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 Te Deum laudamus, te Dominum confitemur.

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Misia

Misia

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MessageSujet: Te Deum laudamus, te Dominum confitemur.   Te Deum laudamus, te Dominum confitemur. EmptySam 15 Mar - 12:42

Printemps 1897

Per singulos dies benedicimus te ;
et laudamus nomen tuum in saeculum,
et in saeculum saeculi.

Dignare, Domine, die isto
sine peccato nos custodire.
Miserere nostri, Domine,
miserere nostri.

Devant elle, une grosse-petite dame boursouflée récitait avec extase le sempiternel Te Deum. Son chignon était tout défait, et des mèches de cheveux mouillées de sueur restaient obstinément plaquée contre l'arrière de son cou malgré les courants d'air qui passaient à travers toute la nef.
Derrière elle, quelqu'un reniflait bruyamment- Misia ne s'était pas retournée pour vérifier si l'individu enrhumé appartenait à la gent féminine ou masculine, mais elle soupçonnait néanmoins une femme, pour la simple et bonne raison que le public que l'on pouvait rencontrer dans une église un mardi matin à 6 heures était très majoritairement féminin.

Mais il était après tout très peu aisé de faire des statistiques ; en effet, on se trouvait à l'église Saint-Germain de Charonne, située en périphérie de la ville, et pour l'instant, il y avait exactement trois personnes dans l'église ; le renifleur ou plus probablement la renifleuse, la transpirante, et Misia, qui n'était ni l'un ni l'autre, mais avait l'air passablement épuisée ; la nuit n'avait pas été facile. En proie à ce qui pouvait s'apparenter à une crise d'angoisse, elle n'avait pas attendu l'aube pour laisser celui chez qui elle avait passé la nuit seul dans un lit qui était de toute façon trop petit pour deux.

De l'air, de l'air !

Ce genre de crises ne lui arrivait pas souvent- Dieu soit loué ! - mais elles étaient si intenses quand ça lui prenait ! Elle ressentait d'abord comme de la peur, ou alors une angoisse étrange et terrible car incompréhensible, puis venaient les sueurs froides et parfois les tremblements, et enfin, l'impression qu'elle étoufferait si elle ne sortait pas dehors dans la minute.

Elle avait donc marché jusqu'à cette petite église qu'elle ne connaissait pas bien, car elle était déjà passée devant mais n'y était jamais rentrée. Sans être une parfaite mécréante, elle ne pouvait de toute façon décemment pas être un exemple de piété. C'eût été hypocrite.

Cela tombait bien, finalement, cette petite marche nocturne (et sans mauvaises rencontres en plus !) jusque ce petit havre religieux froid et tranquille ; elle avait une foule de péchés à se faire pardonner...
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Caliel Cozart

Caliel Cozart

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MessageSujet: Re: Te Deum laudamus, te Dominum confitemur.   Te Deum laudamus, te Dominum confitemur. EmptyMer 26 Mar - 3:22

00 : 07.
Comment fait-elle ? Avait songé Caliel, étendu sur ses draps défaits, les yeux grands ouverts sur le plafond blafard de sa chambre. Chambre qu’il partage, soit dit en passant, avec deux de ses frères. La maison, bien que grande, tremblait presque, secouée par un insupportable concert de ronflements. Tous, tous à l’exception de lui et sa mère, ronflaient comme des porcs bienheureux. Et ils étaient onze à dormir sous le même toit. Quatre de ses frères s’en étaient allés, mariés, mais le cauchemar persistait. Caliel ne dormait pas. Exaspéré, il s’était assis en tailleur et avait soupiré.

- Baptiste. Paul. … BAPTISTE ! PAUL ! Vous dormez ? … Évidemment, vous dormez. Vous dormez comme des imbéciles heureux, salauds.

Il s’était levé, avait enfilé chemise blanche et pantalon noir et, harassé, s’en était allé en agrippant, au passage, l’étui noir de son violon, sans réfléchir. Nul n’avait interrompu son sommeil pour si peu. Pas même sa mère. Et il avait marché, marché, marché jusqu’à laisser Paris derrière lui. Malgré la fraîcheur nocturne et l’humidité qui s’accrochait à lui, malgré les sueurs froides et les frissons, il avait poursuivi son chemin, déterminé à s’apitoyer sur son sort jusqu’à la fin. Jusqu’à ce qu’il tombe de fatigue et dorme, enfin, malgré tout.

Les lacets défaits, les chaussures barbouillées de terre, le pan de chemise pendouillant lâchement, le col ouvert, les cheveux en pleine révolte, son violon serré contre lui, Caliel avait finalement abouti sur le seuil d’une église.

5 : 39
- Hé. Hé garçon! Réveille, garçon !

Une grosse dame lui enfonce sa chaussure dans les côtes. Caliel ronchonne, manque perdre l’équilibre, mais se retient de justesse dans le cadre de l’imposante porte. Mollement, il se lève. La grosse dame ouvre brusquement et pénètre dans l’église. Caliel, non sans mal, retient la poignée et entre à son tour. Il est fatigué. Le signe de croix est mou, il a envie de tremper son visage dans l’eau bénite, mais il résiste et traîne sa carcasse dans la nef. Au hasard, il désigne une rangée de bancs et s’y installe en posant son instrument à ses côtés. Devant lui, une jolie nuque. Il renifle. Cette nuque est celle d’une jeune femme. Probablement jolie. Il renifle. On ne fait pas de si belles nuques aux guenuches. Il renifle. Ah lala… Ce rhume ! Ce rhume l’a pris comme un voleur, tandis qu’il dormait, sans doute. Du revers de sa manche, il essuie ses narines fuyantes. Puis, il se penche vers l’avant et s’accoude contre le dossier devant lui.

- Psst ! Mademoiselle… chuchote-t-il. Pardonnez-moi de vous interrompre mais, je suis curieux… Une jeune femme comme vous, de si bonne heure dans une église… Pour quoi, pour qui priez-vous ? À moins que ce ne soit votre mari... il ronfle comme un porc, lui aussi?

Et tout cela, avec grand sérieux et grande fatigue.
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Misia

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MessageSujet: Re: Te Deum laudamus, te Dominum confitemur.   Te Deum laudamus, te Dominum confitemur. EmptyLun 31 Mar - 10:13

Tout absorbée par ses repentances, Misia n'avait pas remarqué l'entrée dans l'église d'un duo bien étrange- elle entendit plus ou moins quelqu'un s'asseoir sur le banc derrière elle, mais ne se retourna pas ; elle était trop occupée à ce que le Seigneur lui pardonne de mener M. X par le bout du nez, de lui faire tromper sa femme-quoique, se dit-elle, celle-ci ne devait pas être la plus fidèle des épouses, son mari était bien trop affairé ailleurs- ah, oui, elle devait aussi prier pour sa mère et sa grand-mère, et puis pourquoi pas pour...

Non, là ça devenait vraiment perturbant.Elle en était au moins à son cinquième reniflement- quelle manque de discrétion et de savoir-vivre ! Misia prépara dans le recueillement son regard le plus noir, celui qu'elle réservait pour les grandes occasions- certes, c'était sans doute un peu exagéré dans le cas présent, mais là, elle n'était vraiment pas d'humeur...

Elle sursauta un peu au "Psst" venant de derrière - quoi, et en plus elle se permettait de l'importuner!- Misia se retourna, son regard noir avec elle, auquel s'additionna aussitôt une bouche entrouverte par la surprise, ce qui lui donna un air assez étrange : certes, le fait que ce soit un représentant de la gent masculine n'était pas si surprenant, mais Misia s'était représenté sa voisine de derrière avec un tas de petits détails ; elle imaginait une vielle rombière aux joues flasques et au teint jaune, avec de la morve au coin du nez.

En fait de vieille rombière, il y avait un tout jeune homme, l'air fatigué et les traits délicats. Des traits de fille, se dit Misia, un peu comme l'autre jeune homme, celui qui l'avait invité dans sa chambre, dans cet hôtel somptueux..

Elle se souvient avec aigreur de cette expérience étrange, une situation qu'elle n'avait jamais vécue auparavant... ce souvenir la décida à ne pas se laisser attendrir par la jolie petite mine de son voisin : après tout, qu'il soit vieille rombière ou jeune insolent, il fallait lui apprendre les bonnes manières !

-Jeune homme- pas de Monsieur, ç'aurait été lui donner trop d'importance- occupez- vous de vos oignons. Et arrêtez de renifler si fort, on ne s'entend plus prier.

Le tout assorti d'un papillonage de yeux rapidement levés au ciel l'air de dire "Ah, les adolescents d' aujourd'hui !".

Seulement voilà ; les quelques secondes qui s'étaient écoulées avaient suffi pour susciter un peu d'intérêt de la part de la jeune femme vis-à-vis de cet étrange garçon ; avec son air d'ange, son allure en pagaille et son instrument de musique posé à côté de lui, il semblant...différent.

Mais après tout, c'était sans doute juste un original, peut-être même un fou : d'ailleurs, elle n'avait strictement rien compris à son histoire de ronflements.

-Et je vous prie de laisser mon mari là où il est.

Elle ne pouvait décidément pas s'empêcher...
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Caliel Cozart

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MessageSujet: Re: Te Deum laudamus, te Dominum confitemur.   Te Deum laudamus, te Dominum confitemur. EmptyJeu 3 Avr - 14:41

C’est confirmé, la belle inconnue est très jolie. Même fâchée contre lui. Caliel se sent léger, il flotte au-dessus de lui-même, distrait, absent, somnambule. En temps normal, les reproches de la demoiselle l’auraient heurté, il se serait senti mal et aurait tout fait pour se faire pardonner sa rudesse, mais ce matin, sous le toit de cette église plongée dans les brumes, il sent glisser sur lui les paroles de la victime de sa fatigue. Comme la pluie. Les mots, le ton, le touchent, cependant sans le blesser.

- Pardon, madame. Vous avez raison… C’est irrespectueux. Les gens viennent ici se recueillir et me voilà, inconscient, à m’improviser fanfare à moi seul.

Ses excuses adressées, il se rassoit proprement sur son banc avant de s’incliner vers le sol, d’inspirer profondément et, enfin, de libérer ses narines embourbées en se mouchant bruyamment dans la manche de sa chemise, une bonne fois pour toutes. Du moins l’espère-t-il. Le bruit résonne dans l’église longtemps, jusqu’à l’autel.
N’osant pas se redresser de suite, Caliel roule ses manches jusqu’à ses coudes. Il a, au moins, la décence d’épargner la vue de ses humeurs nasales à sa voisine de devant. Il attend un moment, par crainte de subir les regards accusateurs de la totalité des occupants – heureusement peu nombreux – du lieu saint.
Finalement, il s’adosse à nouveau contre le dossier de bois lustré. L’opération semble avoir fonctionnée. Caliel ne renifle plus, les tuyaux sont dégagés, l’air est bon.

- Et je vous supplie d’accepter mes condoléances pour votre mari. Je manque de sommeil et, visiblement, cela ne me fait pas. Je suis ingrat et bête.

« Là où il est ». Caliel y a entendu le paradis.

- Tenez, pour me faire pardonner, je vais jouer pour vous.

Tout en parlant, il ouvre l’étui de son violon, en sort l’instrument et s’installe. Mais ce n’est pas assez. Alors Caliel se lève. Debout sur le siège, il ferme les yeux. Une partition apparaît dans sa tête et disparaît aussitôt. Ses mains se mettent alors à s’agiter naturellement, animées par la musique, guidées par la mémoire. Le morceau qui s’impose est la section presto de la sonate en sol mineur de Bach.
La mélodie s’étend dans la nef, rebondit sur les colonnes de bois, glisse sur les vitraux et éclate dans le chœur. Il joue avec aisance malgré les circonstances. Le violon, à dire vrai, lui est un réconfort, une trêve. Cela, peut-être, se devine à la manière qu’il a de déposer sa tête contre l’instrument, de le bercer, de respirer avec lui.
En secret, il redoute le moment où s'achèvera le mouvement. Il n'a pas envie d'ouvrir les yeux et de subir les regards désapprobateurs. Et donc, lorsque la dernière note est atteinte, il se rassied posément, prudemment, sans soulever les paupières. Il se risque à les rouvrir qu'une fois assis. Son violon tout contre lui, il murmure :

- Je m'appelle Caliel. Et vous?

Spoiler:
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Misia

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MessageSujet: Re: Te Deum laudamus, te Dominum confitemur.   Te Deum laudamus, te Dominum confitemur. EmptyDim 13 Avr - 21:29

C'était vraiment un drôle de coco. D'abord, il s'exprimait d'une façon un peu étrange- c'était quoi son histoire de fanfare ? Elle n'avait rien compris. Ensuite, il n'avait pas l'air convenable, mais pas tout à fait inconvenable non plus ; en fait, son apparence générale semblait inadaptée à ses attitudes : quelle idée de se moucher de la sorte !

Elle lui décocha un regard vaguement dégoûté, mais ne le maintint pas longtemps, trop curieuse de ce que cet étrange jeune homme pouvait dire ou faire.

Elle se mordit la lèvre inférieure pour ne pas éclater de rire à l'évocation de son inexistant et défunt mari. A la place, elle planta ses yeux éclaircis par la fatigue dans les prunelles vert électrique du jeune homme- comme il avait de jolis yeux celui-là !  

-J'accepte vos excuses.

Et de se retourner avec l'air pimbêche. Mais apparemment, son voisin de banc avait une autre idée en tête. Quand les premières notes résonnèrent dans la salle, de battre le coeur de Misia sembla s'arrêter, l'espace de quelques secondes. Sans doute un peu par surprise, aussi parce qu'elle trouvait ça vraiment beau. Si elle ne connaissait ni le morceau ni le compositeur, la musique, elle, suffisait à la ravir. Elle adorait ça : dans la rue, elle s'arrêtait pour écouter jouer ses compagnons d'infortune, elle aimait les bruits de la ville et ses silences, et  elle aimait aussi danser : d'ailleurs, elle n'était pas une très bonne danseuse mais elle avait le sens du rythme.
Et la musique qui virevolte dans l'église, non, qui la remplit tout entière, lui fait venir les larmes aux yeux. Elle en est étonnée. Certes, cette musique est plutôt triste, mais tout de même...
Puis le violonniste se rassoit, son instrument magique bien serré contre lui... il a l'air d'un enfant perdu.

-Je m'appelle Caliel. Et vous?

-Moi c'est Lou...

Elle s'interrompt. Elle ne va quand même pas lui dire son vrai prénom ?! Qu'est-ce qui lui prend ? Oui, mais maintenant il est trop tard pour reculer, "Lou-Misia", ce serait vraiment trop étrange...

-Ise. Louise, annonce-t-elle comme à regret.

Elle-même ne se considère plus comme Louise depuis des années... alors pourquoi ?? Bon. Il lui faut se reprendre, et vite. C'était très beau, mais pas de quoi être bouleversée pendant deux heures, non ?

-C'était très joli Caliel. Mais c'est une église ici...

Elle s'interrompt de nouveau. Elle se trouve très ennuyeuse. Elle n'a pas envie de jouer à la grande dame raisonnable.

-En fait, c'était vraiment joli.

Et elle met toute sa force de conviction dans ce petit adverbe, histoire de lui faire comprendre que son ressenti dépasse ses paroles. Elle ne sait pas vraiment pourquoi, mais elle ne veut pas, pour cette fois, jouer les indifférentes. Pourtant, comme il lui serait plus facile de le faire !

-Vous êtes musicien?

C'est à ce moment-là qu'une voix venue dont on ne sait se met à gronder :

"C'est pas bientôt fini, tout c'foin ? On est dans une église, bande de ruffians !"
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