’elle était, elle dut se rattraper au mur du couloir pour ne pas tomber tout à fait.

« Oh… »

Et elle éclata de rire. Elle rit pendant de longues secondes, incapable de s’arrêter, l’enfant toujours serré contre elle, avec son odeur chaude de tout-petit à peine réveillé, elle rit à en perdre tout à fait l’équilibre malgré le mur… et elle dut s’asseoir par terre. Catharina devait être affreusement gênée de la voir ainsi, oubliant toute dignité ; et bien surprise devait être la bonne qui pointait la tête là-bas ! La situation était si cocasse que la couturière fut d’abord incapable de reprendre son sérieux. Mais une porte claqua au rez-de-chaussée, et Lise se calma : était-ce le vicomte qui rentrait ? Elle se dégagea doucement de l’emprise de Honey, se releva et vint prendre le bras de son amie, les yeux encore un peu humides d’avoir trop ri.

« Ah, ma chère Catharina, je suis navrée de vous offrir ce spectacle !… » Un sourire un peu contrit ponctuait ses paroles. « … Mais cela faisait bien longtemps que je n’avais autant ri ! »

Il lui semblait d'ailleurs que l'austère couloir résonnait encore de son rire. Elle se pencha vers Honey, déposa un baiser sur sa joue :

« A bientôt, à bientôt cher petit. Sois bien gentil avec ta maman. » Elle fit mine de s’adresser au dé à coudre : « Au revoir Aldo, prends bien soin de mon petit ami Honey ! »

Puis se retournant vers Catharina :

« Je vous laisse, ma chère amie. Je devrais être chez moi depuis longtemps ! »

Heureusement elle n’avait pas, elle, de mari jaloux qui l’attendait au logis, prêt à l’accuser de toute sorte d’infidélité. Elle ne retrouverait, chez elle, que les chaudes conversations de son atelier, qui s’atténueraient à mesure que le soleil descendrait dans le ciel pour ne plus devenir que des bruissements, puis s’évanouiraient dans le silence de sa maison vide où elle devrait aller en cuisine pour trouver à qui parler.

« N’oubliez pas ma proposition, je vous en prie. Elle est très sérieuse. Et maintenant je file ! »

Elle ne tenait pas du tout à tomber sur le vicomte Ainsworth.

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Catharina de Fréneuse
L'enfant reconnaît sa mère à son sourire.
Catharina de Fréneuse

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MessageSujet: Re: Clap, clap, clap   Clap, clap, clap EmptyMar 4 Déc - 15:36

L'enfant fut d'abord surpris, de voir la femme éclater ainsi de rire. Cela néanmoins sut le réjouir ; il y avait trop peu de rires dans sa maison ! Il demeura accroché à sa couturière, échappant des soubresauts cristillins. Pour ma part, je me contentai de les regarder. Je n'étais pas gênée, au contraire, j'aimais bien voir l'une de mes plus proches amies trébucher sans élégance aucune à cause d'un éclat de rire trop prononcé. Pourtant, mis à part un sourire triste, je ne pus les accompagner. Je riais peu en temps normal, peut être un souffle précipite entré mes lèvres laissaient deviner que j'étais amusée mais, depuis que me lever chaque matin était devenue une tâche, une obligation plutôt qu'un geste naturel, il tait impossible pour moi de rire.

Au fur et à mesure quelle se redressait, je la suivais du regard, vide. Honey parut déçu que l'a musante femme quitte son étreinte et resta tout près, au cas ou. Ma respiration se coupa, le claquement de porte ne m'échappa pas. Je retins mes affolements, préservant mon fils innocent de la peur grandissante qui montait dans ma poitrine. L'enfant ne craignait pas son père, lui tournait toujours autour et c'était ainsi que les choses devaient être. Quand Lise attrapa mon bras, je dressait la main pour fermer mes doigts sur le sien. D'un côté je ne voulais pas quelle parte, de l'autre, je ne pouvais pas laisser le vicomte l'approcher. Je connaissais suffisamment mon mari pour savoir qu'il ne l'épargnerait pas et ce, même si c'était une femme. Ce n'était qu'une couturière après tout, pas une grande bourgeoise ou une noble. Monsieur Ainsworth ne savait pas approuver mes choix d'amies. « Si c'est pour vous entendre rire ainsi, étaler vous sur le sol comme vous le voulez. » J'etirai un sourire impénétrable : était-ce du sérieux ou de l'humour ?

« Veux pas que elle parte, moi ! » Mon fils, garçonnet qui n'atteignait pas encore mes hanches, venait d'émettre son caprice de petit prince. Lentement, je reconduisais Lise vers les escaliers. « Lise doit retourner chez elle, meg heart, elle doit travailler. » Il fronça les sourcils, parut énormément choqué « Pas vrai, ça ! Peut pas travailler, c'une fitesse Je m'arrêtai, le regardai, septique. Il sortait ça ? Je me penchai vers lui. « Une quoi ? ». Il soupira, exténue. « Mère ! Une fitesse comme vous. ». Enfin, je compris. Je me relevai et entrepris la descente des escaliers qui menaient au hall. Une main solidement posée sur la rampe, je fis la traduction à mon amie. « …Il dit que vous ne pouvez pas travailler, parce que vous êtes une noble, une vicomtesse. » Si j'étais quelque chose, les autres femmes l'étaient sans doué aussi, telle était la logique de Honey, deux ans.

Avant de laisser filer Lise, ainsi que son paquet pose tout près de la porte, je pris ses mains et murmurait « Votre proposition me va droit au cœur, je vais y réfléchir. » c'était les dents serrées que je regardai mon amie partir.

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